Le Caennais Michel Onfray publie Grandeur du petit peuple, aux éditions Albin Michel.
Est-ce un bilan ou un point d'étape ?
"J'aimerais que ce ne soit qu'un point d'étape. J'ai commencé ce livre car je trouvais qu'il y avait une grande dignité dans la révolte des Gilets jaunes, sans savoir où ça allait aller. Tout a été fait pour les discréditer : l'insulte, la récupération par la droite, la gauche, les black-blocks, les syndicats, les casseurs… Le mouvement s'est épuisé. Mais épuisé ne veut pas dire mort. C'est toujours comme ça dans les révolutions."
Êtes-vous un observateur ou un soutien ?
"Les deux. J'ai pu dire, parfois, que je n'étais pas content : quand on insulte le peuple juif, quand il y a des violences physiques, des dégradations. Mais je suis content quand je vois des gens modestes, simples et dignes, dire qu'ils existent. Le monde des bistrots, qui chasse ou qui pêche, des provinciaux, modestes, parfois au chômage, miséreux… Ce sont aussi des gens qui ne vont pas forcément voter ou qui votent n'importe quoi ou n'importe comment, qui sont un peu désespérés. J'ai de la sympathie pour ce petit peuple-là et j'ai voulu raconter leur chronique."
Vous avez échangé avec les Gilets jaunes de Caen ?
"J'en ai rencontré, je suis toujours en relation avec certains. J'y ai découvert une véritable intelligence. Une intelligence sauvage car ça part dans tous les sens, mais en même temps, il y avait une belle volonté, une belle vitalité. Et une dépression terrible. C'est très intéressant. J'ai vu ensuite comment ça a pu être récupéré, on a vu des drapeaux de partis, de syndicats. À partir de ce moment-là, ça a contribué à l'épuisement."
La lutte pour les retraites
peut-elle relancer le mouvement ?
"Les manifestants qui défilent contre la réforme, c'est le prolétariat. Les Gilets jaunes, c'est le sous-prolétariat. Ce n'est pas la même chose. Les prolétaires ont quelque chose à perdre : ils veulent travailler dignement, être bien payés, avoir des augmentations… Ils ont des hommes politiques, des syndicalistes pour les représenter. Les sous-prolétaires ne possèdent rien : ils n'ont même pas de salaire ou très peu, n'auront pas de retraites. Ils n'ont rien ni personne pour les représenter."
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