Plus de quatre ans après l'incendie de Lubrizol, le 26 septembre 2019, les eaux souterraines du site semblent encore contaminées. C'est ce que révèlent en tout cas plusieurs analyses, rendues publiques dernièrement par l'Union des victimes de Lubrizol. Effectuées en 2022 et 2023, elles mettent en évidence notamment la présence d'hydrocarbures et de substances perfluorées, appelées aussi PFAS, en grande quantité et parfois au-dessus de la norme. "On retrouve des HAP, hydrocarbures aromatiques polycycliques, ce sont des molécules qui sont créées lors de la combustion d'énergie fossile, on retrouve aussi des métaux lourds, cuivre, cobalt ou arsenic, et également des PFAS", précise Matthieu Fournier, co-coordinateur du projet Cop Herl qui a eu accès aux résultats.
La somme des hydrocarbures multipliée par 19 en trois ans
Installés aux abords du site, deux des cinq piézomètres, qui mesurent la pression des liquides, enregistrent ainsi des dépassements de seuils : le Pz32 et le Pz28, soit celui qui se trouve le plus en aval de la zone sinistrée et celui se trouvant près de la zone, dont les terres polluées n'ont pas été excavées. Sur ce dernier, les relevés montrent, par exemple, que la somme des HAP a été multipliée par 19 en l'espace de trois ans. La norme impose ainsi qu'une eau potable ne doit pas présenter plus d'un microgramme par litre pour la somme totale des HAP, "ce qui est largement dépassé sur certains piézomètres et à certaines périodes", poursuit le spécialiste. Les prélèvements révélés montrent aussi la forte présence de PFAS, ces substances perfluorées dont les normes, précisées par une directive européenne, ne sont pas encore traduites dans le droit français.
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"Il est très vraisemblable que les hydrocarbures proviennent de l'incendie du bâtiment et des huiles qui ont brûlé", précise Matthieu Fournier. Concernant les métaux lourds, il n'est pas à exclure, selon le spécialiste, que cette présence soit liée au précédent incendie de l'entreprise Onduline dans les années 90. "Pour les PFAS, là, clairement, ce sont les produits utilisés par les pompiers pour étouffer le feu, qui en sont l'origine."
Toutes ces substances sont potentiellement cancérogènes mais, pour l'heure, ces eaux "contaminées" ne sont pas destinées à la consommation humaine. Pour autant, leur décontamination pourrait prendre plusieurs années. "Plusieurs dizaines d'années" même, si aucune dépollution n'est engagée, d'après Matthieu Fournier. "On va avoir une dégradation plus ou moins lente, selon le type de molécule, au cours du temps, ainsi qu'une exportation de cette pollution vers la Seine qui va la diluer, d'autres eaux souterraines non contaminées vont aussi diluer la contamination actuelle."
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Pas de problème sanitaire
Selon Mathieu Fournier, cette pollution ne présente pas de danger pour l'heure. "Il n'y a pas de problème dans le sens où il n'y a pas d'usage. Personne ne boira cette eau-là et elle n'ira nulle part ailleurs que dans la Seine, et on ne produit pas d'eau potable à partir d'eau de Seine."
Ces nouvelles analyses devraient être transmises au juge d'instruction pour qu'elles soient ajoutées au dossier dans le cadre de l'enquête autour de l'incendie de Lubrizol en 2019. Contactée la préfecture, devrait communiquer sur ce sujet prochainement.
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