"Coucou les p'tits potes !" C'est ainsi que Morgane Yumi, influenceuse de la région, commence une de ses stories sur Instagram. Suivie par plus de 6 000 personnes sur le réseau social, la jeune femme partage "un peu tout, je parle de ce qui m'anime, comme l'estime de soi et la région Normandie". L'influenceuse, qui est avant tout graphiste, ne se verrait pas vivre des réseaux sociaux. "J'ai été un temps graphiste à mon compte et je connais l'insécurité financière que ça peut-être. De plus, en étant professionnalisée j'aurais l'impression de ne plus être authentique, de poster parce que je suis payée pour." D'ailleurs, d'après une étude de l'agence de marketing Reech, datant de 2020, une grande partie des influenceurs (38 %) ne perçoit aucun revenu de cette activité.
"Le jeu n'en valait pas la chandelle"
"J'ai eu, il n'y a pas si longtemps, une proposition de partenariat rémunéré, mais j'ai refusé. Il fallait ouvrir une micro-entreprise, mettre en place différentes choses. Le jeu n'en valait pas la chandelle", indique Morgane Yumi, qui s'est lancée sur Instagram en 2017. L'influenceuse a été approchée par une entreprise pour communiquer sur la tenue d'un événement. Quelques posts et stories, pour un peu plus de 300 euros. Pour le moment, "il y a des petites invitations, on mange gratuitement au restaurant ou on reçoit un petit cadeau, c'est un petit plus qui fait plaisir et ça me va très bien comme ça".
À Caen, Maxime Poullain, conseiller pour les professionnels dans la banque, est Maxfoodergram sur Internet. Chaque jour, il poste des recettes de cuisine en alternant entre végétarien, light et classique. Aujourd'hui, cet "instagrameur" comme il se qualifie lui-même, a une communauté de plus de 7 700 personnes. Il a d'ailleurs déjà été invité par la Région pour découvrir "l'ancienne Haute-Normandie et pour inciter à passer ses vacances en Normandie. On m'avait organisé un circuit à la rencontre de producteurs, d'un restaurant, d'une brasserie, etc." Pour ces opérations, Maxfoodergram ne touche pas d'argent. "Pour pouvoir percevoir des fonds, il faut une micro-entreprise. Si tu n'en as pas, ce qui est mon cas, c'est forcément une rémunération en bons cadeau par exemple. Je travaille de mon côté, c'est pour cela que je ne me considère pas comme influenceur, mais bien comme instagrameur." D'après la même étude citée plus haut, seuls 15 % exercent cette activité à temps plein. Pas de rémunération donc, pour ce nano-influenceur, mais des cadeaux. Maxfoodergram peut recevoir jusqu'à trois à quatre colis par semaine.
Plusieurs colis par semaine
Une marque peut, par exemple, lui envoyer gratuitement des biscuits et lui demander, s'il a apprécié, d'en parler sur ses réseaux. "La marque envoie un colis avec dix paquets de gâteaux à chacun 4 euros, ça lui revient à 40 euros et, derrière, elle peut avoir une ou deux story vu par 7 000 personnes. Le coup de com n'est pas très cher."
Ces deux influenceurs sont actuellement présents sur la Foire de Caen pour des ateliers. Là non plus, pas de rémunération, mais de la visibilité. Voilà des échanges de bons procédés.
"Le terme d'influenceur n'est pas nouveau, mais ce qui se cache derrière est flou"
Le terme d'influenceur s'est démocratisé ces vingt dernières années. Mais que traduit-il ? Boris Helleu, maître de conférences à l'Université de Caen et spécialiste des médias sociaux, livre son analyse.
Qu'est-ce qu'un influenceur ?
"On ne sait pas trop. C'est un terme fourre-tout. Cette fonction existe depuis longtemps, mais, au début des années 2000, on parlait de blogueurs puis de Youtubeurs. On considère les influenceurs comme des personnes qui peuvent modifier des opinions ou influencer des actes d'achat. C'est un créateur de contenus (photos, vidéos et textes) qui va susciter de l'interaction et de l'engagement avec les fans."
Cela se limite-t-il au nombre d'abonnés ?
"Il y a plusieurs façons de penser. Il faut une certaine communauté. Mais il faut être prudent car, avant, un influenceur se caractérisait pour son expertise dans un domaine comme le sport, le lifestyle, la mode, etc. Aujourd'hui, dans l'influence, l'expertise est parfois remplacée par la mise en avant de soi-même pour faire la promotion de sa propre marque. Depuis qu'il y a l'émergence des médias sociaux (Instagram, TikTok, Snapchat), on a recours au terme d'influenceur par facilité."
Quel est le statut d'un influenceur ?
"La majorité des influenceurs sont auto-entrepreneurs. Parfois, ils sont représentés par des agences. Très peu d'entre eux vivent de cette activité à temps plein."
Pourquoi les collectivités font-elles appel aux influenceurs ?
"Cela leur permet promouvoir et valoriser leur territoire en passant par quelqu'un de l'extérieur. En allant voir les chiffres d'engagement sur les médias sociaux, elles ont la capacité de voir si la campagne de communication a marché."
Boris Helleu est spécialiste des réseaux sociaux à l'Université de Caen. - Boris Helleu
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