"C'est surréaliste de se retrouver dans un pays paisible après six semaines en zone de guerre…" Rentré au Havre la semaine dernière, après avoir passé son été sur les routes d'Ukraine comme bénévole humanitaire, Johan du Toit a les traits tirés, mais surtout "l'envie de continuer". Le regard est lointain, perdu dans la poussière et la chaleur du bitume. Les sons qu'il retient ? "Les sirènes d'alerte dans les grandes villes et les tirs d'artillerie touchant le front, au sud, dans la région de Kherson et d'Odessa." Johan détaille : "À Kherson [libérée fin 2022, NDLR], ce qui m'a frappé, c'est le silence des rues désertées et ce bruit continu de bombardements. C'est la réalité de la vie des habitants là-bas."
Au total, 20 000 kilomètres
parcourus
Entre le 8 juillet et le 23 août, ce Havrais d'origine sud-africaine, qui a l'Ukraine dans la peau depuis son adolescence d'expatrié passée à Kiev, a effectué trois missions de convois humanitaires pour l'Ukraine, destination Odessa et Kherson. Il a fait route par l'Allemagne, la Pologne, puis via Lviv, Kiev, Mykolaïv… "J'ai roulé près de 20 000 kilomètres au total", calcule-t-il. Dans les camions : du matériel médical à destination d'organisations et d'hôpitaux, collecté via des associations normandes. Avec le soutien financier du Rotary Club, Johan a conduit à Odessa une première camionnette de donations du Medico Lions Clubs de France ainsi que des produits d'hygiène et vêtements collectés par l'établissement scolaire Saint-Joseph du Havre, où il travaille comme responsable de la solidarité à l'aumônerie. Du 18 au 23 juillet, il a repris la route depuis Le Havre avec trois autres bénévoles, au volant de deux camions de transport Viard affrétés par Les convois d'Irina, association basée à Maromme. "Aiguilles, gants, pansements, médicaments, béquilles, instruments de chirurgie ou brosses à dents pour patients intubés…", énumère Johan. Cette nouvelle cargaison du Medico Lions Clubs sera redistribuée à partir de Lviv, dont une partie par Johan à Odessa. Nourriture et jouets pour les enfants sont du voyage : "Les jeux, cela reste important car on a des millions de gens déplacés à l'intérieur du pays qui ont tout perdu." Il se rendra ensuite dans la région de Kherson avec 2 B 1, "une association ukrainienne de soutien aux familles en zones de guerre".
"Ne rien faire, c'est laisser
la place à la guerre."
Proches de la Crimée et du front sud séparant les positions ukrainiennes et russes, protégés de gilets pare-balles, Johan et ses partenaires ont porté des denrées alimentaires dans le village de Komyshany, "pour 160 familles". Il raconte : "Le 18 août, lors de nos livraisons (2 tonnes d'aide humanitaire) dans cette zone qui comprend l'hôpital Vodnikov de Kherson, nous avons entendu 15 à 20 explosions autour nous." "Alors que le conflit tend à l'escalade, le besoin humanitaire et logistique est énorme, observe-t-il, sans compter les animaux abandonnés. Sur place vivent des personnes âgées, des familles qui n'ont pas eu le choix de rester, des soldats du front, des acteurs associatifs… Ils sont d'abord préoccupés par les plus vulnérables et sont très reconnaissants. Leur générosité malgré la guerre m'a touché." Il poursuit : "J'ai constaté des problèmes de peau et d'eczéma causés par le stress et par des conditions d'hygiène détériorées depuis la destruction du barrage hydro-électrique de Kakhovka."
À l'heure de la rentrée, Johan du Toit signale des besoins en fournitures scolaires "ou en tablettes numériques pour les élèves en distanciel". "On voit que la vie continue, décrit-il. Les Ukrainiens sont résilients : il y a des commerces, des déplacés ont pu rentrer chez eux… Mais les besoins sont immenses. Nous ne pouvons pas rester inactifs face à la souffrance de nos voisins. Ne rien faire, c'est laisser la place à la guerre. Cette aide humanitaire est le signe de notre soutien."
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.