"On a suffisamment de produits dans la région pour faire l'entrée, le plat principal, le poisson, si on le souhaite", s'exclame Éric Pouhier, cuisinier traiteur à Vicq-sur-Mer. Seul bémol, et encore : "Le dessert, ça va peut-être être un petit peu plus compliqué parce qu'on n'a pas de chocolat dans la région, mais autrement oui, on peut faire un repas sans problème", ajoute le chef. Alors que s'ouvre la période des fêtes de fin d'année, il a déjà reçu ses premières commandes.
Ce n'est pas Jean-Sébastien Choubrac, de la Ferme Hébé, à Néhou, qui va dire le contraire. Lui, estime qu'il faut allier aliments traditionnels et d'exception. "Ce qu'on arrive à faire dans les fermes maraîchères du coin, c'est de la patate douce. Les patates douces poussent très bien sous les serres", révèle-t-il.
Le menu complet du chef
Pour les festivités de fin d'année, Éric Pouhier a quelques idées. Tout commence justement avec de la patate douce. "En entrée, on pourrait faire des Saint-Jacques, parce que des Saint-Jacques dans la région, on en a", entame le chef. Des coquillages à accompagner d'un petit écrasé de patate douce. "Ça peut se faire en cassolette, ce qui permet de faire la cuisine l'après-midi, en snackant juste les Saint-Jacques, en faisant un beurre blanc, et après, il y a juste à réchauffer pendant que les convives prennent l'apéro", conseille-t-il. Une à deux noix suffisent pour l'entrée.
Les Saint-Jacques, "ça peut se faire en cassolette, ce qui permet de faire la cuisine l'après-midi"
Autre idée du chef : "Vous pouvez les faire mariner aussi, avec une huile de noix, des pistaches concassées et quelques échalotes ciselées, du sel du poivre, ça suffit. Ça vous parfume la Saint-Jacques, c'est superbe." Il ne faut pas en faire trop non plus selon lui : la Saint-Jacques est bonne au naturel, et pas trop cuite.
Pour le plat de résistance, place à la tradition. "On pourrait faire un suprême de pintade, et vous faites des butternuts que vous allez rôtir. La pintade, ça aime bien le salé/sucré", propose Éric Pouhier. Là, il faut juste faire dorer la peau et terminer la cuisson au four. Pareil pour les butternuts, que l'on trouve dans le département. Il faut les faire rôtir à la poêle et les finir au four. "Et puis vous faites un petit jus légèrement, mais très légèrement, sucré avec une petite cuillère de miel, quelques condiments, voire un déglaçage au vinaire balsamique. Avec un bouillon de volaille, ça vous fait un jus superbe", détaille le traiteur.
Pour le fromage, le local est incontournable. Il est possible de le laisser tel quel sur un plateau, mais aussi de le cuisiner. "Vous faites un nougat de chèvre. Vous faites un mélange de chèvre frais avec des fruits secs, vous crémez légèrement et gélifiez très légèrement. Ça vous fait un fromage un peu plus travaillé", dévoile-t-il.
Pour le dessert, Éric Pouhier conseille une bûche à la pomme, avec une mousse au cidre. Ce sont les fêtes, donc il faut du chocolat quand même. Bon appétit bien sûr !
IGP Huître de Normandie, un peu de patience
Attendu pour début 2023, le dossier de création d'une Indication géographique protégée (IGP) Huître de Normandie est à l'étude dans les rouages de la Commission européenne, à Bruxelles.
Une IGP pour quoi ?
Une Indication géographique protégée est un label européen qui lie une qualité ou une manière de produire à un territoire. Avec cette IGP, le Comité régional de conchyliculture (CRC) de Normandie veut mettre en avant sa manière de produire des huîtres, notamment la méthode du trompage, une exposition deux fois par jour aux alternances de l'eau, du soleil et du vent. L'IGP permet aussi de mieux valoriser les produits.
Où en est-on ?
Le dossier a été validé par le ministère de l'Agriculture en France et déposé auprès de l'Union européenne. "Il est en train de passer à la moulinette administrative au niveau de l'Europe, explique Jean-Marc Jacquette, chargé de mission au CRC. Il faut prendre ça positivement. C'est le temps de la maturité." Cela doit permettre aux producteurs d'être prêts dès l'arrivée de ce label, espéré pour 2024.
Une huître vraiment particulière
Entre la côte ouest de la Manche et Saint-Vaast-la-Hougue, le goût et la texture des huîtres ne sont pas les mêmes. "Le consommateur va avoir le choix, et le choix de la qualité", assure Jean-Marc Jacquette. Niveau quantité, il y en aura un petit peu moins cette année, à cause de la sécheresse de l'été. L'eau douce permettant le développement de phytoplancton, aliment de base des huîtres, le peu de pluie et les rejets de rivière, peu importants, ont entraîné un léger retard de croissance des mollusques.
Comme un saumon dans l'eau
L'entreprise Saumon de France à Cherbourg est unique : elle propose du poisson d'élevage, mais élevé en pleine mer.
C'est l'un des aliments facilement associé aux fêtes de fin d'année : le saumon. Avec un peu de beurre sur un toast ou avec de la crème sur un blini, l'ambiance est tout de suite festive. Mais quel saumon acheter ? Dans le Cotentin, Saumon de France propose des produits particuliers. "C'est le seul élevage de saumon en mer en France", précise Pascal Goumain, le président du groupe AMP Saumon de France. C'est aussi la plus grande ferme marine du pays, avec une autorisation de produire 3 000 tonnes de saumons et de truites par an.
Un saumon de mer musclé, "plus ferme et moins gras"
À 2,5 kilomètres au large de Cherbourg, mais bien protégés par la digue, seize bassins rectangulaires et huit cages circulaires sont arrimés dans la grande rade. "Ce qui caractérise notre élevage de Cherbourg, c'est la protection de la digue, qui nous permet d'avoir une belle qualité d'eau, mais également une protection des installations vis-à-vis des tempêtes", explique le professionnel. Cela permet de faire grandir les poissons dans de l'eau de mer, avec "les courants, des vents, de l'oxygénation, surtout l'hiver". Pascal Goumain précise : "On a un poisson dont la signature est d'être musclé comme il nage beaucoup. Cela permet d'avoir un produit plus ferme et moins gras."
L'autre particularité de Saumon de France, c'est son attachement au bien-être animal. "Des questions très mises en avant dans tous les élevages", estime le président. Les dimensions des cages sont impressionnantes : 15 m par 20 pour les rectangulaires, avec 6 m de profondeur ; 32 m de diamètre et 10 m de fond pour les circulaires. Les poissons ne sont pas entassés, ils représentent 1,2 % du volume.
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L'attention au bien-être est aussi présente dans les conditions d'abattage. Saumon de France a une machine qui abat les poissons sans manipulation humaine, à la sortie du bassin, et donc "sans les faire souffrir et sans les stresser", affirme Pascal Goumain. Il justifie : "C'est important pour le bien-être animal, mais aussi pour la qualité de chair du poisson. Un poisson qui est stressé sera moins bon." Le poisson est aspiré par une pompe puis assommé et saigné en même temps, en "une fraction de seconde".
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Manger moins, mais mieux
La nourriture a aussi été analysée. "Ce serait un paradoxe de pêcher de plus en plus de poissons sauvages pour nourrir de plus en plus de poissons d'élevages, admet-il. On a pris la décision de faire fabriquer des aliments à base de protéines végétales françaises et de farine et huile de poisson issu de la pêche durable." L'entreprise travaille aussi sur des aliments à base d'insectes. Dans les farines, des pigments naturels sont ajoutés pour obtenir une chair bien rose. Une couleur qui vient normalement des crevettes que mangent les poissons, ce qui n'est pas le cas ici. Pour Pascal Goumain, l'idéal serait de faire sans ces pigments, mais le consommateur, lui, n'est peut-être pas prêt.
Saumon de France est plus de deux fois plus cher. Il faut compter 101 €/kg pour des tranches de saumon fumé, contre 40 à 45 €/kg chez les marques des grandes surfaces. C'est le prix de la qualité locale.
"Nous sommes dans un contexte d'accroissement important de brasseurs"
Si le vin et le champagne sont des incontournables des tables de fêtes, la bière entend jouer sa partition. Il y a de plus en plus d'amateurs, et nos brasseurs locaux veulent en profiter. Interview avec Eric Lecointre, de la Brasserie Cotentine.
Eric Lecointre est l'un des deux dirigeants de la Brasserie Cotentine, installée à Barneville-Carteret. Si les bulles sont de tradition à Noël et pour le nouvel an, c'est rarement celles de bière. Pourtant, les choses changent selon le brasseur.
Le vin disparaît-il selon vous ?
J'ai beaucoup de jeunes qui rentrent dans la boutique et qui sont clients. Ils ne sont pas forcément fanas de vin. Ils ont été élevés à la bière avec l'avènement des brasseries artisanales. Les goûts ont changé des bières purement industrielles. Ils se sont un peu intéressés à ces goûts, ils s'y sont investis. Pour eux, dans un repas de Noël, on va évoluer sur des ambrées, sur des blanches, on va aller sur des triples, des choses qui s'adaptent parfaitement avec les plats de fin d'année. Et ils vont faire tout le repas comme ça.
Est-il possible de cuisiner aussi à la bière ?
Oui. Par exemple, on a une bière de glace, que l'on surgèle. On va sortir un concentré, quelque chose de liquoreux comme pourrait l'être un porto. Personnellement, je cuisine mon foie gras avec ça. Je remplace le traditionnel sauternes pour faire mariner le foie. Ça donne une petite amertume, une petite rondeur au foie gras qui est assez étonnante et agréable.
La Manche est-elle une région brassicole ?
Historiquement, il y avait déjà des brasseurs dans la Manche. C'était un peu ancestral. Et nous sommes dans un contexte d'accroissement important de brasseurs en Normandie. Par rapport à 2016, ils ont été multipliés par quatre.
Côté fromage, rien ne cloche
À Noël, c'est fromage et dessert, pour rester à table plus longtemps. Dans le Cotentin, il y a du choix, notamment le camembert ou encore le fromage de chèvre. Présentation.
La Manche possède une diversité de fromages et de producteurs, des industriels aux artisanaux. Mais quelle différence entre un camembert manchois et celui d'un autre département ? "Par rapport à nos confrères du pays d'Auge ou de l'Orne, on a une proximité au bord de la mer, explique par exemple David Aubrée, le directeur de Réo, entreprise basée à Lessay. Nos vaches vont pâturer plus longtemps puisqu'on a moins de gel et de neige, et un petit air salin qui permet d'avoir des herbes un peu différentes." Il poursuit : "On a un goût légèrement iodé, qui plaît beaucoup."
Du chèvre aussi
Le Cotentin est également une terre de chèvres. Des élevages se créent avec une race locale : la chèvre des fossés. Elle a failli disparaître du nord-Cotentin il y a une quinzaine d'années. "La vache du pauvre", dévoile Samuel Cauchard, de la Chèvrerie de la vallée des Moulins, à Carneville, à propos de ces animaux qui trouvaient leur nourriture dans les fossés. "Elles font un lait un peu plus riche que les autres et sont plus adaptées au climat local", révèle Samuel Cauchard. Le goût, lui, va être plus fleuri, car les chèvres mangent des plantes diversifiées. "Des ronces, de l'herbe, de la lande", détaille l'éleveur. Le fromage sera aussi plus doux selon lui. Attention, il n'y en a pas toute l'année, mais seulement pendant neuf mois à partir du printemps. Samuel Cauchard tente de fabriquer une tomme, peut-être pour cet hiver…
La Brioche du Vast, une qualité gustative historique
Sa renommée s'est étendue au-delà des frontières du Cotentin. Qu'est-ce qui rend unique la Brioche du Vast ?
"Des bons produits, la base démarre par là", assure d'entrée de jeu Antoine Drieu, le propriétaire de La Brioche du Vast. Le beurre est "du vrai beurre doux de Normandie", les œufs sont cassés à la main et la farine est pâtissière, détaille-t-il. Le petit plus qui rend cette brioche unique ? "Le savoir-faire qui a été transmis de successeurs en successeurs", assure Antoine Drieu. La recette actuelle a été créée en 1935, par la famille Picquenot. Quatre propriétaires plus tard, elle n'a pas changé.
La boulangerie était à l'époque un lieu de passage lors d'une promenade. "La promenade du dimanche, avec le bon goûter qui plaisait à tout le monde, raconte Antoine Drieu. C'est devenu un détour un peu incontournable. D'ailleurs, tout le monde s'approprie la Brioche du Vast avec sa propre histoire."
Un ingrédient secret
Une histoire et des bons produits, ça ne suffit pas pour faire une brioche qui reste dans les annales de l'histoire gastronomique. "Il y a un vrai savoir-faire, un secret de fabrication auquel on tient énormément", dévoile le pâtissier. Lequel ? Impossible de lui faire cracher le morceau. "C'est un tout, explique-t-il. On a les ingrédients de base d'une brioche. Il y a aussi un ingrédient en particulier qui fait que… Et puis les dosages qui sont particuliers également. En plus, c'est le savoir-faire qui lie tout ça." Et même là, ce n'est parfois pas suffisant. "Il nous arrive de rater une tournée de brioche", révèle-t-il, pour peu que la température du laboratoire change, ou celle du beurre.
Côté goût, "c'est une brioche qui est riche en matière grasse", affirme Antoine Drieu. Effectivement, une fois en mains, la brioche dépose un film gras sur la peau. "Les ancêtres ont réussi à rendre ces matières grasses légères en bouche. On ne s'en écœure pas", vante-t-il toutefois. Et d'interroger : "C'est peut-être là, le coup de génie des anciens ?"
Des prix stables malgré l'inflation
Un savoir-faire et un goût particulier qui en font un produit d'exception, à 20 € le kilo. Des prix qui, pour l'instant, ne changent pas, malgré l'inflation. Antoine Drieu y met un point d'honneur. "C'est un produit plaisir, j'ai envie que ça reste accessible", estime le pâtissier, qui préfère prendre sur sa marge.
Il pense aussi au développement de sa brioche, sans toucher ni au goût, ni à la texture. Après le confinement, il a acheté de nouvelles machines pour produire un peu plus. Il fournit quatre grandes surfaces et des distributeurs automatiques. Antoine Drieu va lancer une boutique en ligne, normalement pour les fêtes. L'histoire de la Brioche du Vast ne va pas s'arrêter là.
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