L'avionneur européen a réagi samedi face à une décision qu'il "regrette profondément" et qui, selon lui, "crée plus d'instabilité pour les compagnies aériennes américaines, qui souffrent déjà d'une pénurie d'appareils", du fait notamment des interdictions de vol qui frappent les 737 MAX de son concurrent Boeing.
"Nous prenons acte de l'annonce en provenance des Etats-Unis", a déclaré de son côté une porte-parole du ministère de l'Economie allemand, contacté par l'AFP. "Notre position de base est claire: nous rejetons toute augmentation unilatérale des taxes douanières, dommageables pour tous, y compris aux Etats-Unis".
Les ministres européens, qui ont plusieurs réunions prévues lundi à Bruxelles, pourraient en profiter pour exprimer une position commune sur le sujet.
Depuis octobre, en représailles aux subventions à l'avionneur européen Airbus, le gouvernement américain inflige des tarifs douaniers punitifs à 7,5 milliards de dollars de produits importés (dont le vin, le fromage, le café, les olives et les anoraks) à hauteur de 25%. Mais jusqu'ici, les avions étaient taxés à 10%. Ce sera 15% à partir du 18 mars.
Au conflit vieux de 15 ans qui oppose Airbus à Boeing par le biais de leurs Etats, s'ajoutent les tensions commerciales entre Washington et Bruxelles.
Du coup, à chaque nouvelle décision, les différents secteurs concernés retiennent leur souffle, dans l'espoir que leur catégorie soit retirée de la liste et dans la crainte que les tarifs ne soient augmentés, à l'image du Distiller Spirits Council, une association professionnelle américaine qui estimait vendredi que "l'industrie des boissons spiritueuses des deux côtés de l'Atlantique a suffisamment souffert" de ces hausses.
Négociations
Mais le président américain, Donald Trump, utilise aussi ces taxes comme instrument de négociation.
Après des mois de guerre commerciale avec la Chine, à coups de tarifs douaniers punitifs réciproques, il s'est exclamé: "notre stratégie a payé!" quand les deux pays ont signé un accord mi-janvier.
Son attention se porte maintenant sur l'Europe. Donald Trump et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ont annoncé fin janvier, après une rencontre à Davos (Suisse), leur volonté de relancer le chantier commercial transatlantique et de conclure un accord dans les prochaines semaines.
Mais pour l'heure, les négociations n'ont pas abouti et les relations restent tendues alors que l'hôte de la Maison Blanche brandit toujours la menace de taxer les importations de voitures européennes, qui fait trembler en particulier les industriels allemands.
Lundi, il a déclaré qu'il était temps de négocier "très sérieusement" un accord commercial avec l'Union européenne. Il souhaite que les pays membres de l'UE ouvrent davantage leur marché aux produits américains, notamment agricoles.
Récemment, son administration a menacé de surtaxer "jusqu'à 100%" l'équivalent de 2,4 milliards de dollars de produits français. De quoi faire frémir les producteurs, mais aussi les importateurs américains de vin français qui, dans une lettre à l'USTR (Bureau du représentant américain au commerce), ont chiffré de 11.200 à 78.600 les pertes d'emplois aux Etats-Unis si ces menaces étaient mises à exécution.
"Frustration"
Les viticulteurs français réclament de leur côté au gouvernement français un fonds de compensation à hauteur de 300 millions d'euros pour les dédommager.
"Je comprends leur profonde frustration d'être pris en otage", a réagi Guillaume Faury, le patron d'Airbus, lors d'une conférence de presse à Toulouse jeudi. Mais "s'en prendre à Airbus, c'est méconnaître la situation de relation de bloc contre bloc dans laquelle nous nous trouvons (...) je pense que ce n'est pas la bonne solution", a-t-il affirmé.
L'avionneur a rencontré vendredi, à son siège toulousain, les représentants de la filière viticole française "dans le but d'établir une stratégie partagée et solidaire" et de "définir des actions communes d'urgence auprès de l'Etat français ainsi que de l'UE dans les prochains jours", selon une déclaration commune publiée samedi.
En octobre, après 15 ans de bataille judiciaire, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) avait autorisé Washington à prendre des sanctions record, jugeant que le constructeur aéronautique européen avait bien bénéficié de subventions indues.
Dans une procédure miroir, l'OMC devrait au printemps autoriser l'UE à imposer, elle aussi, des droits de douane en réaction à des subventions indues versées par le gouvernement américain à Boeing.
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