Il n'y aura donc pas de "passage en force" sur ce sujet hautement inflammable, comme cela était redouté au sein même de la majorité alors que se profile jeudi une journée de grèves et de manifestations, la première de l'automne, concernant les salaires mais également présentée comme un coup de semonce sur les retraites.
A l'issue d'un dîner à l'Elysée autour d'Emmanuel Macron mercredi soir réunissant les cadres de la macronie, a prévalu "le choix du dialogue et de la concertation", a déclaré la Première ministre, en détaillant un calendrier relativement souple, mais aussi cramponné à la promesse présidentielle d'une application de la réforme à l'été 2023.
La cheffe du gouvernement souhaite présenter "un bilan" de ces discussions avec les partenaires sociaux et forces politiques "avant Noël", laissant ainsi quasiment trois mois de pourparlers potentiels autour d'une réforme déjà en gestation lors du précédent quinquennat, avant d'être interrompue par la pandémie de Covid-19.
Et "on privilégie l'inscription de cette réforme dans un projet de loi qui devrait être voté avant la fin de l'hiver, pour une entrée en vigueur de la réforme à l'été 2023", a-t-elle ajouté.
Dans cette perspective, Mme Borne a demandé au ministre du Travail Olivier Dussopt "d'engager dès la semaine prochaine" des négociations avec organisations patronales et syndicales, ainsi qu'avec les "groupes parlementaires".
Au menu des concertations figurent le "dispositif carrières longues", la prise en compte de "ceux qui ont eu des métiers pénibles", "la prévention de l'usure au travail", "les sujets d'aménagement de fin de carrière, et de transition entre l'emploi et la retraite", "l'emploi des seniors et la lutte contre la discrimination dont peuvent être victimes les seniors", "les régimes spéciaux", "la revalorisation (à 1.100 euros, NDLR) du minimum de pension pour les personnes qui ont eu une carrière complète" et, "de façon générale, l'adaptation des paramètres pour assurer l'équilibre financier du système", a détaillé la Première ministre.
Atermoiements et divisions
Cette décision, qui repose sur une "convergence totale entre les différentes composantes de la majorité" selon Mme Borne, met fin à plusieurs jours d'atermoiements et divisions sur la façon d'engager cette réforme des retraites, qui prévoit notamment un "report progressif de l'âge de départ de 4 mois par an, aboutissant à 65 ans en 2031", a rappelé Mme Borne.
Si "le cadre de cette réforme avait été clairement posé dans la campagne présidentielle et avait été également réaffirmé", selon Mme Borne, la méthode faisait débat: faut-il un simple amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) examiné en octobre à l'Assemblée, piste la plus controversée et qui avait notamment braqué l'allié du MoDem? Un passage par un PLFSS rectificatif en janvier? Ou un projet de loi ad hoc?
Cette dernière option semble donc privilégiée à ce stade par l'exécutif... à condition de parvenir à ouvrir les concertations, alors que syndicats et une grande partie des oppositions politiques sont vent debout contre le fond même de cette réforme.
"Il y a des sujets importants sur lesquels on souhaite ouvrir la discussion et donc on se place dans une hypothèse où l'on peut mener une concertation", a souligné Mme Borne, en refusant toutefois d'écarter définitivement la possibilité d'un amendement au PLFSS.
Un projet de loi dédié présente aussi un risque de taille pour l'exécutif, qui ne dispose que d'une majorité relative à l'Assemblée.
Il pourrait l'obliger à dégainer l'article 49.3 de la Constitution, qui permet l'adoption d'un texte sans vote sauf motion de censure, mais il n'est utilisable qu'une fois par session parlementaire. Il est en revanche possible de faire feu à volonté avec cette arme sur les textes budgétaires, que sont donc les PLFSS.
Plus généralement, Mme Borne entend "profiter des semaines qui viennent pour bien reposer les enjeux" de la réforme. "Parce que ça fait un moment qu'on ne parle plus des enjeux, mais de la méthode", a-t-elle déploré.
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