C'est un procès pour une affaire insolite qui s'ouvrira le jeudi 27 avril au Havre. Trois anciennes dames de cantine de l'école Jean-Savigny à Goderville sont soupçonnées d'avoir volé des portions entières de nourriture destinées aux enfants pendant plusieurs mois.
Les trois femmes ont été interpellées lundi 13 septembre 2021 par les gendarmes à la sortie de l'école, à la suite d'une plainte déposée par le maire de Goderville. Prenant au sérieux des remontées de parents selon lesquelles leurs enfants ne mangeaient pas à leur faim, Frédéric Carlière avait mené une enquête en interne pendant plusieurs mois, allant jusqu'à prendre les réfrigérateurs en photo après le service.
"On a d'abord cru qu'il s'agissait de problèmes d'approvisionnement mais on s'est rapidement aperçu, après vérification auprès de notre prestataire, que toutes les portions et les plats qui se trouvaient sur le menu étaient bien livrés. Mais les repas, qui étaient servis, ne collaient pas avec ce qui était annoncé sur les bons de livraison", expliquait le premier magistrat en octobre 2021.
Lors d'une perquisition au domicile d'une des trois mises en cause, les gendarmes ont mis la main sur une salade de blé froide, une barquette contenant des pommes de terre, des petits-pois et des carottes, six cordons-bleus, une barquette d'environ 1 kg de pommes de terre vapeur mais aussi 91 sachets de moutarde et 71 sachets de mayonnaise périmée.
"Des restes qui étaient destinés à la poubelle"
Auditionnées à la brigade de gendarmerie, les trois cantinières n'ont pas reconnu tous les faits qui leur étaient reprochés. Les mises en cause se sont rapprochées du syndicat CGT des agents territoriaux et, représentées par leur avocat, Maître François Garraud, ont refusé la composition pénale s'exposant ainsi à un renvoi de l'affaire devant le tribunal correctionnel. Dans notre édition du vendredi 10 décembre 2021, elles expliquaient qu'elles récupéraient "des restes qui étaient destinés à la poubelle", dans "des petites barquettes", "sans avoir conscience que c'était illégal". Une pratique répandue, selon elles.
En outre, le changement de prestataire justifierait, selon elles, le fait que des enfants n'étaient pas gourmands et qu'il y avait beaucoup de restes… "S'il n'avait été question que de restes, cela aurait été différent, se défendait Frédéric Carlière dans notre édition du vendredi 8 octobre. Ma porte est toujours ouverte pour aider les agents qui se trouvent en situation de difficultés financières. Mais tout laisse à penser qu'on est bien face à une affaire de vol".
Interrogées par nos confrères du Courrier Cauchois, toutes les trois n'ont pas accepté l'idée selon laquelle elles privaient les enfants de nourriture à la cantine. Les conséquences de ces événements ont été lourdes pour toutes les trois : "Depuis ce jour-là, je ne mange plus et je prends des antidépresseurs costauds, rapporte Simone*. Je n'ose plus sortir de chez moi. La nuit, je fais des cauchemars où je me fais agresser dans la rue." a expliqué l'une des cantinières au Courrier Cauchois, tandis qu'une autre, agent d'entretien dont le journal n'a pas été renouvelé, est retournée "à la banque alimentaire et voir l'assistante sociale. C'est brutal." a-t-elle confié. Ce sera à la justice de trancher sur l'issue de cette affaire le jeudi 27 avril.
* Les prénoms ont été modifiés.
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