Parler du cinéma Pathé en plein centre-ville, c'est raviver tout de suite la nostalgie chez les anciens clients. Si cet établissement n'a pas pu perdurer, tous auraient aimé que le Pathé Lumière subsiste encore un peu. "On allait manger au McDonald's avant, en face des affiches de film", se souvient Alexandrine Jeanne, alors collégienne. "Passer devant nous faisait rêver, on avait envie de venir", poursuit Roselyne Belliard. Habitant en périphérie, ses sorties au cinéma étaient "exceptionnelles et magiques". Sans permis, elle devait faire preuve de persuasion pour obtenir de ses parents un peu d'argent afin de prendre le bus et payer sa place. Une fois la vingtaine passée, elle se souvient notamment être allée voir trois fois Top Gun. "J'adorais le film et Tom Cruise. La deuxième fois, au guichet, j'ai demandé une place pour aller voir Maverick (nom du Top Gun sorti en 2022) ! Je devais être déjà un peu visionnaire", plaisante celle qui est évidemment allée voir le second volet sorti récemment.
Une attente périlleuse
Le Pathé Lumière, c'est avant tout une ambiance. Les caisses étaient situées en ras de trottoir, il fallait alors faire la queue dehors. "Je me souviens qu'à l'époque, il y avait de nombreux oiseaux qui nichaient dans les arbres abattus depuis. J'ai vu plusieurs clients recevoir des fientes sur leurs vêtements", témoigne Patricia James. Yves Lecesne, l'ancien directeur, a longtemps bataillé avec la Ville pour couper ces arbres et changer les bancs devenus insalubres. "Souvent, je voyais débarquer des spectateurs avec leurs vêtements ruinés. Je leur proposais de me ramener la facture du pressing, et nous la prenions en charge", se souvient-il. Le Pathé Lumière, c'est aussi des escaliers "à l'angle impressionnant, poursuit Patricia James, qui est allée voir La Grande Vadrouille à l'époque du Majestic. Puis pour sortir, il y avait un dédale impressionnant de couloirs et de portes dans la pénombre, c'était presque angoissant".
La belle histoire
Cliente hebdomadaire du cinéma, parfois devant des projections rassemblant "trois personnes maximum", elle se rappelle avoir tellement ri devant Le Père Noël est une ordure qu'elle en a perdu sa lentille de contact. "Je ne m'en suis rendu compte qu'à la maison !", s'amuse-t-elle encore. Mais la palme de la plus belle anecdote revient à Alexandrine Jeanne. En 2000, elle a 16 ans et doit retrouver un garçon de deux ans son aîné devant le Pathé. Il choisit le film, "une histoire nulle avec un anaconda dans l'Amazonie, j'ai détesté", sourit-elle désormais. C'est devant cette projection qu'Alexandrine et Cyril s'embrassent pour la première fois, avant de donner naissance à trois enfants et de célébrer bientôt 20 années de mariage. "Il m'a avoué quelque temps plus tard qu'il a fait exprès de choisir ce film en sachant que j'allais avoir peur et me rapprocher de lui. Il a bien réussi son coup." Chaque fois qu'elle repasse devant le cinéma, la mère de famille est prise d'une grande émotion. C'est avec un peu de regret qu'elle déplore ne pas avoir eu l'occasion d'emmener ses enfants dans ce lieu sacré pour elle.
Décidément, ce bâtiment regorge de souvenirs.
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