"Oh des pogs !", s'étonne un client du magasin Joué Club à Mondeville. Les plus nostalgiques verront l'image de ces fameux objets leur revenir en tête : des ronds de carton ou de plastique, marqués d'un logo, symbole ou personnage sur l'une des faces. Dans les années 90, les écoliers s'affrontaient pour les retourner et remporter ceux de leurs adversaires. Trente ans plus tard, ces jouets refont leur apparition dans les rayons des magasins. Il faut dire que les jouets vintage ont la cote. "Les parents ont envie de transmettre, constate Florian Lévêque, le gérant de la boutique de jouets. Ils veulent faire connaître à leurs enfants les jeux de leur époque."
Les consoles vintage à l'honneur
Au milieu des jouets toujours plus innovants et électroniques, se cachent quelques pépites qui refont surface. Parmi les plus plébiscités : les cartes Pokémon, à tel point que le gérant a apposé une affichette à l'entrée pour restreindre le nombre de paquets par client. Ce phénomène s'est notamment accentué avec la sortie des jeux sur la nouvelle console Nintendo Switch, pourtant de nombreux jeunes ne recherchent pas ces nouveautés. "Il y a une grosse tendance sur le retrogaming auprès des jeunes de 14, 15 ans. En une semaine, j'ai vendu toutes les consoles retro de la boutique", confie Hervé Marguin, gérant du magasin Game and Geek de Caen. Ici, les stars des vitrines sont les consoles des années 80, 90, 2000, comme l'Atari ou la Nintendo NES. "Les jeux de maintenant sont beaucoup plus faciles et plus cloisonnés." Pour le gérant, les jeux vidéo des anciennes consoles sont des cadeaux prisés : "Il y a des cotes différentes en fonction de ceux recherchés ou non. Ça permet d'offrir quelque chose de plus cher pour Noël que ce qu'on aurait acheté le reste de l'année." La gamme rétro représente la moitié de ses ventes.
"On retrouve les objets de notre enfance"
Dans les boutiques de jouets, qui se trouvent dans le moment crucial de leur année en termes de ventes, les références qui rappelleront des souvenirs aux adultes venus jouer les pères Noël sont nombreuses. Qui n'a pas connu ou possédé une peluche Monchichi ? Petit singe doux et souriant, plus connu à l'époque sous le nom de Kiki. "Ce sont des produits qui avaient disparu des rayons et qui reviennent en force. Ces objets sont générationnels. Nous les avions quand on était enfant. J'ai 50 ans, donc c'était il y a longtemps", se remémore Stéphane Baglin, chef de secteur chez PicWicToys, dans le centre commercial Mondeville 2. D'autres acheteurs vont privilégier pour leurs enfants des jouets en bois : "Ceux qu'on pousse, qu'on traîne, qu'on tire sans électronique. Il y a un retour des jeux plus naturels et responsables."
La marque Playmobil a, elle, lancé des produits en reprenant des thématiques de séries ou films des années 80 : Retour vers le futur, Ghostbusters, L'Agence tous risques, Scooby Doo… "Ça marche bien parce que ce n'est pas forcément destiné aux enfants. Il y a une tendance qui se dessine actuellement de l'ado-adulte qui achète des jouets pour se faire plaisir aussi bien sur des figurines, du jeu ou des cartes à collectionner."
"Les gens aiment le vintage car il y a un phénomène de nostalgie"
Joël Brée est professeur à l'université de Caen et à l''ESSCA, école de Management.
Joël Brée est professeur à l'université de Caen et à l''ESSCA, école de management. Il dirige le NIMEC, Normandie innovation entreprise consommation, un laboratoire des sciences de gestion.
Qu'est-ce que le vintage ?
"Ça regroupe un ensemble de choses qui fait référence à des produits anciens qu'on remet au goût du jour, comme avec les produits d'occasion. Ça peut être également des produits anciens qu'on refabrique en l'état, comme les vinyles ou bien des produits anciens réactualisés, comme les voitures."
Pourquoi cela revient-il à la mode ?
"Les gens achètent des choses vintage dans une optique d'utilisation ou de décoration. Un phénomène de nostalgie est au cœur du vintage. Ça peut être lié à notre histoire personnelle ou à un phénomène collectif. Dans le domaine de la consommation, plus on est dans un environnement anxiogène, plus on a besoin de se replonger dans un passé idéalisé, sorte d'âge d'or, de cocon. On va avoir une relation sélective avec ce cocon : on ne garde que le meilleur."
Les modes de consommation
ont-ils changé ?
"Il y a 20 ans, imaginer de ne pas acheter des meubles et produits neufs, c'était presque quelque chose d'humiliant. Grâce à Internet on a vu des sites comme eBay, Rakuten se développer et désormais, c'est soit une sorte de jeux, ce qu'on appelle le 'smart shopping', d'acheter un produit d'occasion en très bon état et à un prix bas, soit un acte citoyen en redonnant une seconde vie à un produit."
Vêtements vintage : à offrir ou pour soi
Pour les fêtes, les vêtements vintage ont la cote, que ce soit pour offrir à ses proches ou pour soi-même.
Les robes à sequins, jupes à paillettes et autres costumes de soirée sont de sortie dans la plupart des magasins de prêt-à-porter à quelques jours des fêtes. Les boutiques vintage ne dérogent pas à la règle. "Je me suis fait dévaliser mon stock", sourit Léa Valmy, la responsable du magasin Mad Vintage, spécialisé dans la seconde main, situé dans le centre-ville de Caen.
Tenues de fêtes
"Mon chiffre d'affaires double à la période des fêtes" et parmi les ventes qui marchent : celles qui se trouvent à l'entrée du magasin dédiée à Noël et au soir du 31 décembre. "Les clients veulent avoir des pièces uniques et de qualité à moindre coût." Si certains se risquent à offrir des vêtements vintage à Noël, d'autres préfèrent les garder pour eux. "Avec la fin d'année qui approche, mes 'top' ventes sont les habits à sequins ou les chemises pour les hommes."
La boutique propose aussi des accessoires : "Les lunettes, cravates, chapeaux ou même les cartes cadeaux partent à bien en cette période pour offrir."
Dans le magasin Zazavintage, Josiane Rousoux vend des vêtements et accessoires des années 40 à 90. Elle aussi, remarque que le vintage a la cote en ce moment. "J'ai deux périodes qui marchent vraiment bien : le 6 juin car les gens recherchent des tenues des années 40, et Noël." Pour la gérante depuis sept ans, "les gens recherchent des choses raffinées comme des boutons de manchettes".
Vinyles, déco… Les cadeaux pour adultes
Pour les fêtes de fin d'année, le père Noël opte de plus en plus pour des cadeaux vintage.
De Téléphone à Queen en passant par Orelsan, Vianney ou Amel Bent, qu'importe l'époque. Désormais, rares sont les chanteurs ou groupes qui ne sortent pas leur album sur vinyle. Depuis quelque temps, ce format est partout, et ce n'est pas Alain Lalleman, patron de Sonic Records, qui vend des vinyles, CD ou DVD dans le centre-ville de Caen, qui dira le contraire. "Ça fait sept, huit ans que ça monte. Le vinyle, c'est une autre écoute : ça a un son plus dynamique, une certaine rondeur. De plus en plus de jeunes en achètent." Un constat réalisé aussi par Gilles Ferrand, gérant depuis 30 ans d'Espace Disc. "C'est surtout les 18-30 ans qui en achètent. Ils aiment surtout l'objet vintage, la grosse pochette et l'histoire qu'il peut y avoir derrière. Les disques sont souvent plus âgés qu'eux", sourit le disquaire. Pour Noël, c'est un cadeau qui sera, à n'en pas douter, au pied du sapin : "Le mois dernier, le vinyle a représenté 50 % de mes ventes, contre 20-30 % le reste de l'année. L'an dernier pour les fêtes, ça avait très bien marché."
"Avec le vinyle, le grain
est différent et j'aime l'idée
d'avoir des vieilles choses"
À la Fnac, le rayon dédié aux 33 et 45 tours ne cesse de s'agrandir et, pour les fêtes, cela reste un cadeau de choix : "J'en cherche un à offrir à mon père, indique Lucie Saint-Georges, une cliente, la tête dans les bacs remplis de vinyles de groupes de rock. Ça m'arrive de m'en acheter, c'est un très bel objet de déco et c'est agréable d'avoir quelque chose de physique pour écouter de la musique." Dans le rayon ce jour-là, la majorité des acheteurs ont une vingtaine d'années, à l'image d'Angèle Lebosey et Salomé Toudic, qui "regardent par curiosité" les albums disponibles. "J'ai commencé à écouter des musiques sur vinyles car mes parents en avaient beaucoup. Le grain est différent, et j'aime l'idée d'avoir des vieilles choses", explique Angèle.
Des 'vieilles choses', on en trouve aussi à la librairie ancienne et moderne Frérot à Caen. Livres d'occasions, plus disponibles en stock ou anciens se trouvent ici. Même si Arnaud Mignot, qui travaille ici depuis 10 ans, ne remarque pas une recrudescence d'achats à la période des fêtes, il concède que certaines personnes "recherchent parfois les livres de leur enfance. Chaque génération a envie de partager ce qu'elle a connu avec ses enfants, petits-enfants. C'est une sorte de Madeleine de Proust à retrouver."
La déco est aussi tendance au pied de l'arbre de Noël. Bocaux en verre, curiosités, vaisselle, bibelots… Les petits objets sont particulièrement recherchés : "On voit une affluence en ce moment sur notre site internet", confie Hugo Guérin, co-gérant de Bits and Bobs, brocante en ligne implantée à Caen. Les dames-jeannes, bombonnes de verres, sont plébiscitées dans les brocantes mais font aussi leur apparition dans de nombreux magasins de décoration moderne.
Les accessoires de mode vintage peuvent eux aussi atterrir dans la hotte du père Noël : "Les gens recherchent de l'authenticité, des objets qui ont une vie, témoigne Josiane Rousoux, qui tient la boutique de vêtements et accessoires Zazavintage. Pour certaines pièces, j'ai des anecdotes à raconter aux clients, et c'est ce qu'ils recherchent."
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