"Votre papa vous manque ?" La réflexion en forme d'interrogation paraît bien déplacée et la réponse fuse : "Bien sûr qu'il nous manque. Chaque jour, des événements heureux ou malheureux nous ramènent à lui."
Plus rien n'est désormais comme avant, et Christelle et Sandrine, ses deux jumelles, n'auront pas le cœur, dans quelques jours, à fêter leurs quarante ans. "La dernière fois que nous avons fêté notre anniversaire commun, c'était l'année dernière, avec lui."
Lui, Patrick Leboucher, soixante-six ans, sportif, motard et passionné de longues distances, a disparu le dimanche 12 septembre 2021, il y a tout juste un an. Il est parti de chez lui à l'heure du déjeuner, vers 13 h 30, pour effectuer son footing tout autour de la maison qu'il occupe dans les faubourgs de Lisieux avec Claudia, sa compagne. Elle était partie déjeuner à l'extérieur dans sa famille.
"On ne l'imagine plus vivant…"
Depuis, personne ne l'a revu. Une disparition jugée inquiétante dès le début : en dépit de toutes les recherches effectuées sur le terrain, il n'a pas été retrouvé. Aucune trace, aucun indice, aucune piste. Seuls des témoins disent l'avoir aperçu en milieu d'après midi. Il courait vêtu d'un polo noir.
La gendarmerie continue encore aujourd'hui ses investigations et en tient régulièrement informée la famille. "Mais nos échanges s'espacent de plus en plus", disent les deux jumelles, Sandrine et Christelle, et Jean-François leur frère, les trois enfants de Patrick. Tous trois parents de deux enfants chacun sont aujourd'hui persuadés qu'ils ne retrouveront sans doute pas leur père vivant. "S'il y a une issue, elle sera forcément fatale. On ne l'imagine pas vivre ailleurs, ou alors ce serait vraiment improbable."
Deux hypothèses reviennent en boucle dans l'esprit de la famille et de ceux qui, dès le début, ont participé aux recherches : soit une mauvaise rencontre dont on aurait pu être victime le père de famille, soit un malaise en rase campagne et loin de ses bases. "C'est une chose qui peut en effet arriver, disent les deux sœurs. Il se peut qu'il ait pu courir de façon inconsciente très loin de chez lui. Et donc, il n'est pas là où nous l'avons cherché." Tout de même, cette seconde hypothèse parait peut vraisemblable : s'il avait eu un malaise, on aurait dans tous les cas retrouvé son corps, et ce n'est pas le cas.
Le secteur proche de la maison familiale a été ratissé de tous les côtés, tous les chemins de randonnée, les petits sentiers de traverse ont été examinés à la loupe, refaits des centaines de fois dans un rayon d'une quinzaine de kilomètres, en vain. "Le plus compliqué pour nous aujourd'hui, c'est de ne pas pouvoir faire notre deuil. Ce que nous espérons désormais, c'est la délivrance, savoir ce qui a pu se passer."
Une marche du souvenir
Le dimanche 11 septembre, la famille organise une marche en son souvenir. Le rendez-vous est donné à l'endroit même où ont démarré les recherches il y a un an, sur le parking de la Seriprim, dans la zone d'activité des hauts de Glos, aux portes de Lisieux, et à 13 h 30 précises, l'heure à laquelle Patrick Leboucher est parti faire son jogging pour se préparer au marathon d'Amsterdam.
Ce jour-là devait être une belle journée, ce fut le début d'un cauchemar qui ne cesse de hanter les sœurs jumelles et leur frère. Comment font-ils pour tenir ? "Nous avons nos vies, nos travails, nos familles, mais il ne se passe pas un jour sans penser à lui."
Christelle avoue même que pendant ses vacances cet été en Charente, elle s'est surprise à ausculter les sentiers qu'elle empruntait pour voir si elle n'y trouvait pas un indice, un lacet, une chaussure dans un fossé… La vie sans Patrick est devenue une histoire de famille accablée de chagrins et de doutes.
"Cette marche, c'est aussi pour dire qu'on ne l'oublie pas. Il nous manque tellement."
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