Lydie Salvayre a reçu mercredi le Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires français, pour "Pas pleurer", un roman sur la guerre d'Espagne, devançant les deux grands favoris, l'Algérien Kamel Daoud et le Français David Foenkinos.
Privé de Goncourt, David Foenkinos (40 ans) a été récompensé par l'autre prix très convoité du Renaudot, descerné dans la foulée.
"Pas pleurer" (Seuil) a été choisi par les jurés au 5e tour, par 5 voix contre 4 au roman de Daoud, "Meursault contre-enquête".
Daoud, qui aurait été le premier Algérien à décrocher le Goncourt, avait semblé anticiper le résultat en postant un message sur sa page Facebook.
"Journée belle mais lourde à porter. J'aurais voulu offrir de la joie aux miens, aux gens, aux lecteurs. Tous. Rentrer au pays avec une belle image de soi", avait-il écrit.
"Je suis très heureuse, je suis très émue", a commenté Lydie Salvayre, les larmes aux yeux, en se faufilant dans la cohue des journalistes rassemblés au restaurant Drouant, dans le centre de Paris, où est traditionnellement décernée cette récompense.
Le roman de cette auteure française est hanté par la figure de Georges Bernanos et la voix de sa propre mère qui lui raconte au soir de sa vie l'insurrection libertaire de 1936 en Espagne.
Montse raconte à sa fille dans un savoureux mélange de français et d'espagnol la misère d'une enfance catalane et comment les idées nouvelles ont agité l'Espagne rurale de cette époque.
"Nous avons d?abord couronné un roman d'une grande qualité littéraire, un livre à l?écriture très originale, même si je regrette qu?il y ait parfois trop d?espagnol", a souligné Bernard Pivot, président de l?Académie Goncourt.
Lydie Salvayre est née en 1948 de parents républicains espagnols exilés dans le sud de la France pour fuir le franquisme. Son père est andalou et sa mère catalane. Elle a passé son enfance près de Toulouse et appris le français seulement à l'école primaire.
Après des études de lettres puis de médecine et avoir exercé comme psychiatre, Lydie Salvayre publie son premier roman, "La Déclaration", en 1990, puis viendront notamment "La médaille", en 1993, "La Compagnie des spectres", en 1997, élu meilleur livre de l'année par le magazine Lire et prix Novembre (aujourd'hui prix Décembre), "BW", en 2008, ou "Sept femmes", en 2013.
Son ?uvre est traduite dans une vingtaine de langues.
- Cri d'amour -
David Foenkinos a raflé le Renaudot pour son roman "Charlotte", cri d'amour pour Charlotte Salomon, jeune artiste juive allemande assassinée à Auschwitz à 26 ans.
L'écrivain, qui a obtenu le prix au 6e tour par 5 voix contre 3 à Jean-Marc Parisis pour les "Inoubliables" (Flammarion) et une à Kamel Daoud, fait revivre avec passion le destin tragique de cette jeune femme dans ce livre édité chez Gallimard.
"Charlotte" a été élu en septembre "Livre préféré des libraires" et se vend déjà très bien. L'écrivain n'a pas choisi la facilité avec un livre sous forme d'un long poème de 220 pages en vers libres.
A 40 ans, l'écrivain au visage juvénile orné d'une barbichette noire, est connu pour ses romans populaires dont le best-seller "La Délicatesse", porté avec succès à l'écran.
"C'est absolument magique. Charlotte Salomon va être découverte par beaucoup de gens avec ce prix prestigieux qui va donner un éclairage formidable, c'est donc aussi un prix pour elle et pour sa mémoire, je suis très heureux car je pensais que ce livre ne se ferait jamais", a-t-il déclaré à l'AFP.
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