Tout sera allé très vite depuis l'annonce lundi par l'entreprise - cotée à l'indice vedette de la Bourse de Francfort et qui emploie environ 6.000 personnes - qu'une somme de 1,9 milliard d'euros inscrite à son bilan, et censée provenir de banques aux Philippines, n'existait en fait "très probablement" pas.
Après la démission du PDG, l'effondrement du cours de l'action et des poursuites judiciaires enclenchées, se profile désormais la menace de liquidation.
La comparaison avec le gigantesque scandale Enron au début des années 2000 s'impose de plus en plus. Le groupe d'énergie américain avait sombré après avoir maquillé ses comptes.
Insolvabilité
Wirecard a annoncé jeudi déposer le bilan devant le tribunal de commerce de Munich, là elle a son siège, en raison de "la menace d'insolvabilité et de surendettement" affectant sa maison mère.
En clair, les banques créancières qui la maintenaient sous perfusion financière ont manifestement décidé de fermer le robinet.
Elle ont le droit d'annuler des prêts de plus de deux milliards d'euros, dès lors que Wirecard n'est pas en mesure de présenter un bilan certifié pour l'année dernière.
Cette certification a été refusée par les auditeurs après la découvert du trou comptable d'1,9 milliard. Des fonds manifestement fictifs, représentant une fraude d'une ampleur inédite dans le secteur encore nouveau des paiements en ligne.
Après cette annonce, le titre Wirecard chutait à 10H40 GMT de 77% à seulement 2,82 euros, après avoir été suspendu de la cotation pendant une heure en matinée. Le titre cotait encore 101 euros mercredi dernier, juste avant le coup de semonce lancé par les auditeurs.
Wirecard étudie en outre si des filiales, comme celle en Allemagne détenant une licence bancaire, ou une autre au Royaume-Uni émettant des cartes de paiement virtuelles, devront aussi se déclarer en faillite.
La presse allemande évoque jeudi un mouvement de désertion de clients de Wirecard, de nature à aggraver sa situation financière déjà précaire.
La justice peut désormais opter pour l'ouverture d'un règlement judiciaire, pouvant permettre à la société de se restructurer, ou bien sa mise en liquidation s'il n'y a aucun espoir de reprise.
S'ajoutant aux affaires du Dieselgate chez Volkswagen ou de malversations chez Deutsche Bank, la chute de ce prestataire de services financiers sur le segment en plein boom des paiements électroniques est "un désastre complet", a tempêté en début de semaine le président du gendarme financier allemand, la BaFin, Felix Hufeld.
Son organisme a été incapable d'empêcher le scandale.
"L'Allemagne est le dernier endroit où nous aurions pu imaginer pareille situation", s'est agacé le ministre de l'Economie, Peter Altmaier, tout en appelant à "prendre des mesures énergiques" à la suite de ce scandale.
- Modèle bancal -
Dans cette affaire, "l'ensemble du système financier allemand s'est couvert de honte", juge la presse allemande, mettant en cause indistinctement les instances de contrôle, les agences de notation, les auditeurs, banques et sociétés d'investissement, qui ont brûlé des milliards de fonds confiés par des épargnants privés.
Aucun de ces acteurs ne semble s'être sérieusement penché sur le modèle économique de Wirecard qui garantit des règlements de transactions effectuées en ligne par des entreprises, telles que des compagnies aériennes, des agences de voyage ou des pharmacies en ligne, encaissant au passage une prime de risque.
Un modèle qui suscitait des rumeurs de fraude dès 2015. L'an dernier c'est le Financial Times qui évoquait des soupçons de manipulation des bilans de Wirecard, avec l'Asie comme épicentre du drame. Aucune conséquence pourtant n'en a été tirée.
Le fondateur et ancien président de la société, Markus Braun, soupçonné d'avoir "gonflé" artificiellement le bilan, a été inculpé cette semaine et laissé en liberté sous caution de 5 millions d'euros.
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