"Touche pas à l'Alsace!": 7.000 personnes selon la police, jusqu'à 20.000 selon les organisateurs, ont manifesté samedi à Strasbourg dans une forêt de drapeaux régionaux rouge et blanc pour exprimer leur rejet de la fusion avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne.
Le rassemblement sous un beau soleil, confiné sur une grande place au nord de la ville, faisait figure de test grandeur nature pour la droite locale, UMP en tête, à l'origine de la manifestation avec les chambres consulaires régionales.
La participation a atteint 7.000 personnes maximum au plus fort de l'affluence vers 16H00, selon la police. Révisant à la baisse une estimation trop optimiste de 30.000 personnes, le président de la région Philippe Richert (UMP)s'est lui réjoui d'une fréquentation "entre 10.000 et 20.000 personnes", soit au-delà de son objectif d'en réunir 10.000.
Sur une grande scène installée pour l'occasion se sont enchaînés des concerts de groupes locaux aux noms évocateurs, comme les "Bredelers", les "Kansas of Elsass" ou encore "Mister Bretzel", certains chantant en alsacien. Dégustations de pommes et de bretzels étaient également au menu.
Plusieurs élus ont ensuite pris la parole: "L'Alsace veut participer à son avenir et non se le voir imposé", a dit notamment Philippe Richert, le président (UMP).
Le maire de Mulhouse Jean Rottner (UMP), dont une pétition en ligne contre la fusion avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne a récolté quelque 55.000 signatures depuis cet été, a dénoncé pour sa part une "réforme du mépris" et regretté que le gouvernement "n'ouvre pas la porte du dialogue".
-'Fière de mes racines'-
Le public, venu de toute la région, était conquis d'avance. "Touche pas à l'Alsace", pouvait-on lire sur une pancarte de plusieurs mètres de haut, figurant une Alsacienne en costume traditionnel à l'air furieuse et brandissant une fourche.
"Alsaciens oui! Moutons non!" ou encore "On ne mélange pas Riesling et Champagne", pouvait-on lire sur d'autres affiches.
"J'ai peur que l'Alsace se retrouve noyée, on ne sait pas à quelle sauce on va être mangés", explique Christian, un clerc d'huissier venu de la région de Mulhouse avec sa femme.
"Je suis venue pour dire que je suis fière de mes racines, que je ne veux pas qu'on touche à notre patrimoine", témoigne Stéphanie Schaeffer, une mère de famille souriante arborant la coiffe alsacienne typique, avec ses grandes oreilles noires, et un T-Shirt avec des cigognes, l'oiseau emblématique de la région.
On croisait aussi de nombreux élus locaux parmi les manifestants, maires de petites communes, adjoints ou conseillers municipaux.
"La solution n'est pas de former un ensemble grand comme la Belgique mais de donner beaucoup plus de compétences aux régions existantes" en prenant exemple sur des pays fédéraux comme la Suisse ou l'Allemagne, selon Olivier Brungard, adjoint au maire de Traubach-le-Haut, un village du Haut-Rhin.
Les trois collectivités alsaciennes ont ressuscité le 22 septembre le projet d'un "conseil unique" d'Alsace, pourtant rejeté lors d'un référendum régional en 2013 en raison notamment d'une trop faible participation au scrutin.
L'Alsace s'était résignée à l'idée de fusionner avec la Lorraine. Mais la proposition des députés le 23 juillet de rajouter la Champagne-Ardenne a incité la droite et le centre alsacien à s'opposer désormais à toute fusion.
De son côté la gauche alsacienne, qui continue de plaider pour une union avec la seule Lorraine, avait dénoncé une manifestation partisane et le risque d'alimenter le sentiment identitaire.
Car la manifestation était aussi soutenue par le FN, le mouvement d'extrême droite "Alsace d'abord" et le parti régionaliste "Unser Land" (Notre pays).
"Contrairement à d'autres régions, ce n'est pas dans la mentalité alsacienne de manifester, les Alsaciens sont très légitimistes" selon Jean-Georges Trouillet, porte-parole du mouvement Unser Land. "Quand ils manifestent, c'est que c'est sérieux".
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