Le verdict des chiffres est implacable : les plus récentes estimations démographiques, publiées fin 2020 par l'Insee, confirment une baisse de la population ornaise. Plus de 7 200 habitants ont été perdus durant ces cinq dernières années. Spirale infernale depuis 2011, le solde naturel est déficitaire, avec davantage de décès que de naissances. Pour autant, tout n'est pas perdu, les élus veulent y croire : la pandémie de Covid-19, par ailleurs dramatique, pourrait permettre à l'Orne de sortir la tête de l'eau, grâce notamment à un afflux de Franciliens en mal d'espace et d'air pur.
Un an après le premier confinement, le président du Conseil départemental de l'Orne Christophe de Balorre constate que "l'an dernier, l'Éducation nationale prévoyait une baisse de 300 jeunes dans les collèges, mais à la rentrée de septembre 2020, il y en avait 50 en plus, donc de nombreuses familles se sont installées dans le département de l'Orne". Peut-être l'impact de la campagne publicitaire dénommée S'installer dans l'Orne, lancée par le Département sur Internet et par affichage dans les rues de Paris à l'été 2020, pour 150 000 €, avec des slogans comme "Partir en week-end tous les soirs, vous hésitez ?" La Région Normandie souligne pour sa part que "selon des enquêtes récentes, 75 % des Franciliens souhaitent quitter l'Île-de-France, un tiers des bureaux sont vides dans le quartier d'affaires de la Défense, où les entreprises aménagent des chambres pour accueillir un ou deux jours chaque semaine leurs salariés qui se sont installés en télétravail à la campagne". Voilà sans doute une opportunité pour faire revivre les centres-bourgs des villes moyennes. Une migration confirmée par les opérateurs téléphoniques, dont les relevés prouvent que la population ornaise a augmenté de 10 à 15 % durant le premier confinement. Le Crédit Agricole Normandie, qui représente près de la moitié des prêts immobiliers dans l'Orne, explique en avoir accordé 2 700 en 2020, pour un montant moyen de 131 851 euros, soit près de 360 millions d'euros de crédits habitat.
Coup de tête ou choix mesuré ?
"Devenez châtelain dans l'Orne pour le prix d'un studio parisien", clame une annonce publicitaire immobilière sur Internet… Mais au-delà du ras-le-bol de Paris pendant le confinement, sont-ils vraiment tous prêts à vivre isolés dans la campagne à année entière ? À tondre la pelouse chaque semaine au printemps ? Sans 5G, sans fibre optique, mais avec le cri du coq chaque matin et la boue des tracteurs sur les routes ? Ont-ils réellement les moyens de s'offrir, de restaurer et d'entretenir la longère aperçue sur Internet et dont ils rêvent dans le métro bondé, chaque soir de couvre-feu ? Et comment s'organiser professionnellement ? Un an après le début du premier confinement Covid, nous sommes allés à la rencontre des acteurs de ce changement de vie : Franciliens bien sûr, mais aussi notaires, commerçants, élus ruraux…
Et vous, comment analysez-vous l'arrivée de ces nouveaux venus aux revenus souvent confortables, qui font grimper les prix de l'immobilier ornais ?
Le regard de l'élu, convaincu que le phénomène va durer
Selon Jean-Claude Lenoir, la pandémie de Covid-19 a été un accélérateur. Mais l'arrivée massive de Franciliens répond aussi à d'autres critères.
Jean-Claude Lenoir a été maire de Mortagne-au-Perche, conseiller général, régional, député, sénateur. Il est président de la communauté de communes du bassin de Mortagne et président du Pays du Perche ornais. "On voyait bien depuis quelques années certains résidents secondaires venir plus que pour des week-ends", explique-t-il. Mais la Covid a été une accélération brutale. "Outre la pandémie, c'est aussi le coût de la vie en région parisienne : immobilier, nourriture, le temps perdu dans les transports. Et puis, les gens cherchent des territoires tranquilles, loin des rixes." Les bourgs ruraux étaient-ils prêts à ça ? "Dans le cadre du Pays du Perche, on a un programme qui permet de subventionner à hauteur de 30 % les rénovations, mises aux normes, transformations d'intérieurs, de devantures", explique l'élu. "Il y a de la demande, j'en ai déjà signé plusieurs." Le service urbanisme, basé à Mortagne, dénombre +30 % de demandes de permis de construire en 2020, pour des constructions, des rénovations ou des agrandissements. Une situation éphémère ou durable ? "J'en suis convaincu, ce mouvement n'est pas près de retomber. Les élus, nous recevons des personnes qui cherchent à s'établir ici tout en gardant un pied à Paris, en temps partagé. Souvent un très large week-end dans le Perche et trois ou quatre jours à Paris. J'en croise et j'en entends des nouveaux tous les samedis sur le marché de Mortagne."
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.