Ségolène Royal a prôné mardi une solution de compromis et exclu "le tout ou rien" sur le projet controversé du barrage de Sivens, peu avant une réunion à Paris de tous les acteurs concernés -- défenseurs de l'environnement, représentants des agriculteurs, élus locaux.
Cette réunion a lieu neuf jours après la mort du militant écologiste Rémi Fraisse lors d'affrontements entre manifestants et forces de l'ordre, qui a constitué un tournant dramatique dans la poursuite d'un projet contesté localement depuis plusieurs années.
Interrogée sur l'arrêt ou non du projet de barrage, la ministre a plaidé sur France 2 pour une "convergence entre points de vue très différents" afin de "trouver un équilibre" entre développement économique et défense de l'environnement. "A quoi cela ressemblerait de tout arrêter sans réfléchir ? Et de tout continuer sans réfléchir ? Ce n'est pas la solution", a-t-elle lancé.
"Personne dans notre pays ne pourra, par la violence, interdire la réalisation de travaux et d'équipements qui sont indispensables au développement économique", a-t-elle ensuite lancé devant l'Assemblée nationale, répondant à une question de Cécile Duflot, qui avec ses collègues EELV a observé une minute de silence à la mémoire du militant contre la volonté du président Claude Bartolone.
"Pour un gouvernement et dans un Etat de droit, il est hors de question de céder à la violence, notamment quand il s'agit de projets qui préparent l'avenir", a renchéri Manuel Valls.
Après une semaine de vives critiques sur la gestion de ce dossier par le gouvernement, François Hollande a estimé depuis Ottawa que cette "réunion de concertation sur la base d'une expertise" était "la bonne méthode".
Il y a eu "une erreur d'appréciation", avait déclaré Mme Royal dimanche, critiquant pour la première fois la pertinence de ce projet de retenue d'eau dans le Tarn, destinée à l'irrigation. "Un tel ouvrage ne serait plus possible aujourd'hui", avait-elle ajouté, se basant sur un rapport d'experts commandité en septembre par son ministère, très critique à l'égard du projet.
Le coprésident des députés écologistes, François de Rugy, a souhaité mardi que la ministre "puisse trouver les voies d'une solution acceptable" en vue d'un abandon du projet.
Le chef de file des députés PS, Bruno Le Roux, a au contraire estimé qu'il ne pouvait "être arrêté par une simple décision due à des manifestants".
Mme Royal doit recevoir à 18h à son ministère les élus locaux, dont Martin Malvy, président PS de la Région et président de l'Agence de l'eau Adour-Garonne, et Thierry Carcenac, président PS du conseil général, maître d'ouvrage du barrage. Sont aussi conviées les associations agricoles et environnementales. Les deux ingénieurs auteurs du rapport, qui sera au centre des échanges, seront également présents.
La ministre doit s'exprimer devant la presse à l'issue de la rencontre.
- Travaux suspendus -
Le rapport met notamment en évidence des besoins surestimés, une étude d'impact "de qualité très moyenne", "un financement fragile", le manque d'"analyse des solutions alternatives possibles".
Il recommande de poursuivre les travaux, trop avancés, mais préconise de réduire le volume d'eau destiné à l'irrigation classique pour le reporter sur d'autres usages (augmenter le débit réservé d'hiver, ou irriguer d'autres types d'exploitations?). Il préconise que "le coût de fonctionnement soit porté par les usagers, les agriculteurs".
Objet de nombreux recours en justice pour son coût et ses conséquences sur un écosystème fragile, le projet de barrage-réservoir d'1,5 million de m3 d'eau stockée - une taille relativement modeste par rapport à d'autres - est soutenu par le conseil général.
Vendredi, le département a entériné une suspension des travaux, sans en fixer la durée.
"On n'est pas sur un projet démesuré" alors, "sommes-nous dans un Etat de droit ou une République bananière ?", a déclaré mardi Xavier Beulin, le président de la FNSEA qui défend le projet.
La Confédération paysanne, 2e syndicat agricole, opposé à la retenue, demande une réorientation des cultures vers des systèmes moins gourmands en eau.
Du côté de France Nature Environnement, le réseau d'associations dont faisait partie le militant tué, on espère l'abandon pur et simple du projet, même si on n'attend pas forcément d'annonce dès mardi, selon son président Denez L'Hostis.
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