Elle est partie il y a deux ans presque jour pour jour, laissant derrière elle toute une série de questions. On l'a appelé la "Dame de fer", avec une voix un peu pincée, toujours apprêtée, parfaite manipulatrice selon les enquêteurs qui l'ont interrogée à de nombreuses reprises avant sa condamnation, en 1994, à 15 ans de réclusion criminelle. Elle avait été reconnue coupable en cour d'assises de "complicité d'assassinat" sur la personne de son gendre, Jacques Perrot, un avocat parisien marié à Darie Boutboul, "cravache d'or", la première femme jockey à avoir gagné un tiercé.
Marie-Elisabeth Cons-Boutboul, la mère de Darie et belle-mère de Jacques Perrot, est une femme de caractère. Elle est au centre de cette histoire vieille de bientôt quarante ans, dont le déroulé, au terme de neuf années de procédure, est resté une énigme. Et cette énigme passe par la Normandie…
Les mensonges de l'affabulatrice
Un temps incarcérée à Rouen, à la prison Bonne Nouvelle, avant de purger sa peine à Fleury-Mérogis, Marie-Elisabeth Cons-Boutboul est décédée le 15 avril 2021. Elle avait 96 ans, vivait retirée, dans la région de Blois. Elle a toujours nié avoir été pour quoi que ce soit dans la mort de son gendre, abattu dans l'escalier de son immeuble du XVIe arrondissement parisien le 27 décembre 1985.
Jacques Perrot était à l'époque en conflit avec son épouse, dont il se séparait. Le couple se disputait la garde de leur enfant, Adrien, 4 ans au moment des faits. L'avocat parisien, ami d'enfance de Laurent Fabius, habitué des champs de courses et réputé don juan, avait rendez-vous avec sa belle-mère, le soir du crime. Voulait-il la faire chanter sur de possibles malversations financières dont elle se serait rendue coupable et dont il aurait eu connaissance ? C'est l'une des hypothèses parmi les plus plausibles avancées dans le dossier. Elle aurait pu commanditer le crime. Le gendre assassiné avait aussi découvert que sa belle-mère, elle-même avocate, avait été radiée de l'ordre pour des faits de corruption et de détournements de fonds. On la soupçonnait de malversations à l'égard des Missions étrangères de Paris, une société catholique ayant pour but l'évangélisation de pays non chrétiens. Même condamnée voilà trente ans pour complicité, l'intéressée n'a jamais craqué. Elle avait même brouillé les pistes, s'inventant un mari décédé qui ne l'était pas et un frère disparu qui n'avait jamais existé !
Le soir du rendez-vous prétendu avec son gendre, Marie-Elisabeth Cons-Boutboul s'était décommandée au dernier moment, prétextant devoir se rendre en urgence au chevet de son frère, victime d'un infarctus. Or, elle n'avait pas de frère ! Jacques Perrot, en sortant de son bureau, fut pris au piège, abattu de trois balles 22 long rifle. Un pneu de sa voiture avait été crevé à l'aide d'un poinçon. Il n'y eut aucun témoin, pas la moindre trace à relever sur la scène du crime.
Un cadavre sur le port du Havre
relance l'affaire
L'affaire a rebondi quelques années plus tard, au Havre, lors de la découverte sur les quais de l'avant-port du cadavre d'un certain Bruno Dassac, abattu d'une balle de gros calibre. L'homme fréquentait le milieu des courses et connaissait la mère de Darie, qu'il aidait visiblement pour ses opérations d'évasions fiscales en Suisse.
On retrouva sur lui un petit carnet sur lequel figurait le numéro de téléphone d'une charcuterie parisienne. Dassac s'en servait pour appeler régulièrement Madame Boutboul, qui se savait écoutée par la police. Le téléphone de la charcuterie leur permettait d'échanger en toute discrétion. Sur le relevé de comptes de l'homme assassiné au Havre, on retrouva la trace d'un versement de 140 000 € effectué par la mère de Darie depuis la Suisse, quelques jours après la mort de son gendre.
L'argent du crime ?
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