"Silence. Essuyez vos pieds, SVP." L'injonction est toujours lisible en lettrage art-déco sur l'un des murs du Normandy. Depuis trente ans, plus aucun son ne résonne cependant dans le théâtre du Havre. Mais cela pourrait très vite changer.
Le silence a envahi le Normandy en 1991, à sa fermeture.
Pour faciliter les travaux,
le bâtiment modélisé en 3D
Depuis deux mois, la fratrie Spahija entreprend de redonner vie à ce haut lieu du music-hall, bâti en 1933. "Mes parents l'ont acheté en 1999, ils ont craqué dessus", se remémore Jessy, l'un des six enfants de cette famille parisienne qui habitait à l'époque "de l'autre côté de l'eau", à Honfleur. Le temps a passé, les promoteurs intéressés ont défilé, mais aucun chantier n'a jamais vu le jour. "Mon père voulait à tout prix conserver la façade art-déco, mais elle n'est pas classée, simplement signalée aux monuments historiques. C'est ce qui a fait échouer les transactions", poursuit Jessy Spahija, qui entend aujourd'hui réaliser le rêve de son père, disparu brutalement le 30 août.
D'ici quelques jours, des échafaudages seront installés. La toiture a été mise hors d'eau, les gouttières abîmées ont été réparées. Les lambeaux de papier qui pendent au plafond font de l'endroit un théâtre fantôme. "C'est de l'isorel, une sorte de bois cartonné qui servait beaucoup à l'époque et a pris l'humidité. Mais la structure en béton est parfaitement saine", assure Jessy Spahija. L'Association de sauvetage du patrimoine havrais (ASPH) a modélisé Le Normandy et sa façade en 3D. "Les entrepreneurs vont s'en servir pour tout refaire à l'identique. Avec le décapage, les photos colorisées et une étude chromatique réalisée par l'architecte, on arrive aussi à retrouver les couleurs d'origine", poursuit le propriétaire. Le chantier est estimé à "plusieurs centaines de milliers d'euros", financés par des fonds propres, du mécénat et, il l'espère, des subventions en raison du caractère patrimonial du Normandy. Le soutien qu'elle reçoit de la population encourage la famille. "Beaucoup d'artisans nous donnent un coup de pouce, j'ai aussi reçu des conseils techniques d'un producteur de théâtre parisien", ajoute Jessy Spahija, qui attend désormais le feu vert de la municipalité pour lancer les gros travaux sur la toiture et la façade. Sur cette dernière, le passé a déjà refait surface, avec la découverte d'une mosaïque qui comporte le nom de l'architecte de l'époque, Henri Daigue. À la fin des travaux, Jessy voudrait en apposer une autre, dans le bâtiment, qui comportera le nom de ceux qui ont participé à la résurrection du Normandy et la mention : "Réhabilité à la mémoire de Korap Spahija, par ses enfants".
Reportage au Normandy
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