Bruxelles va renvoyer au printemps son verdict sur le budget de la France, mais va demander à Paris plus d'efforts pour réduire son déficit, sous peine de sanctions.
La Commission européenne doit annoncer vendredi ses avis sur les projets de budget 2015 des pays membres de la zone euro. Les débats ont été vifs au sein de la Commission, comme l'a illustré la semaine dernière la tribune au vitriol contre la France du commissaire allemand Günther Oettinger.
Les chefs de cabinet des commissaires se sont réunis exceptionnellement le week-end dernier pour caler la position de l'exécutif. Une réunion plénière de la Commission était programmée mardi après-midi pour l'entériner.
Sept pays vont être jugés "à risque" de ne pas respecter les règles européennes en matière de déficit et de dette, a-t-on appris de source européenne. Parmi eux, la France, mais aussi l'Espagne et le Portugal pour leurs déficits excessifs, l'Italie et la Belgique pour leur dette.
Le sort de la France est au centre des attentions. Elle avait obtenu un nouveau délai de deux ans, jusqu'en 2015, pour ramener son déficit public sous la barre des 3%. Mais elle sera loin du compte puisque Paris prévoit un déficit de 4,3% l'an prochain et un retour dans les clous seulement en 2017.
Pour autant, la Commission et son président Jean-Claude Juncker ont décidé de ne donner à ce stade ni nouveau délai ni nouvel objectif à la France, et renoncé à ouvrir une procédure de sanctions pour ses dérapages en 2014 et la faiblesse de son effort structurel en 2015.
Elle a préféré temporiser en reportant ces décisions au printemps, probablement fin mars. Bruxelles y verra alors plus clair après la clôture des comptes 2014, le vote définitif du budget 2015 et l'évaluation plus précise des incidences budgétaires des réformes promises par Paris.
"Ceci nous permettra de faire valoir que nous avons parfaitement tenu nos engagements pour 2014 et 2015", a-t-on estimé mardi dans l'entourage du ministre des Finances Michel Sapin, avant d'ajouter: "ce qui importe, c'est la croissance et notre capacité à adopter des politiques en ce sens".
- Lettre de Paris à Bruxelles -
Mais la Commission va demander clairement plus d'efforts à la France. Paris s'était engagé à fournir en 2015 un effort structurel (hors effet de la conjoncture) correspondant à 0,8% du PIB. La France a annoncé in extremis fin octobre un effort de 0,5%, le minimum exigé par la Commission. Mais après un examen précis, les services de l'exécutif européen n'y croient pas. Ils ont ramené ce chiffre à 0,3%. La France doit donc à tout prix trouver de nouveaux moyens pour remonter à 0,5%, confie-t-on à la Commission.
L'OCDE s'est invitée dans le débat en soutenant les politiques plus souples voulues par Paris et Rome. "La zone euro s'approche du point mort et fait peser un risque majeur pour la croissance mondiale", a indiqué mardi l'organisation économique, ajoutant que "le rythme plus lent de consolidation budgétaire structurelle () que la France et l'Italie proposent dans le cadre de leurs budgets 2015 semble justifié".
En fin de semaine dernière, le Premier ministre français Manuel Valls, comme son homologue italien Matteo Renzi, ont envoyé une lettre à Bruxelles pour confirmer leurs engagements en matière de réformes. C'est ce qui a permis d'éviter le scénario humiliant des sanctions, assure-t-on au Berlaymont, le siège de la Commission.
Paris a déjà engagé des réformes, notamment de réduction des charges des entreprises avec le pacte de responsabilité. Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron doit présenter en décembre un projet de loi sur l'activité, qui comportera de nouvelles mesures de libéralisation de l'économie, y compris du marché du travail.
"Il nous faut peut-être afficher () des mesures qui montrent que la France a parfaitement compris le monde dans lequel elle vit", a déclaré la semaine dernière M. Valls, sans préciser s'il parlait de la loi Macron ou d'autres mesures.
L'attaque de M. Oettinger jeudi dernier contre la France, fustigeant un "pays déficitaire récidiviste" et appelant Bruxelles à le traiter avec "rigueur", a été mal vécue. C'est une "très mauvaise méthode" pour assurer la collégialité, dénonce-t-on dans l'entourage de son collègue français Pierre Moscovici, chargé des Affaires économiques.
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