Un appartement à deux pas de la cathédrale de Rouen, en plein centre-ville historique, une localisation qui fait rêver certains. Pourtant, "nous observons un taux de rotation important dans les logements en location alors que le marché est tendu", souligne Amèle Mansouri, adjointe au maire de Rouen en charge du logement, de l'hygiène et de la salubrité. Elle pointe des appartements parfois trop anciens qui manquent d'entretien et loués à des prix élevés. "Nous devons nous assurer de la salubrité d'un logement et de la sécurité des occupants", poursuit celle qui est aussi avocate de profession. Elle pointe de trop nombreux drames survenus ces derniers mois, avec des incendies dans des immeubles du centre-ville, comme à la fin septembre dans la rue Caron, avec une famille évacuée en pleine nuit.
D'où la mise en place, depuis le 1er octobre, du permis de louer à Rouen. "Un outil parmi d'autres dans la lutte contre l'habitat insalubre", affirme Djoudé Mérabet, le maire d'Elbeuf, qui a été le premier dans la Métropole à appliquer ce dispositif. Sa commune, classée Ville et pays d'art et d'histoire, fait aussi face à des logements dégradés en plein centre-ville et au taux de vacance des logements le plus élevé du territoire (18,5 %).
"Nous faisons passer
des messages aux propriétaires,
en multipliant les opérations"
La cible prioritaire : le quartier République à Elbeuf. Djoudé Mérabet a fait de la transformation de ce secteur l'un de ses projets de mandat. Le quartier cumule les opérations de rénovation de logements, de réfection des façades et de réaménagement urbain dans les alentours. "Nous faisons passer des messages aux propriétaires, en multipliant les opérations, nous montrons que nous sommes présents", ajoute le maire d'Elbeuf. Pour lutter contre ces appartements qui sont laissés sans occupants face au manque d'attrait, la Ville d'Elbeuf applique une taxe sur les logements vacants. "Nous sommes à 600 logements qui sont taxés. À un moment, les propriétaires sont cernés et doivent réaliser des travaux pour remettre leur bien en location", plaide Djoudé Mérabet.
Des propriétaires pas convaincus
Autant de mesures qui ne plaisent pas forcément aux premiers concernés : "À force de demander toujours plus aux propriétaires, il y en a un certain nombre qui se lassent car la mise aux normes représente un surcoût", explique Jean-Baptiste Launey, à la tête des cabinets immobiliers Leroux et Cramilly à Rouen et trésorier de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) de la Seine-Maritime. Amèle Mansouri tempère ces reproches en rappelant les aides à la rénovation qui existent et souligne qu'à long terme, "il s'agit de valoriser le parc privé et donc le territoire permettant de développer son attractivité". Un effort collectif pour les cœurs historiques des villes de la Métropole qui reste encore difficile à impulser.
"Il faut faire de la pédagogie envers les locataires comme les propriétaires"
Karim Belhaj, le directeur de l'Adil de la Seine-Maritime, revient sur la mise en place du permis de louer dans la Métropole de Rouen. Il adresse ses conseils aux locataires comme aux propriétaires.
L'Agence départementale pour l'information sur le logement (Adil) de la Seine-Maritime mène des missions d'information et d'accompagnement face à l'habitat dégradé.
Quels conseils donner aux locataires pour s'assurer de l'état d'un logement ?
Il faut être vigilant malgré la crainte, de la part des locataires, d'un certain rapport de force face à un propriétaire. Le mieux est de s'appuyer sur la loi qui définit ce qu'est un logement décent et de s'appuyer sur ces critères pour s'aider.
Quelle voie de recours face à
un appartement dans un état dégradé ?
Nous pouvons accompagner des locataires de la phase de conseils jusqu'au judiciaire. Nous avons beaucoup de personnes vulnérables à qui il faut expliquer leurs droits face à des propriétaires. L'an dernier, nous avons accompagné 120 ménages et nous avons mené, avec le parquet de Rouen, une quinzaine de procédures devant la justice pour obtenir des dédommagements financiers.
Quels sont les motifs de signalements sur les logements dégradés ?
Il s'agit, dans 80 % des cas, de problème de non-décence, avec des soucis à régler que ce soit auprès de propriétaires privés que de bailleurs sociaux. Nous arrivons généralement à les accompagner pour que les travaux soient réalisés. Il y a ensuite des problèmes plus graves, d'insalubrités ou de péril, avec là une procédure plus lourde.
Pratique. 86 rue Léon-Blum à Sotteville-lès-Rouen. Tel. 02 35 72 58 50
Des aides à faire connaître auprès des propriétaires
Alors que des dispositions comme le permis de louer sont mises en place dans la Métropole de Rouen pour lutter contre l'habitat dégradé, les propriétaires demandent un accès plus facile aux différentes subventions proposées sur le territoire.
"Il faudrait une sorte de guichet unique", imagine Karim Belhaj, directeur de l'Agence départementale pour l'information sur le logement de la Seine-Maritime. Son association reçoit de nombreux propriétaires "à qui il faut expliquer les subventions auxquelles ils ont le droit auprès de différents acteurs qui ne sont pas toujours facilement joignables".
Même constat dressé par l'Union nationale des propriétaires immobiliers de la Seine-Maritime et son président, Jacques Delestre : "Pour connaître les aides possibles, un propriétaire peut venir nous voir", plaide-t-il en rappelant que les propriétaires ciblés par des logements dégradés ne sont pas forcément les plus aisés. "L'idée qu'être propriétaire immobilier est synonyme de richesse n'est pas une réalité", dénonce Jacques Delestre. Faire plus d'information plutôt que de la répression, c'est ce que porte aussi Amèle Mansouri, l'adjointe au maire de Rouen en charge du logement, qui souhaite "faire état de tous les dispositifs financiers pour réhabiliter un bien".
Des subventions "très importantes"
La Ville de Rouen compte ainsi passer une convention avec un partenaire afin "de faire le relais auprès des propriétaires" sur les aides à la rénovation d'un logement. "Il y a parfois des subventions très importantes, dans certains dossiers, nous avons déjà vu des travaux quasiment pris en charge à 100 %", indique Amèle Mansouri.
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