Selon le députée LREM Caroline Abadie, "tous les groupes sont d'accord sur l'objectif final du texte” : combattre l'islamisme politique qualifié de “séparatisme” par le président Macron. Mais si tous sont d'accord pour ce combat, pourquoi y a-t-il 2 650 amendements ? Et pourquoi les leaders d'opposition - de droite et de gauche - sont-ils aussi critiques envers ce projet de loi, repensé et remanié depuis des mois par l'exécutif ?
Tel qu'il se présente maintenant, le texte veut obliger tous les courants politiques et spirituels à affirmer, ou confirmer, leur “respect des principes de la République”. La future loi poursuit des objectifs variés et complémentaires : défendre la neutralité du service public, assurer la transparence des cultes et de leur financement, punir les messages de haine sur les réseaux sociaux, surveiller l'instruction d'enfants à la maison, ou proscrire la polygamie, les mariages forcés, les certificats de virginité…
“On a beaucoup mûri ce texte. Les mesures finales sont très fortes contre ceux qui rejettent les lois de la République, mais proportionnées. On a veillé à ce qu'elles ne soient pas attentatoires aux libertés”, assure l'un des rapporteurs : le député LREM Sacha Houlié. Et Caroline Abadie souligne que le projet ne parle pas du voile islamique pour éviter tout “amalgame” : “Il y avait un risque de blesser nos concitoyens de confession musulmane avec des polémiques stériles”, estime-t-elle.
Plus faible que le discours des Mureaux ?
La droite n'est pas de cet avis. Elle accuse le texte d'englober toutes les religions pour ne pas viser explicitement l'islamisme, “pourtant seul à poser un problème”. Sur les bancs de LR à l'Assemblée nationale, on affirme que l'affaiblissement progressif du projet de loi finit par “annuler le discours des Mureaux”, dans lequel Emmanuel Macron, le 2 octobre 2020, annonçait un texte de choc contre les islamistes radicaux : “Sur nos reculs, nos lâchetés, ils ont construit méthodiquement leur projet”, avait déclaré le chef de l'Etat.
Renchérissant sur LR, le Rassemblement national a présenté le 29 janvier la version lepéniste d'un combat contre le séparatisme : expulsion des “étrangers islamistes” ; interdiction dans l'espace public tout entier des “tenues islamistes” comme le voile ; neutralité religieuse dans les entreprises ; retrait de la nationalité pour les auteurs de crimes ou délits liés à l'islamisme… Mais “il ne s'agit pas de s'en prendre à la liberté de conscience”, assure l'eurodéputé RN auteur de ce projet : l'ex-magistrat Jean-Paul Garraud.
Un projet “discriminant”
et “liberticide” ?
Arguments contraires à gauche, où les Insoumis attaquent eux aussi le projet gouvernemental. Le député Eric Coquerel, porte-parole habituel du parti, accuse ce texte de trois défauts majeurs : il serait à son avis “discriminant contre les musulmans” tout en ne les désignant pas franchement. Il serait “concordataire”, car “l'Etat n'a pas à se mêler de religion” selon la loi fondatrice de 1905. Et il serait “liberticide”, dans la mesure où il étend la faculté de dissoudre des associations...
Le gouvernement a devant lui un chantier tumultueux, s'il veut que sa loi “fasse l'objet de la plus large unité nationale à l'Assemblée et au Sénat”, selon la formule idéale soufflée par Matignon aux élus macronistes. Qui ont dû surmonter eux-mêmes leurs propres divisions sur ce sujet, décidément l'un des plus clivants aujourd'hui pour la classe politique.
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