L'histoire d'Agnès Des Ligneris semble d'abord celle d'une vocation artistique un temps contrariée. Passionnée de botanique, cette native de Meudon (Hauts-de-Seine) finit ses études avec un diplôme d'ingénieur en agriculture. "À l'époque, on en parlait moins, mais j'étais déjà très préoccupée par l'eau et l'environnement. Mon premier travail était la mise en place du tri des déchets dans la communauté de communes d'Yvetot." Changement de vie en 2002, avec un départ à la suite de la mutation de son mari pour le Guatemala.
Le premier amour d'Agnès : la photo
Sur place, cette mère de trois enfants donne des cours de français et s'initie de son côté à la photo et au dessin. "J'ai toujours été très attirée par le milieu artistique, confie-t-elle. De fil en aiguille, j'ai commencé à travailler comme photographe pour un quotidien local." Au retour de la famille en France en 2006, Agnès Des Ligneris a besoin de changement. "J'ai décidé de m'inscrire à l'École nationale supérieure de la photographie d'Arles (Bouches-du-Rhône). C'était un rêve qui se réalisait !"
Mais la photographie n'est qu'un début. En 2009, Agnès Des Ligneris voit sa vie prendre un nouveau tournant. "À la fin de mon cursus à Arles, une artiste franco-britannique cherchait une photographe de plateau pour documenter son travail sur un court-métrage. C'est là que j'ai découvert le monde du tournage." Une révélation. "Ça m'a énormément plu, car c'est un travail collectif sur un même projet." À son retour en Normandie, elle s'installe à Port-Jérôme, bien décidée à poursuivre dans cette voie. Elle franchit un nouveau pas, en décrochant un remplacement inopiné pour le casting des figurants de la série de France 2 Deux Flics sur les Docks. "J'ai été formée sur le tas et ça s'est bien passé. Pour les tournages suivants, ils m'ont rappelée", sourit-elle.
Agnès Des Ligneris prend du galon. Elle caste aussi désormais des acteurs locaux pour des seconds rôles. Elle effectue le même travail, notamment sur les épisodes de la série de Trois Meurtres à… qui prennent place dans la région. La professionnelle du cinéma est également "repéreuse". "À la lecture du scénario, on doit trouver le lieu de tournage idéal qui correspond aussi bien au niveau du décor voulu que sur le plan technique."
Dernier projet en date pour notre directrice de casting, installée au Havre depuis huit ans : le film Marie-Line et son juge, tourné l'an dernier dans la cité Océane, et qui sort en salles ce mois-ci (voir par ailleurs). En plus de son boulot en amont, Agnès Des Ligneris était largement présente aux côtés des figurants sur le plateau. "Au-delà de dix personnes, on s'occupe de planifier la présence de chacun, on vérifie que tout le monde est là, avec aussi une part de travail administratif."
"Un tournage est un lieu d'échanges et de rencontres"
Agnès De Ligneris rayonne quand elle parle de son métier. "J'aime être sur un plateau, car c'est un endroit de rencontres. De nombreux métiers y sont représentés. Il y a des vies qui s'y racontent. Des numéros de téléphone échangés. C'est un lieu profondément humain." Entre déformation professionnelle et volonté de partage, elle conclut : "Je conseille vraiment à chacun de tenter l'expérience de la figuration au moins une fois dans sa vie, pour voir l'envers du décor d'un tournage."
Marie-Line et son juge, tourné au Havre, au cinéma le 11 octobre
Le film de Jean-Pierre Améris arrive au cinéma.
Une rencontre improbable entre deux personnages qui évoluent dans deux mondes différents peut changer la vie de chacun. Louane incarne Marie-Line, serveuse issue d'un milieu modeste. Michel Blanc, lui, est un juge bougon et déprimé, mais d'une humanité d'abord bien cachée. Le genre de rôle qui lui va comme un gant. Pour sortir la jeune femme aux cheveux rose bonbon d'une mauvaise passe financière, il l'engage comme chauffeur.
Le Havre, où les destins peuvent changer
Le film est une adaptation du roman de Murielle Magellan Changer le sens des rivières, dont l'intrigue se déroule dans la cité Océane. Le réalisateur, Jean-Pierre Améris, a conservé ce décor. Pour lui, "Le Havre est une ville vivante, passionnante à filmer. Elle apporte quelque chose au sujet : cette idée positive que l'on peut changer son destin".
"Je cherchais des gens tout nus" : un étonnant souvenir de casting
Agnès Des Ligneris coordonne des castings locaux.
Il y a des missions plus compliquées que d'autres. Agnès Des Ligneris se souvient avec amusement d'un épisode plutôt cocasse, lorsqu'elle était directrice de casting débutante. "Je devais trouver des figurants capables de courir tout nus autour d'une piscine. Je crois que c'était pour Deux Flics sur les Docks. J'ai d'abord visé les clubs échangistes, mais on m'a répondu que les gens dans ce genre d'endroits préféraient être anonymes. Alors je suis allée dans les salles de sport, où les abonnés sont en général assez fiers de leur corps. J'ai trouvé quelques personnes par ce biais-là. Également via des modèles qui ont l'habitude de poser nus pour des cours de dessin." Et la professionnelle de l'image de replacer les choses dans leur contexte : "Ce n'est pas évident quand même. Car, sur le plateau, vous avez une équipe de quarante personnes. Finalement, tout s'est bien passé. C'était extra !"
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