"Christophe est parti (hier, jeudi, ndlr). Malgré le dévouement sans faille des équipes soignantes, ses forces l'ont abandonné. Aujourd'hui, les mots se lézardent ... et tous les longs discours sont bel et bien futiles", ont écrit dans un communiqué transmis à l'AFP Véronique Bevilacqua, épouse du chanteur, et sa fille Lucie.
Daniel Bevilacqua, de son vrai nom, avait été hospitalisé et admis en réanimation le 26 mars dans un hôpital parisien en raison d'une "insuffisance respiratoire", selon son producteur de spectacle, Laurent Castanié. Le 10 avril, Véronique Bevilacqua indiquait à l'AFP qu'il était "hospitalisé en réanimation à Brest (...) intubé sous sédation profonde".
Mme Bevilacqua n'a jamais fait mention de la maladie Covid-19 dans ses communiqués, et, interrogée au téléphone par l'AFP dans la nuit de jeudi à vendredi, elle a souligné qu'il était décédé "des suites d'un emphysème", une maladie pulmonaire.
Le Parisien avait affirmé au moment de l'hospitalisation de Christophe que celui-ci avait été testé positif au coronavirus, ce que le producteur du chanteur n'avait pas confirmé.
"Plus que jamais les mots bleus"
L'annonce de sa mort a bouleversé le monde du spectacle. Jean-Michel Jarre, qui avait écrit les textes de deux des ses albums majeurs - et leurs morceaux phares - "Les Paradis Perdus", 1973 et "Les Mots bleus", 1974, a déclaré à l'AFP qu'il avait "perdu un membre" de sa "tribu".
"C'était plus qu'un chanteur, c'était un couturier de la chanson", développe Jean-Michel Jarre, pour qui les circonstances de ce deuil sont très douloureuses: "On ne peut pas lui dire au revoir à cause de ce putain de virus".
"Avec la disparition de Christophe, la chanson française perd une part de son âme, mais le bleu doux-amer de ses chansons est indélébile", a twitté le ministre de la Culture, Franck Riester.
"Le dernier des Bevilacqua est parti rejoindre les paradis perdus. Merci pour ce bout de chemin inoubliable", a écrit sur Facebook Pascal Nègre, ex-PDG d'Universal Music France, en référence à deux chansons de Christophe.
"Aline", tube instantané, datait de 1965, mais le moustachu aux cheveux mi-longs était toujours dans l'air du temps et son aura incomparable intacte. Ses récents albums "Christophe, etc", volumes 1 et 2, sortis l'an passé, où il reprenait ses standards avec des interprètes de toutes générations, sont là pour le prouver.
Le casting du premier volet était solide - avec Étienne Daho, Camille, Sébastien Tellier, etc - tout comme le second, avec Arno, Laetitia Casta ou encore Jeanne Added.
Mais qui allait hériter d'"Aline" - classique absolu - pour le volume 2? Le défi en a effrayé plus d'un: "je ne vais pas donner de noms de mecs du showbiz qui m'avaient promis, mais qui n'ont pas été au bout...", confiait à l'AFP en décembre le "beau bizarre", titre de son huitième album qui le décrivait merveilleusement.
"Des beaux bas"
"Je pensais à des gens moins proches de moi, je ne voulais pas de femme, je voulais un mec, ça a duré pas mal de temps", racontait-il derrière ses lunettes à verres fumés bleus.
"C'est une fille qui, sur un bateau l'été - je fais du bateau - m'a dit +pourquoi ne pas demander à Philippe Katerine?+". "Il a dit oui tout de suite, c'est une belle rencontre", ponctuait-il, dans une posture dont lui seul avait le secret, un bras dans la manche de son blouson, l'autre dénudé.
Avec son sens de la formule, il résumait ainsi les affres de l'écriture musicale: "Je connais mes hauts et mes bas, j'ai eu des beaux bas". Infatigable, il travaillait déjà sur "un nouvel album original, 10 chansons, pas plus, qui a bien démarré aussi".
Pour parler de ses créations, celui que son amour de la vitesse avait privé de permis depuis longtemps conviait les journalistes au coeur de la nuit dans son appartement-musée, entre sa collection de juke box et sa table de poker.
"Il vivait confiné avant l'heure (rires), se souvient Jean-Michel Jarre. Quand on travaillait ensemble, on passait les nuits en studio, pendant 3-4 mois, à la recherche du son ultime".
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