Trois détenus radicalisés, acquis aux thèses de l'organisation Etat islamique, seront jugés devant la cour d'assises spéciale de Paris pour l'attaque de deux surveillants de la prison de Condé-sur-Sarthe en mars 2019.
Michaël Chiolo, 32 ans, est renvoyé pour tentative d'assassinat sur personnes dépositaires de l'autorité publique en relation avec une entreprise terroriste et Abdelaziz Fahd, 37 ans, pour complicité, selon l'ordonnance de mise en accusation signée vendredi 21 juillet par deux magistrats instructeurs antiterroristes parisiens et consultée par l'AFP. Le troisième détenu, Nabil Ganned, 33 ans, sera jugé pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.
Deux surveillants grièvement blessés
"Ce procès permettra à M. Chiolo de s'expliquer sur un acte qu'il a toujours revendiqué", ont réagi ses avocats, Mes Romain Ruiz et Bruno Gendrin. Le 5 mars 2019 à 9 h 20, Michaël Chiolo, qui purgeait une peine de trente ans de réclusion pour un crime de droit commun, et sa compagne Hanane Aboulhana, qui lui rendait visite, avaient grièvement blessé deux surveillants avec deux couteaux en céramique dans l'enceinte du centre pénitentiaire ultra-sécurisé de Condé-sur-Sarthe. Le couple s'était ensuite retranché pendant près de dix heures dans l'unité de vie familiale (UVF) de l'établissement.
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Après plusieurs tentatives de négociation, les forces d'élite de la police avaient lancé l'assaut, blessant l'assaillant et tuant Hanane Aboulhana, 34 ans.
"L'ambition du projet était d'une ampleur plus importante"
Hospitalisé en raison de ses blessures, Michaël Chiolo, qui s'était radicalisé en prison, avait été mis en examen puis de nouveau incarcéré. Lors de l'attaque, il avait affirmé vouloir "venger" Chérif Chekatt, l'auteur de l'attaque jihadiste du marché de Noël de Strasbourg, abattu le 13 décembre 2018 par les forces de l'ordre après avoir tué cinq personnes.
Lors de ses interrogatoires, Michaël Chiolo a reconnu "le déroulé des faits ainsi que sa préparation et l'intention d'attenter à la vie des surveillants", selon l'ordonnance. Il a également avoué que "l'ambition du projet était d'une ampleur plus importante et qu'il le mûrissait depuis longtemps", tout en mettant hors de cause les autres détenus.
Trois non-lieux
Les investigations ont révélé que le projet d'attaque ciblait également le directeur de la prison et des membres de la commission de l'application des peines. Pour ces faits, les juges ordonnent que MM. Fahd et Chiolo soient jugés pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.
Abdelaziz Fahd, lui, a utilisé "l'influence qu'il pouvait avoir sur M. Chiolo" et "sa personnalité dominante" pour orienter le projet de M. Chiolo, qui avait des velléités de passages à l'acte en détention, en lui prodiguant des conseils et en "l'incitant sur le choix des cibles et le mode opératoire", estiment les magistrats.
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Abdelaziz Fahd a contesté au cours de ses interrogatoires toute participation à cet "acte fou". Contactée par l'AFP, son avocate n'était pas joignable dans l'immédiat.
Les enquêteurs ont obtenu de nombreux éléments grâce à la sonorisation de la salle de convivialité de l'aile occupée par les détenus radicalisés, où s'était progressivement installé un "jihadisme d'atmosphère". Deux autres détenus bénéficient en revanche d'un non-lieu. Ils étaient pourtant considérés par le parquet national antiterroriste (Pnat) comme membres du "groupe conspiratif radicalisé très uni", surnommé en détention "le club des cinq", qui avait planifié cette action violente.
Le Pnat avait requis le 10 juillet que ces deux détenus soient jugés pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. Mais les juges d'instruction ont estimé que "leur proximité avec des détenus impliqués et (leur) adhésion à l'idéologie d'un islam radical légitimant le recours à la violence ne suffit pas pour justifier (leur) mise en accusation".
"C'est un soulagement immense" et "la conclusion d'un très long combat de quatre années durant lesquelles mon client a toujours affirmé qu'il n'était pas au courant du projet d'attentat", s'est réjoui l'avocat de l'un d'eux, Me Martin Mechin.
Une ex-épouse religieuse d'Abdelaziz Fahd, initialement mise en examen notamment pour complicité, bénéficie elle aussi d'un non-lieu, comme l'avait requis le Pnat. Cette attaque avait entraîné le blocage d'établissements pénitentiaires en France plusieurs jours consécutifs et conduit la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP) à renforcer notamment les mesures de sécurité à Condé-sur-Sarthe.
Avec AFP
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