Rouen, rue Verte, lundi 10 mars au matin. Une quarantaine de personnes, des hommes surtout, sont amassées dans les locaux de l’ancien garage Peugeot. Au milieu d’eux, Me Christian Denesle, commissaire-priseur, donne de la voix. Tout va très vite. Les enchères s’enchaînent devant le matériel qui a survécu à la liquidation de l’entreprise. Ce genre d’enchères, appelées ventes judiciaires, Me Denesle en a fait sa spécialité. Le tribunal de commerce de Rouen lui en confie une centaine par an. “Avec la crise, elles ont connu une augmentation, mais pas d’explosion non plus”, note celui qui est installé à l’Hôtel des ventes des Carmes, à Rouen. Selon lui, ces derniers temps, c’est surtout le petit commerce qui paye les pots cassés, “les restaurants, les cafés, tabacs ou boutiques d’habillement”. Mais on retrouve également des PME, voire des entreprises plus grandes encore, à l’image du groupe Huis Clos, basé à Mont-Saint-Aignan et liquidé en octobre dernier, dont les actifs mobiliers feront très prochainement l’objet de ventes judiciaires.
Ventes et souffrance
“Humainement, c’est très enrichissant. Nous, commissaires-priseurs, sommes face à des gens qui souffrent, mais notre rôle est de les aider, de récupérer le maximum d’argent pour éponger les dettes”, analyse Christian Denesle. Du côté de Me Guillaume Cheroyan (Hôtel des ventes de la Seine), dont les ventes judiciaires (qui comprennent également le civil : tutelles, successions sans héritier...) représentent 30 % de son activité, la crise n’explique pas tout, “même si ces ventes augmentent depuis 2009”. Pour lui, “beaucoup de petits commerçants se lancent mal préparés. Lors des ventes, c’est un crève-cœur pour eux. Je leur conseille rarement d’y assister”. “Ce ne sont pas toujours des mauvais bosseurs, tempère Christian Denesle. Souvent, ils subissent avant tout des loyers trop élevés”.
Dans le détail, le travail du commissaire-priseur ne se limite pas à organiser les enchères publiques post-liquidation. Il est d’abord “chargé d’inventaire”, nommé par le tribunal de commerce, envers les entreprises en dépôt de bilan. Si celles-ci se retrouvent liquidées par la justice, le commissaire-priseur réalise ensuite les actifs. C’est-à-dire qu’il tentera de revendre au meilleur prix le matériel de l’entreprise défunte, afin de rembourser les créanciers. Cela peut prendre la forme d’une vente judicaire, publique, la plupart du temps dans les locaux de la société liquidée, ou alors une vente amiable. “Cette décision est toujours motivée par l’intérêt du débiteur (l’ex-gérant)”, note Me Desnesle. C’est le liquidateur, au tribunal de commerce, qui tranchera selon un seul critère : récupérer le plus d’argent.
Si la vente judicaire est ordonnée, le commissaire-priseur doit tout faire pour tenter d’en tirer au moins l’équivalent de l’estimation réalisée lors de l’inventaire. Mais contrairement à une vente d’art, il n’y a aucune garantie sur le matériel revendu. Tant pis, les professionnels du secteur, revendeurs ou particuliers bricoleurs sont nombreux, à l’affût de bonnes affaires.
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