Ils sont une trentaine, dont un tiers de femmes et quelques cheveux gris. Certains prennent des notes. Un auditoire attentif qui fait face à Sabrina Picard, responsable recrutement chez Siemens Gamesa en France.
Première étape du recrutement : une réunion d'information dense, où sont détaillés chaque type de poste ainsi que les contraintes horaires ou calendrier de formation à l'étranger pour les futures recrues.
Postures, routine, patience…
L'entreprise espagnole s'apprête à leur présenter les différents métiers de sa future usine du Havre, "unique au monde". Sur le quai Joannès-Couvert du Havre, à partir du premier semestre 2022, elle fabriquera des pales et assemblera des nacelles destinées à cinq parcs d'éoliennes offshore, au large des côtes françaises. La première phase de recrutement doit permettre d'embaucher les 210 pionniers de cette nouvelle ère industrielle havraise. "C'est important de partager avec vous ces informations en toute transparence", entame Sabrina Picard devant ces demandeurs d'emploi. Logistique, assemblage, drapage, moulage, traitement de surface… Pendant plus d'une heure, chaque activité de l'usine est décortiquée. "C'est un travail assez routinier, qui nécessite de garder de l'attention dans la durée", prévient Siemens pour un poste. "Il faut être patient, minutieux, avoir le souci du détail", souligne-t-on pour un autre. Derrière l'intervenante, des vidéos défilent en accéléré. Sur l'une d'elles, un opérateur chargé des finitions prépare longuement son équipement de sécurité. Sur une autre, des opérateurs de pales travaillent tantôt à genoux, tantôt en hauteur, en binôme, en trinôme.
"Pour les tests, je m'attendais à un peu plus de manuel. Ce n'était vraiment pas compliqué"
Cette réunion d'information constitue une première étape. À l'issue, les participants se positionnent sur le poste qu'ils souhaitent. Place alors à la méthode de recrutement par simulation (MRS). Car le CV des candidats n'intéresse pas Siemens Gamesa, dans un premier temps. Elle a confié à Pôle Emploi le soin d'organiser des sessions de tests pratiques, voués à vérifier leurs habiletés.
"Nous étions six, dans une ambiance assez détendue", raconte un candidat qui a passé ces tests. Pendant 1 h 30, des exercices minutés s'enchaînent. Munis de feutres et de ciseaux, les postulants doivent suivre des tracés, dans des positions parfois inconfortables. "Je m'attendais à un peu plus de manuel. Ce n'était vraiment pas compliqué", poursuit le trentenaire. Il a aussi pris part à des exercices de problèmes mathématiques, "plutôt basiques, un peu comme une recette de cuisine". Un autre candidat doute : "Je ne sais pas si j'ai réussi, je suis un peu dans le flou. Pour l'un des exercices, je n'ai pas mis les genouillères." Comme il s'y attendait, il a fallu travailler en binôme, "pour vérifier l'esprit d'équipe". Le premier est issu du secteur tertiaire, en reconversion. Le second, intérimaire, voit en l'usine d'éoliennes la perspective d'une embauche en CDI. Ils sauront dans une dizaine de jours s'ils poursuivent le processus de recrutement. Après des entretiens en avril et mai, les premiers contrats seront signés en juin.
Un précédent en Normandie
Un métier unique, pour lequel il n'existe aucune formation initiale. Pour recruter ses opérateurs de pales d'éolienne, la société LM Wind Power, à Cherbourg-en-Cotentin dans la Manche, a été confrontée à la même problématique que Siemens Gamesa.
Un turn-over plus important
En 2018, c'est donc la méthode de recrutement par simulation qui est privilégiée par cette usine, la première du genre en Normandie. "Il n'y avait pas encore de production sur place, les premiers recrutés devaient partir sur nos sites étrangers pour se former. Cela demandait un cran de motivation supplémentaire", se souvient Florence Martinez-Flores, directrice des ressources humaines. Parmi la centaine de premiers embauchés, "des profils très divers", souvent en reconversion : aide-soignante, coiffeuse, ouvrier de mareyage ou salariés de la restauration et de l'équitation… "Le recrutement basé sur les habiletés et la motivation a naturellement ouvert la porte de ces métiers techniques à plus de femmes." La moitié de ces pionniers de l'usine cherbourgeoise ont évolué en chef d'équipe ensuite. Si elle concède un possible turn-over plus important qu'avec des salariés recrutés sur la base d'une formation initiale, Florence Martinez-Flores estime cependant que "c'est moins le revers de la méthode que le fait de se projeter concrètement". Les horaires de nuit, le travail six jours sur sept ont pu en rebuter certains.
En 2021, une quatrième vague de recrutement doit permettre à LM Wind Power d'embaucher 300 personnes. L'arrivée de Siemens est-elle une concurrence pour les profils ? "J'y vois plutôt une dynamique, on est sur des métiers en croissance. Les projets de vie sont différents entre une installation à Cherbourg et une au Havre."
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