La rue est toute calme. Pas un passant et peu de voitures, sauf celles qui se dirigent vers le lotissement tout au bout. C'est la Résidence des Charmes, un nom inadapté lorsqu'on songe à ce qui s'y est passé voilà plus d'un quart de siècle.
Entre avril 1996 et juillet 1997 se nouait ici l'histoire que la presse à l'époque a qualifiée de "maison de l'horreur". Cette histoire est considérée encore aujourd'hui comme l'une des affaires criminelles parmi les plus retentissantes de Normandie. Etait signalée sur place au printemps 96 la disparition d'une habitante des environs, une adolescente, Marylène Roussey, 17 ans dont on pensa dans un premier temps qu'elle avait fugué. C'était toute autre chose et beaucoup plus tragique.
Le petit village de La Frenaye aurait bien aimé pouvoir éviter pareille affaire. Encore aujourd'hui, c'est à peine si certains osent en parler : au centre de l'histoire, un certain Jean-Yves Morel à qui l'on aurait donné le bon dieu sans confession et qui fut pourtant reconnu coupable d'un double meurtre particulièrement sordide.
L'homme, la trentaine à l'époque, lunettes fines et cheveux soignés, bon père de famille au visage lisse, apprécié de ses voisins comme de ses collègues de travail avait tué deux jeunes femmes, sa propre belle-soeur Marylène en 1996 - celle dont on imagina un temps qu'elle avait fugué - et à l'été 1997 une jeune étudiante, Elisabeth Griffin, dont on avait signalé la disparition début juillet. Elle avait été en stage dans l'entreprise de pétrochimie dont il était le laborantin. Il avait dissimulé les cadavres chez lui, sa belle-sœur au fond de son jardin sous un arbre qu'il avait planté, la jeune étudiante sous une dalle de béton coulée dans son garage.
C'est au terme de deux ans d'une enquête particulièrement fouillée et minutieuse que les gendarmes de la région de Lillebonne purent enfin élucider le mystère de cette double disparition. Jean-Yves Morel fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une peine de dix huit ans de prison. Il avait fini par reconnaitre le double meurtre et le viol d'une des deux jeunes femmes. Le Président de la Cour d'Assises, Jean Raynaud, qui eut à juger cette affaire en 2000, est aujourd'hui retraité, installé dans le Nord-Cotentin.
Sur les lieux du crime, son ancien
meilleur ami témoigne
Nous sommes retournés sur les lieux à La Frenaye. La "maison de l'horreur" existe toujours. Le couple qui y habite désormais nous a ouvert ses portes mais n'a pas souhaité s'exprimer. Pas question de revenir sur ce qui s'est passé à l'intérieur de cette bâtisse aux dimensions modestes, un petit pavillon entouré ici d'une haie parfaitement entretenue.
Les lieux n'ont pas été modifiés, seul le garage où avait été dissimulé le cadavre de la jeune étudiante Elisabeth, 23 ans, a été transformé. C'est là que les gendarmes qui s'étaient équipés d'un "géoradar" pour effectuer leurs recherches avaient retrouvé la trace de la malheureuse enterrée à plus d'1,50 m sous terre. Lors des recherches en sa présence, Jean-Yves Morel n'avait quasiment pas bronché. Il prétendait aux gendarmes qu'ils n'y trouveraient jamais rien, qu'il n'était pas le meurtrier que les enquêteurs traquaient depuis deux ans. il alla même pendant les fouilles demander un conseil à un gendarme sur l'équipement de bateaux... comme si de rien n'était !
Jean-Pierre, un des voisins parmi les plus proches de Jean-Yves Morel et que nous avons rencontré, avait assisté de loin à la scène, lors de la perquisition : " Je n'aurai jamais imaginé que je vivais à l'époque depuis deux ans au pied d'un cimetière." L'affaire avait suscité une très grande émotion. Nous avons aussi retrouvé celui qui fut, plus jeune, le meilleur ami du meurtrier, son témoin de mariage. Frédéric vivait à Rouen à l'époque. Il est hanté par cette histoire depuis 25 ans. "Comment ai-je pu passer à côté ? Il était mon ami et je n'ai rien vu."
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