Mathias Menegoz, quadragénaire à l'allure juvénile, a remporté jeudi l'Interallié, le dernier prix de la saison littéraire, pour son premier roman, "Karpathia", une ensorcelante fresque historique qui se déroule en Transylvanie au XIXe siècle.
"Je dédie ce prix à mon père, décédé", a déclaré très ému l'auteur de 46 ans, neurobiochimiste de formation, qui s'est dit "très surpris". Il a été choisi par le jury au 5e tour de scrutin par 6 voix, contre 4 à Simonetta Greggio pour "Les nouveaux monstres" (Stock).
La consécration de ce premier roman prive de lauriers, cette année, un autre finaliste de l'Interallié, Eric Reinhardt, dont le roman "L'amour et les forêts" (Gallimard), avait été plébiscité par la critique et les lecteurs.
Visiblement intimidé par les journalistes qui se pressaient autour de lui, Mathias Menegoz, coiffure brune sage et silhouette adolescente, a expliqué à l'AFP avoir tenté "d'écrire un roman d'aventures, avec de l'action et des rebondissements. Je n'ai pas compté le nombre de pages". Son ample roman en compte 700
"Le XIXe siècle dans les Balkans, c'est une période exotique. J'ai voulu m'éloigner de la grande époque viennoise parce que de grands auteurs ont déjà écrit sur cette époque", a-t-il ajouté.
"Karpathia" est "un très beau roman, avec un sujet très original et le choix d'une période extrêmement romanesque", a renchéri la romancière Nelly Alard, lauréate 2013 de l'Interallié et jurée cette année. Comme le veut la tradition, elle sera remplacée l'an prochain par Mathias Menegoz.
Un autre premier roman, "Constellation" (Stock) d'Adrien Bosc, avait remporté fin octobre le Grand prix de l'Académie française pour lequel concourrait aussi Mathias Menegoz.
Dans "Karpathia", grand roman d'aventures à la Dumas, l'écrivain, né en 1968 en France d'un père normand et d'une mère souabe, emporte le lecteur en Transylvanie, dans les années 1830, une région où les différentes communautés rivales aux langues et religions multiples sont toujours au bord de l'embrasement.
- 'Le Royaume', grand oublié -
Pour un autre membre du jury, l'écrivain Jean-Marie Rouart, "la seule critique que l'on puisse faire à ce roman qu'on ne lâche pas jusqu'à la fin, c'est qu'il est archi-classique".
Issu d'une famille travaillant dans le cinéma, Mathias Menegoz a préféré recréer un univers par le verbe. Il a inventé des personnages et une histoire aux multiples ressorts dramatiques mais a bâti son roman sur de solides fondations historiques.
Son père était le réalisateur français, Robert Menegoz, et sa mère est une productrice réputée, née à Budapest, Margaret Menegoz, directrice des films du Losange, qui ont notamment produit "Amour" de Haneke.
Le millésime 2014 du marathon des prix littéraires a été marqué par l'éviction des podiums de livres phares de la rentrée mais aussi par de belles reconnaissances.
Ainsi, le jury Médicis a donné son premier grand prix littéraire à Antoine Volodine pour "Terminus radieux" (Seuil) et consacré une oeuvre de 30 ans. Tout comme Lydie Salvayre, lauréate surprise du Goncourt avec "Pas pleurer" (Seuil), alors que les favoris étaient l'Algérien Kamel Daoud avec "Meursault, contre-enquête" (Actes Sud) et David Foenkinos avec "Charlotte".
Le romancier a cependant décroché le Renaudot, le prix Goncourt des lycéens et les faveurs des lecteurs avec ce récit bouleversant en vers libres sur la vie de Charlotte Salomon, jeune artiste juive surdouée assassinée à Auschwitz.
En revanche, le grand oublié a été "Le Royaume" d'Emmanuel Carrère (P.O.L), écarté de la première sélection du Goncourt, puis de toutes les autres listes, certains jurés lui reprochant son "nombrilisme".
Cela n'a pas empêché cette fresque captivante sur les débuts de la chrétienté de figurer parmi les meilleures ventes de romans. Et son éditeur P.O.L peut se réjouir jeudi de l'attribution de l'Interallié à l'un de ses autres champions.
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