Le projet de budget 2015, sous la menace d'un rejet par la Commission européenne, va entamer mardi son marathon à l'Assemblée nationale, où les fractures à gauche risquent de ressurgir autour de la rigueur tandis que la droite va dénoncer un gouvernement défaillant.
Construit sur l'hypothèse d'une croissance de 1%, le troisième budget du quinquennat Hollande prévoit une baisse d'impôts, des économies massives et un déficit public en légère baisse à 4,3% du Produit intérieur brut, loin des engagements successifs du gouvernement devant la Commission européenne.
La France, qui va devoir demander pour la troisième fois un délai pour revenir dans les clous du Pacte de stabilité européen et aux 3% de déficit, a "pris ses responsabilités" devant une croissance atone pour ne pas conduire la 2ème économie de la zone euro en récession, martèle le ministre des Finances Michel Sapin.
Alors que la popularité du président de la République reste des plus basses, le souci de ne pas raviver un "ras-le-bol fiscal" a aussi pesé dans la décision de supprimer la première tranche d'impôt sur le revenu, qui doit bénéficier à environ 6 millions de contribuables pour un montant de 3,2 milliards d'euros. La hausse de deux centimes par litre de la taxe sur le diesel et l'augmentation de la redevance audiovisuelle brouillent cependant la promesse de ne plus augmenter les impôts.
Le chef du gouvernement Manuel Valls a affirmé devant les députés que le projet de budget était celui "qu'il faut à la France", qu'il ne pouvait pas être rejeté par la Commission européenne et qu'il était du seul ressort du Parlement français.
Pas convaincu, l'ancien Premier ministre UMP François Fillon a dénoncé un budget "pas sincère, qui tourne le dos à tous les engagements de la France en matière de réduction des déficits".
Outre "la crédibilité" du pays, ce budget pénalisera "les classes moyennes car la suppression de la première tranche d'impôt va se répercuter sur elles", mais aussi les collectivités territoriales, selon le chef de file des députés UMP Christian Jacob.
Face aux critiques, l'exécutif oppose son effort "jamais fait" jusqu'ici pour réduire la progression des dépenses, qui mettra à contribution tant l'Etat que les collectivités territoriales.
La droite reproche l'absence de "vraies économies", qui passeraient à ses yeux par des réformes structurelles, sur les retraites par exemple. Ainsi le président UMP de la commission des Finances, Gilles Carrez, a critiqué "un budget d'impuissance, dans lequel tous les efforts se traduisent par une réduction des investissements".
- Critiques à gauche -
Et une partie de la gauche, critique envers un soutien jugé excessif aux entreprises aux dépens des ménages, continue à réclamer une inflexion de la politique économique.
Le Front de Gauche dénonce la poursuite de "l'austérité", terme récusé par le gouvernement. "Ce budget ne correspond pas à ce pour quoi les gens ont voté pour François Hollande en 2012", s'est indignée l'ex-ministre écologiste Cécile Duflot, qui ne le votera pas.
Dans les rangs socialistes, les frondeurs sont sur une ligne proche: Jean-Marc Germain a récemment affirmé qu'"en l'état" il ne voterait pas un projet de loi proposant l'inverse de plusieurs propositions de campagne de François Hollande. Et des ministres de retour au Parlement comme Aurélie Filippetti ou Benoît Hamon sont également critiques.
Un parlementaire proche de Manuel Valls estime néanmoins que "les budgets vont passer sans coup férir" et que "les frondeurs ont touché aux limites de l'exercice". Idem pour un ministre, convaincu que les frondeurs "vont continuer mais ont perdu la bataille de l'élargissement de leur base avec le vote de confiance" et qu'"il n'y aura pas de problème de budget".
La coupe des dotations aux collectivités territoriales (à hauteur de 3,7 milliards d'euros) pourrait cependant fâcher au-delà des seuls frondeurs. La rapporteure générale du Budget, Valérie Rabault, cherche ainsi avec d'autres socialistes une voie pour préserver cet investissement public.
Si la pilule du budget est vraiment trop dure à avaler à gauche, reste l'arme constitutionnelle du 49-3, qui permet de faire passer un texte sans vote à moins d'une motion de censure. Mais "ce serait le constat pour la première fois qu'il n'y a pas la majorité", souligne un ministre.
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