[Dossier] Cherbourg. Face aux travaux, les commerçants font le dos rond

Déjà dix bougies ! Le centre commercial Les Eleis à Cherbourg a fêté ses dix ans samedi 13 mai, l'occasion de dresser un bilan du lieu depuis son arrivée quai de l'Entrepôt, juste à côté du port de pêche.

Un taux de vacance à 11 %

Fnac, Vib's, H&M, Kaporal, Sergent Major… Des grandes marques se font de plus en plus présentes et nombreuses. Au total, les Eleis comptent 39 enseignes. C'est aussi entre 350 et 400 emplois. "À l'époque, nous n'avions pas ouvert notre centre commercial dans la bonne période, nous étions alors à un taux de vacance [en mètres carrés et non en nombre d'enseignes] de 20 %, indique le directeur Stéphane Pinabel. Au bout de 10 ans, nous avons réussi à diviser par deux la vacance. Nous sommes satisfaits, nous sommes à un peu moins de 11 %. Ce fut lent, j'en conviens, mais nous avons traversé des périodes compliquées avec les Gilets jaunes, la Covid et aujourd'hui les conséquences de la guerre en Ukraine…"

Stéphane Pinabel ajoute que le centre fonctionne bien aussi en termes de croissance de visiteurs et de chiffre d'affaires pour les boutiques. "Nous sommes la destination shopping pour le Cotentin", précise-t-il. Membre de l'Union Cherbourg Commerces, les Eleis sont "en osmose" avec le centre-ville : "La passerelle crée cette continuité." De nouveaux projets sont dans les tuyaux. Lors des dix ans, des animations cabaret, un jeu et un gâteau à déguster étaient proposés.

"On n'a rien à envier à Cherbourg." Dans le magasin de chaussures pour enfants du centre de Valognes, Dodiboots, le constat de Leila Osmont, une cliente, est sans appel. Cette habitante d'une commune limitrophe trouve dans le centre-ville tout ce dont elle a besoin.

Ce n'est pas Delphine qui va la contredire. "Je viens de Cherbourg", assure cette cliente en entrant dans le magasin de mode féminine Nat'Boutique. Elle regrette qu'il n'y ait que des chaînes de magasins à Cherbourg, et pas de boutiques indépendantes. Par conséquent, elle fait le tour du Cotentin pour trouver des vêtements pour se démarquer, en passant par Valognes, Sainte-Mère-Église ou Portbail-sur-Mer.

Prendre le temps avec les clients

Côté commerçants, on se rend bien compte que de nombreux clients viennent de tout le Cotentin. "On trouve de tout, des commerces comme des soins médicaux", assure Virginie Scelles, de la boutique "Du Fil au tissus". "Le monde attire le monde", estime Cédric Houguet, du primeur "Au p'tit jardin". Il note que dans la ville, la tendance pour le commerce est meilleure qu'il y a quelques années. Les boutiques qui sont arrivées ont réussi leur implantation. Au point que trouver un bail commercial commence à être compliqué dans le petit Versailles normand. "Ça commence à être rempli", confirme le marchand de fruits.

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D'autres facteurs expliquent le succès valognais. "Ce sont des commerces où c'est facile de discuter", poursuit Virginie Scelles. "Le client recherche de plus en plus cela", développe-t-elle. Et ça marche. "On prend le temps avec nos clients. Si on ne s'en occupe pas, ils partent", estime de son côté Virginie Lejuez, de la boutique Masculin (ex Letenneur). Elle ajoute : "On a une grosse clientèle de Cherbourg, qui ne trouve plus rien, ni de conseils, ni de place là-bas." "La qualité, le conseil, tout cela est hyper important. Acheter mieux mais moins", renchérit Laetitia Jourdan, de Valentine Chaussure. Elle estime qu'il y a une vraie carte à jouer avec une consommation plus durable et locale avec le petit commerce.

Le centre-ville a été rénové il y a quelques années, même si tous les travaux ne sont pas encore terminés. "Ça a amélioré son image", certifie Yannick Cougnat, l'élu chargé de l'attractivité. Il pointe aussi que Valognes est bien reliée à Carentan, Saint-Vaast-la-Hougue, Barneville et Cherbourg. "On est une plaque tournante du commerce de proximité, sourit Nathalie Leblond, la présidente de l'association des commerçants. On a une zone de chalandise vraiment très importante."

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Des places de stationnement

Lee nerf de la guerre selon les commerçants, c'est le stationnement. Le parking de la place du château est gratuit, mais indisponible les jours de marché. Sinon, la ville est en zone bleue, avec une limitation à une heure et demie. Ce qui, au dire des commerçants, est amplement suffisant pour faire ses courses dans un centre-ville assez ramassé. "Il n'y a pas trop de contrôle en zone bleue le vendredi, jour de marché", révèle discrètement une collègue de Virginie Lejuez.

Des demandes

"On voit des rues avec des boutiques fermées depuis une bonne quinzaine d'années et qui aujourd'hui sont en train de rouvrir", constate Nathalie Leblond, agente immobilière et patronne de l'association des commerçants et artisans valognais. Elle ajoute : "On a encore des demandes de personnes qui veulent s'installer à Valognes." L'association compte 85 adhérents, commerçants ou artisans. Elle a signé un partenariat avec celle des commerçants cherbourgeois pour proposer aux entreprises locales d'acheter des chèques cadeaux. Une dizaine de commerces sont partenaires à Valognes et les acceptent. "C'est intéressant", estime Nathalie Leblond. Certains types de commerces sont encore absents en ville. "Il manque notamment de la téléphonie et de l'électroménager", énumère Nathalie Leblond.

La mairie en soutien

La mairie propose deux aides à l'installation : pour des travaux ou pour le loyer. Le dossier à remplir est très simple, assure l'élu en charge de l'attractivité, Yannick Couégnat. "On essaie d'avoir une bonne réactivité sur les demandes", affirme-t-il, et ce afin d'encourager les installations. Il poursuit : "On a mis au point un fichier avec les commerces et les services répertoriés." La mairie connaît le nombre de pas-de-porte disponibles, leur taille et le nom du propriétaire. Le résultat de cette politique est un taux d'occupation des commerces de 90 %.

Quelle est la situation économique
dans le centre-ville de Cherbourg ?

"La situation est compliquée en raison des travaux. Effectivement, il y a des pertes de chiffre d'affaires pour les commerces, on ne peut pas le cacher, mais il ne faut pas baisser les bras. Plus on sera solidaires, mieux ce sera. Le calendrier des travaux semble être respecté. Les relations avec la mairie restent bonnes. En râlant de façon constructive, il y a des avancées."

Comment faites-vous pour
faire face à ces travaux ?

"Les travaux sont là, il faut faire avec. Restez dans l'immobilisme, c'est le pire. On le savait dès le départ que ces travaux allaient avoir des conséquences. Les commerçants comprennent que ces travaux doivent se faire, que tout se fasse d'un coup, un peu moins. Nous avons demandé et obtenu l'arrêt des travaux en décembre pour les fêtes de fin d'année. Après, nous l'avons vu pendant les mobilisations contre la réforme des retraites, les manifestants réussissent à venir dans le centre-ville malgré les travaux. Donc c'est accessible."

Comment s'organisent la braderie de juillet et la Fête des Normands ?

"La braderie aura bien lieu les 21, 22 et 23 juillet et le paquebot Disney, où des milliers de personnes sont attendues, fera escale : nous sommes en train de réfléchir pour des animations en lien avec ce bateau. C'est un événement important car cela ramène du monde. Enfin, la Fête des Normands sera organisée place de Gaulle samedi 23 septembre. Pour le marché de Noël, c'est en discussion. Dans tous les cas, venez à Cherbourg."