C'est une histoire toute "bête", mais elle est pleine de sens lorsqu'on évoque la cause animale. Une responsable bénévole d'un des refuges ornais pour animaux s'en souvient comme si c'était hier, mais ce n'était pas hier, c'était il y a de cela de nombreuses années, un 24 décembre : "On m'a amené un petit fox-terrier trouvé très mal en point au beau milieu d'un fossé, il était couvert de morsures. Je lui ai installé un petit tapis douillet pour qu'il puisse se reposer, j'ai vu alors dans son regard cette question qu'il semblait me poser : ce tapis, c'est donc pour moi ? C'est donc possible de pouvoir vivre autrement ? C'était le jour de Noël, je l'ai donc baptisé Noël." Le toutou, qui fut ensuite adopté, a pu vivre une nouvelle vie, sereine et calme, jusqu'à son dernier souffle.
De plus en plus d'animaux maltraités
À cet exemple vécu par les amoureux de nos amies les bêtes, s'en ajoutent des centaines d'autres, que les professionnels et bénévoles de l'adoption et de la protection animale vivent à longueur de temps chez eux.
Nous avons fait le tour des refuges, trop peu nombreux, et des associations et familles d'accueil dans le département de l'Orne. Le constat est partout quasiment le même : l'abandon de nos animaux de compagnie est chose récurrente, le phénomène aurait même plutôt tendance à s'accentuer. Certes, la cause de la protection animale a fait du chemin dans les consciences, mais le terrain nous renvoie à une réalité particulièrement douloureuse. Marie-France Violleau, en charge du Refuge Balou, à La Chapelle-d'Andaine, en fait le constat : "C'est épouvantable, de plus en plus de cas de maltraitance d'animaux nous sont signalés."
L'abandon animal est lié aussi à des situations familiales diverses - séparations, déménagements…- rendues de plus en plus difficiles en raison d'un contexte économique tendu. "S'occuper d'un animal de compagnie, c'est aussi assumer des charges. Il faut le nourrir, le soigner. Ce n'est pas un jouet", rappelle avec justesse un bénévole.
Sans compter aussi ce que Stéphanie Girard, du Grand Refuge SPA de la Pervenchères (voir par ailleurs), désigne comme le "syndrome de Noé", autrement dit "des propriétaires d'animaux qui, sensibles à la cause animale, se retrouvent débordés chez eux par un trop grand nombre de bêtes, le plus souvent chats et chiens, dont ils ne peuvent plus s'occuper".
Pour une stérilisation à grande échelle des chats errants
Les raisons de l'abandon sont donc multiples. S'y ajoute la recrudescence d'animaux errants, surtout les chats. Les périodes de confinement n'ont rien arrangé. "Tant qu'on n'aura pas recours dans le département à une stérilisation à grande échelle, on ne s'en sortira pas", estiment plusieurs responsables de la protection animale.
Pour rappel, un animal de compagnie doit être pucé, c'est la loi. Pour les chats depuis 2012, pour les chiens depuis 1999.
Adopter aussi… canards, chèvres, ânes, porcs !
Et pourquoi ne pas adopter une… biquette ?
Quand on pense adoption animale, la première chose qui vient à l'esprit concerne un petit animal de compagnie, comme un chat ou un chien. Il est pourtant tout aussi possible d'adopter un autre animal… qu'on n'imaginerait cependant pas a priori dans son salon ni même dans son jardin clos de murs. Adopter un canard, une chèvre, un cochon ou tout autre animal de la ferme, c'est possible si l'on dispose chez soi d'un peu d'espace : le Grand Refuge de la SPA à Pervenchères le propose chaque jour à qui veut redonner une nouvelle vie à un petit animal qui, pour des raisons diverses - et plus souvent sur décision de justice -, a été recueilli au centre de la SPA de l'Orne, le seul de ce type en France. Depuis sa création dans le département, le Grand Refuge a pu faire adopter quelque 1 400 animaux de la ferme sur les 1 800 qu'elle a recueillis depuis 2016 (voir par ailleurs).
Ses équipes plaident pour une "adoption responsable qui change la vie de l'animal autant que la vôtre". Autrement dit, adopter, c'est aussi s'engager à offrir à l'animal choisi les conditions requises à son bien-être. Des certificats d'engagement sont devenus obligatoires pour certaines espèces. En dehors des chiens et chats, ils concernent l'adoption du furet ou du lapin. Ces certificats mis à disposition dans les centres SPA visent à "lutter contre le fléau de l'abandon et les achats compulsifs en responsabilisant les personnes souhaitant accueillir un animal".
Contact : grandrefuge@la-spa.fr
Le Grand Refuge SPA, qui murmure à l'oreille des chevaux
C'est le seul refuge SPA de ce type en France, accueillant proposant à l'adoption chevaux, poneys, ânes et animaux de la ferme. Depuis sa création en 2016, le Grand Refuge de Pervenchères a pris en charge plusieurs centaines de bêtes.
L'histoire est un éternel recommencement : la Société protectrice des animaux fut fondée en 1845 pour recueillir à l'époque les chevaux délaissés ou malmenés par leurs cochers. Les chevaux laissés parfois à l'abandon étaient alors pris en charge par des équipes qui furent, en ce temps-là, les pionniers de la protection animale. Ainsi naquit ce qui perdure aujourd'hui et s'est sacrément développé. Preuve vivante de cette histoire, la création en 2016, à Pervenchères, du Grand Refuge, dont la raison d'être rejoint le fondement même de la SPA : recueillir en son sein les équidés délaissés, auxquels ont été ajoutés avec le temps les animaux de la ferme.
"L'adoption demande beaucoup
de persévérance et de patience"
C'est Stéphanie Girard, quarante-deux ans, qui pilote cet espace, le seul de type en France dont l'activité rayonne sur l'ensemble du territoire hexagonal, bien au-delà des limites du département de l'Orne. Depuis son installation sur 175 hectares, le Grand Refuge a pris en charge près de 1 400 chevaux, ânes, poneys, et plus de 1 700 animaux de la ferme, chèvres, moutons, bovins, cochons asiatiques et même oiseaux… En retour, et pour la même période, la structure a pu faire adopter quelque 840 équidés et 1 400 animaux. Un bilan qui traduit aussi un constat : la cause animale de plus en plus prégnante fait de l'adoption un sujet majeur.
La plupart des animaux accueillis par les équipes du Grand Refuge le sont dans le cadre de décisions de justice. Ce sont des animaux qui, pour la plupart, ont eu une vie cabossée, souvent par manque de soins. Il arrive aussi que certains propriétaires ne puissent plus faire face aux charges que représentent leurs animaux de compagnie. Ces "amoureux des bêtes" sont atteints du "syndrome de Noé", ainsi nommé car comparé au syndrome de Diogène qui touche les humains qui accumulent chez eux toutes sortes de choses : "Des propriétaires sensibles pourtant à la cause animale se retrouvent chez eux avec des dizaines d'animaux dont ils ne peuvent plus s'occuper correctement."
Accueillir, recueillir les animaux qui en ont besoin est une chose, les adopter en est une autre, et pas la plus facile. Les professionnels de la SPA rappellent la nécessité d'une prise en charge encadrée. "Beaucoup de personnes qui poussent la porte du refuge sont portées par l'idée d'une bonne action, mais cela ne suffit pas. Nos équidés sont tout sauf la perle rare qu'on viendrait chercher pour faire une bonne affaire. Ils sont généralement craintifs et difficiles d'accès. Leur adoption demande beaucoup de persévérance et de patience."
Quand les animaux du Grand Refuge partent ailleurs pour leur nouvelle vie, c'est "toujours le meilleur moment, parce qu'on sait qu'ils seront dorlotés", dit Stéphanie. À l'inverse, il peut arriver que l'adoption ne tienne pas la rampe. "Cela arrive chaque année, pour cinq à dix animaux qui ont quitté le refuge pour être placés." Ce retour à la maison est vécu difficilement par les équipes du Grand Refuge. "C'est à chaque fois un échec très douloureux."
"Ce qui nous motive, c'est de pouvoir redonner confiance à ces animaux"
La Patte de l'espoir porte bien son nom, l'association aide à l'adoption d'animaux délaissés. Elle a signé un partenariat avec la Ville de Flers.
Berengère Miday, 42 ans, maman de trois enfants, a changé de vie. Cette ancienne professionnelle en milieu pharmaceutique installée en région parisienne a aujourd'hui posé ses valises à Saint-Gilles-des-Marais, près de Domfront, où elle a créé sa pension de famille animale.
Pourquoi ce changement de vie ?
Son installation a été motivée par La Patte de l'espoir, dont elle est devenue la présidente : l'association, créée en 2010, aide depuis son origine à l'adoption animale. Autrement dit, elle place en famille d'accueil des animaux abandonnés ou délaissés qu'elle propose ensuite à l'adoption.
Comment travaille l'association ?
Dans l'Orne, l'association a signé un partenariat spécifique avec la Ville de Flers et sa fourrière. La commune est l'une des seules dans le département, de cette taille, à prendre en compte l'errance des animaux, chiens et chats. La Patte de l'espoir travaille ainsi aux côtés des services de la Ville pour recueillir les animaux qui en ont besoin. Elle fait la même chose avec plusieurs fourrières en région parisienne ou en Bretagne, également avec des cabinets vétérinaires. Un travail rigoureux qui tient à la fois de l'administratif et de la surveillance sanitaire. Avant d'être proposé à l'adoption, un animal sera d'abord accueilli en famille d'accueil pour connaître ses comportements, sa sociabilité et bien sûr son état de santé. "Ce qui nous motive, c'est de pouvoir redonner confiance à ces animaux abandonnés, les voir reprendre goût à la vie", assure Bérengère Miday. Chaque année, près de 300 chiens et chats sont ainsi recueillis par l'association.
Géraldine a adopté trois chevaux de la SPA
C'est l'histoire d'une adoption pas comme les autres. Géraldine a recueilli à la SPA trois chevaux.
Ponté, bel alezan de 22 ans, Lapaz, 18 ans, et Raddy, 5 ans, tous deux à la robe bai, sont ce qu'elle appelle même de "beaux morceaux". Des "morceaux", mais surtout des chevaux qui attendaient de trouver sabots à leurs pieds délaissés… Et c'est ce qui s'est passé avec Géraldine Caplain, installée dans un petit village de la Sarthe, à la frontière de l'Orne : au refuge de la Société protectrice des animaux (SPA) de Pervenchères, le plus important de France, elle adopte les trois "morceaux", qui ont retrouvé chez elle de l'espace et surtout beaucoup d'amour.
Géraldine, 47 ans, mère de deux enfants, a créé en 2015 un élevage d'alpagas dont elle exploite la laine, le Paradis de la Charmie. Et c'est ici, dans son exploitation, qu'elle a vécue il y a près de trois ans, la disparition de son Indiana, un selle français qui l'a accompagnée pendant plus de vingt ans. Sa passion pour les chevaux est telle qu'elle est allée pousser la porte du refuge de la SPA, non pas pour remplacer son cheval disparu, mais pour en remettre d'autres en selle, qui en avaient besoin. Pourquoi faire appel à un refuge de la SPA plutôt qu'à un éleveur qui lui en aurait vendu ? "À la SPA, je trouvais cela plus rassurant", confie Géraldine. Les trois chevaux sont arrivés chez elle cet hiver. Elle ne sait pas grand-chose de leur histoire, seulement que d'entre eux ont été retirés de leurs élevages "faute de soins". Une nouvelle vie commence pour eux comme pour elle.
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