La justice doit dire ce mardi si elle confirme la restitution à son père biologique d'un garçonnet de 18 mois qu'il n'a jamais vu, placé depuis sa naissance sous X dans une famille en vue de son adoption.
Le père, défendu notamment par le président d'une association militant contre le secret lié aux accouchements sous X, a - selon l'avocat du conseil général de Loire-Atlantique - tardé à réclamer son fils et n'a toujours pas demandé à le rencontrer.
La décision de la cour d'appel de Rennes doit être rendue lors d'une audience non publique, et notifiée aux avocats par voie électronique.
En première instance, en avril, le tribunal de grande instance de Nantes avait ordonné la remise de l'enfant à son père âgé de 29 ans, résidant dans la banlieue nantaise. Et le 13 octobre, l'avocat général avait requis la confirmation de ce jugement.
Le conseil général de Loire-Atlantique et le parquet avaient interjeté appel au nom de l'intérêt de l'enfant, déjà "stabilisé" dans sa famille adoptante.
L'avocat du département, Me Jean-Christophe Boyer, s'interroge sur le "revirement" du parquet général, qui "a requis la confirmation du jugement contre lequel il a fait appel" et qui n'a "pas dit un seul mot sur l'intérêt de l'enfant" dans ses conclusions, "alors que la loi l'oblige à s'y intéresser".
- "Destructeur" -
"Plus d'une dizaine d'expertises ont été produites à l'audience et les pédopsychiatres sont unanimes : c'est destructeur d'enlever un enfant qui a aujourd'hui 18 mois, qui a un père et une mère qu'il appelle +papa+ et +maman+. () A cet âge, il arrête son développement intellectuel et psychomoteur car il va devoir se réinvestir totalement dans une nouvelle cellule familiale", souligne Me Boyer.
"Cet enfant, son père l'a désiré depuis le début. Il y avait un projet commun de parentalité entre deux adultes, mais le couple ne résiste pas. () Son père de naissance, c'est le seul qui est en capacité de parler à cet enfant de sa mère", insiste Me Pauline Loirat, qui défend le père biologique, Yoann Delorme.
"Quand j'ai appris l'accouchement, j'étais incarcéré au centre pénitentiaire depuis 2011. Je décide de reconnaître mon fils à la mairie de Nantes, et là on me dit d'aller au tribunal le plus proche pour lancer la procédure", retrace M. Delorme.
"Le jour exact où l'enfant est placé (le 12 juillet 2013, soit près de deux mois et demi après sa naissance, ndlr), le conseil général est informé qu'une procédure est engagée auprès du procureur pour reconnaissance paternelle. Malgré cela, le conseil général ne va pas réagir et maintient l'enfant dans cette famille", elle aussi "victime" selon Me Loirat "de la précipitation du conseil général et de son incapacité à reconnaître sa précipitation".
"Je suis dans mon droit, j'ai fait la procédure dans les règles (). Quoi qu'il en soit, mon fils, je vais le récupérer, je me battrai pour lui", ajoute M. Delorme.
"On ne lui nie pas le fait d'être un père (). Mais s'il avait agi dans les délais, son enfant lui aurait été remis", objecte l'avocat du conseil général, selon lequel M. Delorme a tardé à faire connaître son intention vis-à-vis de l'enfant, se contentant dans un premier temps de demander la suspension de la procédure d'adoption et non la restitution de son fils, réclamée "trois mois après l'expiration du délai".
Dans cette affaire, la famille adoptive vit "une torture", a confié mardi matin sur Europe 1 la mère adoptive, dont le nom n'a pas été révélé. "Du jour au lendemain, si on nous l'enlèveon peut pas imaginer une chose pareille". "Notre petit bonhomme, il nous appelle papa maman, et à chaque battement de son coeur on est là".
"On attend, on essaye d'avoir confiance", a-t-elle ajouté sur RTL. "Aujourd'hui, on se raccroche à la vie qu'on a avec ce petit garçon, on est très heureux tous les trois".
"Si M. Delorme gagne son procès, ça veut dire que tous les pères peuvent récupérer leurs enfants à n'importe quel moment (). On est en train de revenir sur un des fondamentaux des droits de l'adoption", craint Me Boyer.
"A ce jour, M. Delorme n'a toujours pas demandé à voir son fils", malgré l'accord de la famille adoptante, ajoute-t-il.
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