Le pape Paul VI, pape du Concile Vatican II, pasteur ouvert et anxieux qui a régné 15 ans sur l'Eglise dans la tempête de 1968 et auquel François se réfère souvent, va être solennellement béatifié dimanche.
Giovanni Battista Montini a été pontife de 1963 à 1978, période difficile pour l'Eglise catholique qui a vu des multitudes de prêtres et de fidèles l'abandonner.
Son pontificat a subi de plein fouet la sécularisation et la libéralisation des moeurs. La polarisation politique, en pleine guerre froide, n'a pas facilité sa tâche.
Ce pape intellectuel et sensible, à la voix hésitante, a achevé en 1965 le Concile qu'avait ouvert Jean XXIII en 1962.
Le lancement spectaculaire de l'oecuménisme, les encycliques et discours sur la paix, la justice sociale et l'inégalité Nord-Sud, l'encouragement de l'Ostpolitik, le dialogue avec les artistes et les non-croyants, les voyages intercontinentaux, les audiences générales du mercredi, la réforme de la curie et la création de conseils pontificaux: tout cela est aussi à son actif.
Après avoir canonisé en grande pompe Jean XXIII et Jean Paul II en avril, François béatifie -- une première étape vers une éventuelle canonisation -- un pape moins médiatique, à l'écoute comme lui des pulsations de son époque et des "situations concrètes".
Souvent comparé à Jean XXIII pour sa bonhommie, François rejoint en effet aussi Paul VI: peu après son élection en 1963, Giovanni Battista Montini avait déposé la tiare pontificale sur ??l'autel de la basilique Saint-Pierre, tout comme Jorge Bergoglio a renoncé à la croix pectorale en or.
François fait coïncider cette béatification, à laquelle Benoît XVI participera, avec la fin du synode sur la famille. Une manière d'honorer celui qui avait lancé l'institution de cette assemblée consultative des évêques et de rendre hommage à la créativité de "l'esprit du Concile".
Jean Paul II et Benoît XVI, tout en défendant vigoureusement Vatican II, avaient tenté de contrer certaines dérives libérales et de raccrocher la barque de l'Eglise à la tradition.
François cite souvent Paul VI, un pape à l'allure frêle qui a été comme lui promoteur d'un dialogue sincère avec le monde "comme il est".
- 1968 et la crise de l'Eglise -
Jorge Bergoglio avait entre 26 ans et 41 ans pendant le règne de Paul VI: il a été formaté par ce pontificat, en a suivi à Buenos Aires les débats et les conflits, comme celui en Amérique latine autour de la théologie de la Libération.
Il a aussi suivi les nombreux gestes prophétiques de Paul VI, comme sa rencontre en 1964 à Jérusalem avec le patriarche de Constantinople Athénagoras et son discours de 1965 devant les Nations unies: "Plus jamais la guerre".
Si Jean Paul II a remporté la palme des voyages intercontinentaux, c'est Paul VI qui avait lancé le mouvement. Des voyages de pèlerin, de l'Afrique à l'Asie, peu médiatisés.
Les dernières années de son pontificat ont cependant pris des allures de chemin de croix pour ce pape stoïque, à la santé fragile, mal compris, devenu impopulaire.
"On doute de tout aujourd'hui dans le monde de la pensée, et aussi de la religion. Il semble que l'esprit de l'homme moderne ne trouve le repos que dans la négation totale, dans l'abandon de toute certitude, de toute foi, comme celui qui, ayant les yeux malades, n'a de repos que dans l'obscurité", disait-il sombrement dans une homélie en 1967.
Son pontificat s'est achevé sur les "années de plomb" en Italie, avec l'enlèvement et l'assassinat par les Brigades Rouges de son ami Aldo Moro, président de la Démocratie Chrétienne, quelques mois avant sa mort.
La révolution sexuelle de Mai 1968, les innovations liturgiques, les évêques contestataires, le départ de milliers de prêtres et religieux, la rébellion des traditionalistes lefebvristes lui ont aussi montré à quel point l'Eglise post-conciliaire était en crise.
Et avec son encyclique Humanae Vitae de 1968, qui se prononce contre la contraception, "la papauté et l'enseignement de l'Eglise sur la sexualité ont perdu jusqu'à aujourd'hui leur crédibilité", affirme le mouvement contestataire "Nous sommes l'Eglise". Paul VI a longtemps souffert de cette réputation d'homme contre son temps, lui qui avait essayé d'être à son écoute.
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