Moche, sale, triste… La vision du Havre a longtemps été négative. Qu'est-ce qui explique cette mauvaise image ? Pour Jean-Baptiste Gastinne, historien et élu havrais, ce sont les bombardements de septembre 1944 qui ont détruit plus que les bâtiments de la ville. Au 19e siècle, Le Havre est en effervescence. C'est la deuxième ville de France en termes de croissance démographique. Elle passe de 20 000 habitants en 1800 à 120 000 juste avant la Première Guerre mondiale, dépassant sa rivale Rouen. La Seconde guerre mondiale est venue tout casser. "Une destruction massive, sans explication, dont on ne peut pas parler puisque le reste de la France fête la libération. On a une souffrance enfouie. Et puis, une ville nouvelle est imposée aux Havrais [l'architecture Perret]. Les gens ne s'y retrouvent pas. Ils ont presque honte et ne la valorisent pas."
"Le classement à l'UNESCO, cela a éveillé une curiosité"
Il aura fallu plus de 35 ans pour reconstruire, des immeubles Perret jusqu'au Volcan Niemeyer en 1982. Le changement d'image aura été un peu plus rapide, une quinzaine d'années. Deux temps forts auront marqué cette transformation : le classement du centre-ville au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2005 et les célébrations des 500 ans de la ville en 2017.
Le classement à l'UNESCO a été un révélateur. "C'était une audace, à l'époque, d'imaginer proposer un classement. Il n'y avait rien d'évident. Être classé, cela veut dire que ce patrimoine appartient au monde entier. Les Havrais ont, du coup, commencé à changer leur image sur la ville. Pour les regards extérieurs, cela a éveillé une curiosité." Les festivités des 500 ans du Havre ont en quelque sorte terminé la transformation. Le choix de mettre en avant des œuvres d'art contemporaines à travers toute la ville a payé. C'est une de ces œuvres qui est devenue le symbole de la ville : la Catène de Containers (Vincent Ganivet). "Le Havre s'y prête. Perret a vu grand. Il y a de l'espace pour accueillir des œuvres." Les espaces sont souvent vides dans la cité Océane. Il faut dire que les monuments et les statues historiques se font rares, à l'exception du Monument aux Morts et des statues de Bernardin Saint Pierre et Casimir Delavigne.
Le tramway
Autre marqueur du changement : le tramway, inauguré le 12 décembre 2012. L'équipement a permis de créer un lien entre la ville haute et la ville basse. Il a aussi profondément transformé l'espace public tout le long de son parcours. "La ville s'est transformée physiquement. Ce n'est pas qu'un changement d'image, sinon ça ne tiendrait pas."
La place grandissante des étudiants est tout aussi marquante. L'université du Havre a été créée en 1986 et, en 2007, la ville accueille la prestigieuse école Sciences Po. En dix ans, le nombre d'étudiants a augmenté de 21 %, pour atteindre 13 300 inscrits en septembre 2020. Autant d'ambassadeurs du Havre, c'est en tout cas ce sur quoi misent les élus.
Des points noirs subsistent
La ville du Havre n'a pas toujours une bonne image. Si sa réputation s'est nettement améliorée, des points noirs persistent.
Toujours moins d'habitants
En 2016, la Communauté urbaine (CU) du Havre Seine Métropole comptait environ 269 000 habitants, soit 20 000 de moins qu'en 1975. Même si le recul ralentit depuis 2011, l'agglomération havraise pourrait perdre 15 000 habitants supplémentaires d'ici 2040 si les tendances se poursuivent. Les jeunes actifs quittent la CU pour les territoires voisins.
Chômage important
C'est une tendance qui persiste depuis de nombreuses années. Le chômage est élevé sur le bassin d'emploi du Havre. Il était de 11 % au 3e trimestre 2020. C'est le taux de chômage le plus élevé de Normandie. À cela s'ajoute un salaire moyen plus bas que la moyenne nationale : 13,60 euros (net de l'heure) contre 14,90 euros (France, hors Mayotte).
Délinquance
Avec un peu plus de 15 800 crimes et délits (2014), le secteur du Havre se classe dans la moyenne en proportion de sa population. Mais son activité portuaire l'expose à des faits divers marquants. Les saisies de drogue peuvent être records. En 2020, les deux plus importantes saisies de Normandie ont été réalisées au Havre (1,4 tonne de cocaïne dans un conteneur, le 14 mai et 660 kilos de cocaïne, le 16 juillet). Ces deux dernières années, une quinzaine de dockers du Havre ont été victimes d'enlèvement, sur fond de trafic de drogue.
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