Le Premier ministre social-démocrate roumain Victor Ponta a reconnu sa défaite surprise à l'élection présidentielle de dimanche, la mobilisation record des Roumains inquiets pour la démocratie dans cet ancien pays communiste ayant permis au challenger Klaus Iohannis de créer la sensation.
"J'ai félicité M. Iohannis pour sa victoire. Le peuple a toujours raison", a déclaré M. Ponta, 42 ans, tout en excluant pour le moment de démissionner de son poste de premier ministre.
"Nous avons gagné!", a pour sa part écrit le leader de la droite, 55 ans, sur son compte Facebook.
Les premiers sondages à la sortie des urnes donnaient les deux candidats au coude à coude, mais selon des estimations affinées des instituts de sondage, l'écart entre les deux se creusait, avec une avance de deux à trois points pour M. Iohannis.
Les premiers résultats partiels sont attendus dans la nuit de dimanche à lundi.
M. Iohannis, issu de la minorité allemande, est depuis 2000 maire de la ville médiévale de Sibiu (centre).
Sa victoire intervient sur fond de craintes croissantes de l'opinion concernant une mainmise de la majorité de gauche de M. Ponta sur la justice, qui a fait de grands progrès ces dernières années dans la lutte contre la corruption, un fléau dans le pays.
Alors que de nombreux sociaux-démocrates sont visés par des enquêtes ou inculpations pour corruption, M. Ponta avait à plusieurs reprises critiqué le parquet anti-corruption (DNA), dont le bilan est systématiquement loué par Bruxelles.
Et lors d'un "mardi noir" en décembre, sa coalition avait fait adopter une loi controversée octroyant une super immunité aux élus, suscitant les critiques des chancelleries occidentales, avant que la Cour constitutionnelle et le président conservateur sortant Traian Basescu ne bloque son entrée en vigueur.
M. Iohannis a quant à lui assuré qu'il oeuvrerait pour consolider l'Etat de droit et défendre l'indépendance de la justice.
Si M. Ponta reste Premier ministre, la Roumanie connaîtra, comme ces deux dernières années, une nouvelle cohabitation. Le président est en charge de la politique étrangère et de la nomination des postes de la haute fonction publique, y compris la justice.
-Manifestations et mobilisation-
En Roumanie, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour exprimer leur solidarité avec les expatriés, dont des milliers n'ont pas pu voter en raison du nombre insuffisant de bureaux de vote à l'étranger.
A Bucarest, quelque 10.000 manifestants ont réservé un accueil triomphal à M. Iohannis, qui est allé les saluer.
Alors que les sondages réalisés entre les deux tours donnaient M. Ponta gagnant avec une avance de huit points, la mobilisation des jeunes a fait la différence, soulignent les analystes.
Selon des chiffres préliminaires, le taux final de participation a dépassé les 62%, un record pour ce pays où la lassitude des électeurs face à la corruption et à la pauvreté n'a cessé de croître ces dernières années.
Ce scrutin était considéré comme crucial, à un moment où la démocratie a subi des revers dans d'autres pays d'Europe centrale comme la Hongrie. Il s'agit du septième scrutin présidentiel depuis la chute du dictateur Nicolae Ceausescu il y a 25 ans dans ce pays, le plus pauvre de l'Union européenne après la Bulgarie.
La mobilisation a été particulièrement forte à l'étranger, où des milliers de Roumains attendaient toujours de pouvoir voter en fin de soirée à Paris, Londres ou Turin, fustigeant le gouvernement pour avoir refusé d'ouvrir davantage de bureaux de vote et se disant "humiliés".
"Le souvenir de ce dimanche perdurera dans la mémoire des Roumains, qui ne seront plus indifférents devant des violations de l'Etat de droit et de la démocratie", a écrit Cristian Tudor Popescu, éditorialiste du quotidien Gandul.info.
Au premier tour, Klaus Iohannis avait obtenu 46% des voix des expatriés, contre 15,8% pour Victor Ponta.
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