Entre l'angoisse d'une dangereuse promiscuité, la peur de se signaler et les doutes sur la capacité des forces de l'ordre à intervenir rapidement, l'inquiétude plane sur les victimes, dans un pays en pleine crise sanitaire.
"Etre confiné, c'est déjà compliqué pour des gens qui s'entendent bien. Alors pour les victimes de violences conjugales, elles vont vivre un véritable calvaire", se lamente la présidente de l'UNFF (Union nationale des familles de féminicides).
"Malheureusement, je pense qu'on doit s'attendre à une recrudescence des violences conjugales et féminicides dans les prochaines semaines. On est désemparé", poursuit Sandrine Bouchait.
Quand elle a pris connaissance des mesures de confinement, Morgane Seliman, ancienne victime de violences conjugales, a tout de suite imaginé "l'enfer" de cette "prison".
"J'ai eu une pensée pour les victimes, hommes et femmes, enfermés avec leurs bourreaux. Ca doit être horrible", dit-elle. "Je me dis aussi : heureusement que je suis partie. Sinon, je serais morte vingt fois".
"Les forces de l'ordre sont mobilisées mais j'espère qu'elles seront toujours disponibles. Ça risque d'être plus compliqué. Déjà que, de base, ce n'est pas toujours ça…", souffle-t-elle.
Pour protéger les victimes de violences conjugales, Marlène Schiappa a indiqué vendredi dans un communiqué que les numéros d'écoute, les plateformes gouvernementales, l'accompagnement dans des hébergements d'urgence et les procès au pénal contre les agresseurs seraient maintenus.
Par exemple, un plan de continuité est mis en place pour le 3919, numéro national pour les femmes victimes de toute forme de violences (sexuelles, conjugales, psychologiques, etc.), a expliqué jeudi la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, rappelant elle aussi que le confinement est "un terreau propice aux violences".
Pour l'heure, ce numéro "est temporairement suspendu, le temps que l'on mette en place, le plus vite possible, le télétravail pour les écoutantes", a expliqué à l'AFP la présidente de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), qui gère la plateforme. "Le 3919 devrait normalement fonctionner lundi et si possible, un peu avant".
"Très angoissant"
"On est inquiet. On sait très bien qu'elles vont être en situation d'extrême danger en confinement", explique Françoise Brié. "Dans ces cas-là, il faut appeler les services de police et de gendarmerie".
De son côté, "la plateforme arretonslesviolences.gouv.fr ", qui permet aux victimes de violences de dialoguer avec les forces de l'ordre de manière anonyme, "reste active 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7", a souligné jeudi Mme Schiappa.
"On sent bien qu'on est dans l'inconnu. Le confinement va durer 15 jours, si ce n'est plus. C'est très angoissant", juge Liliane Daligand, présidente de Viffil SOS Femmes, association basée à Lyon et qui trouve des solutions d'hébergement à des femmes victimes de violences.
"Il faut prendre en charge les femmes en trauma qui ont besoin de déverser ce qui est trop lourd à porter. Malgré les consignes de confinement, s'il y a danger imminent, il faut partir et ne pas risquer sa vie", insiste cette médecin-psychiatre.
Le confinement, "période de grand stress" où l'on se retrouve cloîtré chez soi avec des possibilités de sortie réduites, peut également réveiller des souvenirs traumatiques chez les anciennes victimes de violences, estime Caroline De Haas, membre du collectif #NousToutes.
"J'ai reçu plusieurs témoignages de femmes qui me disent +Je suis terrorisée quand je suis enfermée. J'ai besoin de sortir+", indique-t-elle, en s'inquiétant d'une éventuelle augmentation "des cas de viols conjugaux".
Par ailleurs, "les accueils de nouvelles femmes" dans des centres d'hébergement d'urgence et "le traitement des contentieux essentiels, et notamment les affaires de violences conjugales" sont maintenus, a affirmé lundi Marlène Schiappa.
Cela concerne par exemple les "ordonnances de protection", les "présentations devant le juge d'instruction et le juge de la liberté et de la détention" et les "procédures d'urgence devant le juge civil (…) pour l'éviction du conjoint violent", avait-elle précisé dans un communiqué.
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