Visiter une prison sans s'être annoncé auparavant : c'est un pouvoir qu'ont les parlementaires et, depuis 2021, les avocats, à travers les bâtonniers et leurs délégués. Mardi 2 avril, la Conférence des bâtonniers de France a donc organisé des visites inopinées dans différents lieux de privation de liberté. Sur la zone havraise, les geôles du palais de justice, du commissariat central, du commissariat de Bolbec mais aussi le centre pénitentiaire de Saint-Aubin-Routot ont ainsi été visés.
"Cela permet de visiter de fond en comble ces lieux, sans préparation, sans nettoyage particulier, et d'avoir des échanges sans langue de bois avec les détenus et les agents pénitentiaires", détaille Me Romain Lemétais, avocat au barreau du Havre et délégué du bâtonnier aux contrôles des lieux de privation de liberté. Habituellement cantonné au parloir ou aux locaux de la commission de discipline ou du juge d'application des peines, il a cette fois pu découvrir les conditions de détention en détail, durant quatre heures.
Quarante détenus sur des matelas au sol
Le centre pénitentiaire accueille actuellement 774 détenus. A la maison d'arrêt, où sont emprisonnées les personnes en attente de jugement ou condamnées à des courtes peines, l'avocat a été confronté à la surpopulation carcérale. "Ils sont actuellement 343 détenus pour 209 places, soit une surpopulation de 164%. Les détenus sont régulièrement deux voire trois par cellule, et quarante d'entre eux dorment sur des matelas au sol, déplore Romain Lemétais. Cela paraît incompatible avec des conditions dignes de détention et assez rapidement, cela peut générer des conflits, voire de la violence." Le quartier disciplinaire est d'ailleurs "plein en permanence". Une situation complexe pour les détenus mais aussi le personnel pénitentiaire, qui est en sous-effectif, souligne l'avocat (172 agents pour 185 postes).
Me Romain Lemétais
"L'odeur d'urine est insoutenable"
Au commissariat de Bolbec, il déplore par ailleurs l'étroitesse des cellules pour les gardés à vue. "Il y en a une qui fait moins de 5m2. L'odeur d'urine y est insoutenable, et il n'est pas rare que les policiers soient contraints de mettre deux personnes par cellule avec, là aussi, un matelas au sol." Si des kits d'hygiène doivent en principe être distribués aux gardés à vue, ce n'est pas toujours le cas. "Les personnes peuvent passer 24, 48, 72 voire 96 heures sans avoir le moindre accès au minimum d'hygiène quotidienne."
Me Romain Lemétais
Chaque lieu visité fera l'objet d'un rapport détaillé. "Il pourra servir de support pour les détenus ou leur conseil pour formuler des recours contre leurs conditions de détention, et sensibiliser les pouvoirs publics pour envisager, peut-être, des alternatives à la détention."
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