Les falaises d'Étretat se méritent. Pour profiter du point de vue sur l'arche et l'aiguille la plus célèbre du monde, il faut grimper. Depuis 2019, il est interdit de stationner sur la falaise d'Amont, au niveau de la chapelle Notre-Dame-de-la-Garde. C'était l'un des préalables à l'obtention du label Grand Site de France, déjà décroché par le Pont du Gard, la chaîne des Puys en Auvergne ou la pointe du Raz, dans le Finistère.
"Pas de Disneylandisation"
"Le sujet a été évoqué dès 2012 par l'État. Nous n'étions pas encore dans les problèmes de surfréquentation d'aujourd'hui, mais il y avait un mépris du paysage avec ce parking", rembobine Florence Thibaudeau-Rainot, vice-présidente du Département de Seine-Maritime, en charge de l'opération Grand Site. Attendue pour 2023, cette labellisation a pour but de préserver le site naturel. Elle implique treize communes (Bénouville, Bordeaux-Saint-Clair, Criquebeuf-en-Caux, Étretat, Fécamp, Froberville, La Poterie-Cap-d'Antifer, Les Loges, Le Tilleul, Saint-Jouin-Bruneval, Saint-Léonard, Vattetot-sur-Mer et Yport) réparties sur la communauté d'agglomération Fécamp-Caux-Littoral et la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole. "Contrairement à un classement par l'Unesco par exemple, cette démarche prend en compte que le territoire vit : il y a ici une activité agricole, économique, touristique", poursuit Florence Thibaudeau-Rainot. Après une phase d'études de 2014 à 2016, un programme d'actions a été établi. Il faut notamment repenser la façon de se déplacer, avec des alternatives à la voiture, plébiscitée par plus de 80 % des visiteurs. "Depuis 2016, par exemple, plus de 8 000 billets de train Paris-Bréauté-Etretat ont été vendus. C'est une vraie avancée", estime la vice-présidente. L'épineuse question du stationnement est au cœur du sujet. S'il existe bien un itinéraire bis, au niveau du rond-point des ramasseurs de galets à Saint-Jouin-Bruneval, rares sont les visiteurs qui savent qu'il mène tout droit au parking de la Guezane, gratuit mais un peu plus éloigné de la plage. Pourrait-on imaginer, un jour, un système de parking payant/navette gratuite, similaire à celui qui existe au Mont-Saint-Michel ? "Tout est envisageable, mais l'idée n'est pas de recréer, sur des terres agricoles, de gros parkings de délestage en bitume, avec une Disneylandisation d'Étretat. On est dans le respect de la nature. L'objectif, c'est d'éviter le tout bagnole, mais nous savons pertinemment que le sujet de surfréquentation, de mobilité et de stationnement ne se réglera pas à Étretat mais bien avec les communes qui sont autour."
L'été prochain, la structure de gouvernance pour le Grand Site devrait voir le jour, sous la forme d'un syndicat mixte. Un outil qui permettra de solliciter des financements. Mais le label en lui-même n'apporte aucune subvention. "Il a plutôt vocation à rappeler aux visiteurs que l'on est dans un territoire qu'il faut respecter", souligne Florence Thibaudeau-Rainot. Une montée en gamme touristique, en quelque sorte. "Un tourisme de qualité plus que de quantité, oui, c'est assumé."
Au Mont-Saint-Michel, les voitures ont disparu
Le Mont-Saint-Michel a lui aussi été aménagé pour préserver la nature.
Avec deux à trois millions de visiteurs annuels avant la Covid, le Mont-Saint-Michel pourrait-il être un modèle pour Étretat ? "Surtout pas", pour Estelle Serafin, adjointe au tourisme à Étretat, qui rappelle que le Rocher ne compte aujourd'hui qu'une poignée d'habitants. "Le Mont-Saint-Michel n'est pas un lieu de vie", pointe également Cosmo Danchin-Hamard, cofondatrice de l'association Étretat Demain.
Des navettes exploitées par un privé
Mais les deux sites ont des points communs. Comme à Étretat, c'est l'État qui a sommé les collectivités d'agir pour la préservation du site, dans les années 90, pour la préservation de l'environnement. Il s'agissait de lutter contre l'ensablement de la baie du Mont Saint-Michel. Le chemin a été long, mais ce qui paraissait impensable à l'époque est une réalité aujourd'hui : les voitures ne stationnent plus au pied du Mont. C'est un acteur privé, Veolia, qui se charge d'acheminer les touristes via des navettes, depuis les parkings. L'aménagement avait été piloté par un syndicat mixte regroupant les Régions Bretagne et Basse-Normandie, le Département de la Manche et les communes de Beauvoir et du Mont-Saint-Michel. "Nous avions en face de nous l'État, un partenaire à consulter avant toute réalisation. La gouvernance était insuffisante", estime aujourd'hui Laurent Beauvais, président de Région de l'époque. Depuis, un Établissement public à caractère industriel a été créé, sous la tutelle du ministère de la Transition écologique.
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