Le rendez-vous est pris chez lui, au bout d'une impasse du quartier de l'Eure, au Havre. Roberto Piazza, alias Little Bob, m'invite à traverser un petit jardin avant d'entrer dans sa maison, aménagée par sa femme. "Je ne touche à rien." La première chose qu'il me montre est la photo de Mimie, avec au pied des fleurs. Son épouse est décédée le 29 mars 2019, des suites d'un cancer. La douleur est profonde.
Des chansons pour sa femme
L'entretien commence par un café. "Moi, avec mon café, j'ai besoin d'une clope. Ça te fait pas chier ? Mais je fume pas vraiment… juste avec mon café." On commence par la sortie, le 19 mars dernier, de son dernier album We Need Hope. C'est son 23e. "Il y a deux ans, je ne me sentais pas la force de continuer. Mais deux semaines après la mort de Mimie, j'avais des concerts et on m'a poussé à les faire. Si je n'avais pas fait ces concerts, j'aurais tout arrêté. La vie pour moi, maintenant, c'est la musique et mon groupe", les Blues Bastards. Pour le plus grand plaisir de ses fans, Little Bob revient donc avec de nouveaux titres. "C'est très spécial. C'est pas la couleur habituelle." Le style est plus rock. "Beaucoup de chansons parlent de ma petite femme disparue, mais il y a des choses rigolotes. Notre vie n'était pas triste." Little Bob s'engage également sur quelques titres, comme à son habitude. "Quand tu vois des gens qui foutent rien et qui gagnent des milliards et d'autres qui sont dans la mouise. Ça me révolte !"
"On a eu l'herbe coupée sous le pied par l'arrivée de Téléphone
et Trust"
La carrière de Little Bob débute en 1974. Mais "le rock a été une évidence, tout jeune. Ça m'a explosé dans la tête." Ses parents, des commerçants italiens, ont débarqué au Havre à ses 13 ans. "Je suis arrivé boulevard Jules-Durand, au milieu des ouvriers. Mon père est d'ailleurs devenu ouvrier. On habitait un baraquement. J'ai subi le racisme. On me traitait de macaroni et de voleur (pourquoi ?). Le Havre, maintenant, c'est ma ville. Je suis italo-havrais. J'ai toujours ma carte d'identité italienne, avec une carte de séjour." Dès l'âge de 16 ans, il décide de travailler pour pouvoir acheter sa première guitare. "On allait faire des concerts à Paris, à Golf Drouot, le Temple du rock. Avec mon père, on louait un car et on y allait avec du public, pour être sûr d'en avoir." Lui qui se trouvait moche et avait peur de recevoir des canettes en montant sur scène va tout de même sauter le pas et devenir professionnel. "On est arrivés juste avant le punk. Ça marchait fort. Mais en France, on a eu l'herbe coupée sous le pied par l'arrivée de Téléphone et Trust. Ils chantaient en français. Moi, ça m'intéresse pas. Pour moi, le rock et le blues, ça a besoin de swinguer."
Mimie sa sauveuse
Fin des années 70, Little Bob enchaîne frénétiquement les concerts. "Tu sais, quand on fait 25 dates en 27 jours, on prend des choses illicites. On était obligés, coke et speed. Je suis contre les drogues, mais à cette époque, c'est ça et l'alcool qui nous faisaient tenir." Le tournant de sa carrière : Myriam. En 1986, elle accompagnait une amie sur l'un de ses concerts, à Issy-les-Moulineaux. Elle deviendra sa petite femme, sa Mimie. "Si je suis encore vivant, c'est grâce à elle. J'ai tout arrêté. Je me suis dit que la vie valait le coup d'être vécue. Elle s'est occupée de tout pour que je puisse faire uniquement ma musique."
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