Quatre jours après le blocage du pont Ambassador, entre l'Ontario et Detroit aux Etats-Unis, qui perturbe déjà l'industrie automobile des deux côtés de la frontière, un autre axe a été ciblé par les manifestants canadiens, qui sont dans les rues depuis bientôt deux semaines.
"Aucune circulation n'est possible", a indiqué jeudi matin la police de la province du Manitoba (centre), en raison d'une manifestation impliquant un "grand nombre de véhicules et d'équipements agricoles" à Emerson. Cet axe relie le Manitoba au Dakota du Nord.
Les manifestants ont en effet décidé de frapper maintenant l'économie en paralysant certaines voies commerciales essentielles. Plusieurs usines des constructeurs automobiles Ford, Stellantis et Toyota en Amérique du Nord ont dû temporairement fermer ou fonctionner à capacité réduite en raison des blocages.
Comme la veille, le Premier ministre Justin Trudeau a redemandé la fin des manifestations: "il est temps que cela finisse car cela fait mal aux Canadiens", ajoutant qu'il travaillait avec les provinces pour sortir de cette impasse.
Estimant que la situation représentait une "crise nationale", le maire de la ville de Windsor Drew Dilkens a annoncé son intention d'"expulser" les manifestants "pour permettre le mouvement sûr et efficace des marchandises à travers la frontière" si un tribunal le permet.
"Le préjudice économique que cette occupation cause au commerce international ne peut pas durer et doit cesser", a-t-il ajouté.
Cela "nuit aux clients, aux travailleurs de l'automobile, aux fournisseurs, aux communautés et aux entreprises des deux côtés de la frontière, qui connaissent déjà depuis deux ans des pénuries de pièces résultant du manque de semi-conducteurs dans le monde, du Covid-19 et d'autres éléments", a souligné la porte-parole de Ford.
Près de 2,5 millions de camions empruntent le pont Ambassador chaque année. Plus de 25% des marchandises exportées entre les Etats-Unis et le Canada y transitent.
"Il est impératif que les gouvernements locaux, provinciaux et nationaux du Canada désamorcent ce blocus économique", a déclaré jeudi la gouverneure du Michigan Gretchen Whitmer, les appelant à prendre "toutes les mesures nécessaires".
"Nous n'aimons pas faire d'histoires"
Le mouvement s'étend sur les routes et semblait dans une impasse dans les rues de la capitale fédérale Ottawa, a constaté une journaliste de l'AFP.
Des centaines de camions bloquent toujours les rues, installés devant le Parlement et les bureaux de Justin Trudeau, qui a qualifié mercredi ces blocages d'"inacceptables" et de menace pour l'économie.
"Vous savez que vous avez fait quelque chose de mal lorsque les Canadiens s'en indignent. Nous sommes connus pour être très pacifiques, nous n'aimons pas faire d'histoires", estime Naomi Gilman, habitante d'Ottawa d'une trentaine d'années.
Pour Ed Humphrey, tatouages dans le cou, boucle d'oreille et chapeau sur la tête, qui nettoie les rues occupées, "les gens ordinaires parlent enfin, c'est exactement ça ce mouvement!". Venu du Manitoba, cet ouvrier se réjouit "du soutien qui grandit".
Jeudi matin, la cheffe intérimaire du Parti conservateur du Canada, Candice Bergen, jusqu'ici soutien du mouvement, a appelé les manifestants à cesser leurs actions et à rentrer chez eux. "Je crois qu'il est temps de lever le blocus pour le bien de l'économie", a-t-elle déclaré au Parlement.
"Mouvement mondial"
Sur place, les protestataires regardent avec fierté le mouvement se développer ailleurs. "Nous pensions être seulement quelques centaines de camions et maintenant nous avons, quelque part, créé un mouvement mondial. C'est incroyable", s'enthousiasme Lloyd Brubacher, camionneur de l'Ontario.
En Europe, les autorités ont pris les devants: des rassemblements prévus pour la fin de semaine ont été interdits, notamment à Paris et Bruxelles.
Ce mouvement, baptisé comme au Canada "convois de la liberté", semble prendre de l'ampleur, notamment dans l'Hexagone pour protester contre le pass vaccinal.
Ses partisans se réclament des "gilets jaunes", la mobilisation populaire de 2018-2019, déclenchée par une hausse des prix de l'essence qui avait tourné à la révolte contre le président Emmanuel Macron.
En Nouvelle-Zélande, où des manifestants anti-vaccin sont rassemblés depuis trois jours près du Parlement à Wellington, des heurts ont éclaté jeudi entre la police et les manifestants. Plus de 120 personnes ont été arrêtées.
Les forces de l'ordre sont intervenues pour disperser ce rassemblement et en particulier démanteler le campement impromptu installé près du Parlement. Des centaines de campings-cars et de camions avaient bloqué mardi le quartier du Parlement à Wellington; la plupart sont partis après 24 heures, mais un noyau dur est resté, déterminé à s'y maintenir "aussi longtemps que nécessaire".
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