Nous sommes à Rouen, en pleine tourmente des guerres de religion. L'année 1562, sombre et orageuse, voit les tensions entre catholiques et protestants atteindre leur paroxysme. Au cœur de ce chaos, François de Civille, un militaire d'une trempe peu commune, se trouve à la tête de cent hommes d'armes du parti calviniste (protestants, donc). Le gouverneur, le comte de Montgomery, lui confie une tâche périlleuse : protéger un secteur stratégique de la ville assiégée par les catholiques : la porte Saint-Hilaire et les fourches Bihorel.
Mais le destin, tel un cruel tourneur de manivelle, s'apprête à frapper. Alors qu'il se trouve sur le chemin de ronde, une balle d'arquebuse vient percuter son visage, le projetant par-delà les remparts.
Une (première) mort précoce
Son corps tombe lourdement des remparts et s'enfonce dans le fossé boueux. Ses camarades, croyant avoir perdu un ami, l'enterrent à la hâte comme il est commun en temps de guerre, le laissant à la misère des morts. C'est ici que commence la première résurrection de François de Civille. Son valet, Nicolas Delabarre, ne se résigne pas à laisser son maître ainsi, abandonné. Avec l'autorisation de Montgomery, il se lance dans une quête désespérée pour retrouver son corps.
Quand enfin il le déterre, surprise ! Le corps, bien que meurtri, présente encore des signes de vie. Les médecins du couvent de Sainte-Claire, cependant, déclarent que tout espoir est vain. Mais Nicolas Delabarre, obstiné, refuse de se rendre à ce diagnostic. Il fait transporter François de Civille à l'hôtel de Coqueréaumont, où il va être choyé par des praticiens. Pendant cinq jours, le militaire est plongé dans un état comateux, entre la vie et la mort.
Une nouvelle chute et un second enterrement
Cependant, le sort ne semble pas vouloir laisser en paix notre malheureux héros. Rouen est assiégée, et dans la foulée, les catholiques s'emparent de la ville. Cherchant Jean, le jeune frère de François de Civille, ils se vengent sur l'homme lui-même, le jetant par la fenêtre de son hôtel. Le destin, ironique, veut que sa chute soit amortie par un tas de fumier. Une fois de plus, il semble mort, cette fois caché sous un voile de débris.
Disparaissant ainsi aux yeux de tous, François de Civille reste là, engourdi, jusqu'à ce qu'une servante vienne à sa rencontre, découvrant son corps inanimé, mais encore vivant.
La résurrection et le retour à la vie
Il est alors transporté secrètement au château de Dieppedalle, où il reçoit les soins nécessaires pour guérir. Il parvient à recouvrer ses forces, prouvant que, malgré les circonstances les plus désespérées, la vie trouve toujours un chemin. De retour en Angleterre, François sert la reine Elisabeth I, avant de revenir en France, où il se joint au camp d'Henri IV.
Un homme à trois vies
En 1606, François de Civille publie un livret relatant son incroyable histoire. Agrippa d'Aubigné l'a décrit comme "trois fois mort, trois fois enterré, et trois fois par la grâce de Dieu ressuscité".
François de Civille. - Wiki commons
Si cette histoire, comme beaucoup d'autres, oscille entre mythe et légende, il n'en reste pas moins que le Rouennais a publié ses mémoires, et ce récit nous vient du concerné lui-même. D'autres personnalités de l'époque relatent une histoire plus ou moins similaire, semblant s'accorder à octroyer le statut de miraculé à cet homme trois fois ressuscité. Aujourd'hui, vous pouvez retrouver à Rouen une rue à son nom à proximité de l'emplacement de la porte Saint-Hilaire dans le quartier Croix de Pierre.
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