La justice a rejeté jeudi la demande de remise en liberté de l'anesthésiste belge Helga Wauters, placée en détention provisoire après le décès d'une patiente à la maternité d'Orthez (Pyrénées-Atlantiques) fin septembre et qui a admis avoir bu le soir du drame.
Helga Wauters, 45 ans, qui n'était pas présente lorsque la décision a été rendue par la chambre de l?instruction de la Cour d'appel de Pau, a été mise en examen pour "homicide involontaire aggravé", passible de cinq ans d'emprisonnement. Elle avait été placée en détention provisoire le 2 octobre à la maison d'arrêt de Pau.
"C'est un soulagement de la savoir en détention, une décision normale dans la mesure où il fallait protéger d'autres victimes" potentielles "et la protéger d'elle-même", a estimé Me Philippe Courtois, avocat de la mère, du père et de la soeur de la victime d'origine britannique.
"J'aurais eu du mal à comprendre qu'elle soit remise en liberté conditionnelle", a indiqué pour sa part Me Alexandrine Barnaba, avocate du mari de la victime et du père de ce dernier.
Lors de ses différentes auditions, Helga Wauters a reconnu "avoir bu" le soir des faits: "une demi-bouteille d'un mélange de vodka et d'eau de 50 cl" car il lui "faut de la vodka pour ne pas trembler". "Je n'étais pas ivre, j'étais à 70% de mes capacités", avait-elle affirmé, expliquant avoir consommé sa dose quotidienne habituelle le 26 septembre à 18H00, quelques heures seulement avant l'accident.
Ce soir-là, elle a la charge d'une parturiente de 28 ans vivant à Ustaritz (Pyrénées-Atlantiques) mais souhaitant accoucher à Orthez, à 85 km de son domicile, par des méthodes naturelles. La parturiente a cependant besoin d'une péridurale qu'Helga Wauters lui prodigue avant de sortir boire "un verre de rosé" chez des amis.
Mais l'accouchement se passe mal et une césarienne devient nécessaire. L'équipe médicale appelle au téléphone l'anesthésiste, qui arrive à pied et sent l'alcool. Alors qu'elle prépare l'anesthésie générale de la patiente, son comportement et son élocution paraissent étranges à ses collègues. "J'étais dans un état second, débordée, ma perception était certainement modifiée", avouera Helga Wauters.
- Douleur intense -
La situation tourne vite au drame: au lieu de se servir du respirateur du bloc opératoire, l'anesthésiste utilise à la place un ballon manuel pour ventiler sa patiente, elle intube les voies digestives au lieu des voies respiratoires.
Selon les témoignages cités par la Cour, l'obstétricien qui a la responsabilité de l'accouchement demande alors l'intervention d'un autre anesthésiste, mais aucun remplaçant n'est disponible.
Prévenu, le Samu découvrira à son arrivée "une patiente en arrêt cardiaque, cyanosée, et des personnes sur place qui restent inactives". Les secours la raniment et la transfèrent en urgence à l'Hôpital de Pau, où elle décède le 30 septembre. Son bébé est sain et sauf.
Convoquée au lendemain du décès, l'anesthésiste s'était présentée devant les gendarmes avec un taux d'alcoolémie de 2,4 g/l. A son domicile, les enquêteurs retrouveront 17 bouteilles de vodka vides.
"La douleur de mon client est toujours intense", a indiqué Me Barnaba mais "il n'est pas dans un esprit de vengeance". "Nous sommes au début d'une longue procédure, les investigations seront très longues, la remise en liberté aurait été prématurée", a souligné l'avocate.
La justice s'est en effet saisie de quatorze dossiers de personnes décédées récemment dans la clinique privée d'Orthez - voisine de la maternité publique et par laquelle l'anesthésiste belge était employée depuis la mi-septembre - pour s'assurer qu'aucune faute n'a été commise.
Anesthésiste depuis 1994, Helga Wauters avait été récemment recrutée par la clinique privée d'Orthez où elle exerçait, à titre libéral. Elle n'était pas membre du personnel de l'hôpital mais, en vertu d'une convention signée entre la clinique, l'hôpital public et l'Agence régionale de santé (ARS), elle intervenait le soir de l'accident pour le compte de l'hôpital.
A l'issue d'une procédure engagée bien avant le drame, l'ARS d'Aquitaine, dont le siège est à Bordeaux, devrait se prononcer prochainement sur la fermeture définitive de la maternité d'Orthez, en butte à des difficultés chroniques de recrutements d'obstétriciens.
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