Le président français et ses cinq alliés du G5 Sahel - Roch Marc Christian Kaboré (Burkina), Ibrahim Boubacar Keïta (Mali), Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani (Mauritanie), Mahamadou Issoufou (Niger) et Idriss Déby Itno (Tchad) - étaient réunis lundi au château de Pau, ville du sud-ouest de la France endeuillée par la perte de sept de ses militaires au Mali.
Avant le début du sommet, ouvert vers 17H00 (16H00 GMT) au pied des massifs pyrénéens enneigés, les six chefs d'Etat ont déposé des couronnes fleuries en hommage à ces militaires qui comptaient parmi les 13 victimes d'une collision de deux hélicoptères fin novembre et appartenaient tous au 5e régiment d'hélicoptères de combat de Pau.
Sinistre rappel de la détérioration de la situation sécuritaire, ce sommet se tient au lendemain de l'annonce des pires pertes subies par l'armée nigérienne jeudi dans une attaque jihadiste: 89 soldats tués, dans le camp de Chinégodar, près du Mali. "Le président Issoufou s'est recueilli sur les tombes des soldats tués, peu avant de s'envoler pour Pau", a rapporté la présidence nigérienne.
Les dirigeants du G5 Sahel avaient été conviés abruptement à Pau début décembre par le président français, irrité par les critiques de leurs opinions publiques contre les 4.500 soldats français de la force Barkhane et des déclarations jugées ambiguës de certains de leurs ministres.
En lançant cette invitation, perçue comme une "convocation" par certains présidents sahéliens, Emmanuel Macron avait averti qu'il mettrait toutes les options sur la table, y compris celle d'un retrait. Mal engagée, la rencontre avait été reportée d'un mois en raison d'un sanglant attentat au Niger.
Ce délai et la multiplication des attaques de plus en plus violentes dans la zone ont semble-t-il atténué les tensions avec Paris, même si le sentiment antifrançais reste une réalité, en particulier au Mali. Vendredi, un millier de personnes ont encore manifesté à Bamako pour réclamer le départ des troupes françaises et étrangères.
Afin de "relégitimiser" sa présence, Paris veut avant tout obtenir à Pau une déclaration commune des cinq pays qui soulignera que la France agit à la demande de ses dirigeants, a souligné la présidence française.
"Il faut tout d'abord obtenir des responsables politiques une position nette sur ce qu'ils souhaitent ou pas", a tranché la ministre des Armées, Florence Parly, samedi.
Appel aux Européens
"La rencontre sera décisive, en ce qu'elle permettra de mettre sur la table toutes les questions, tous les griefs, toutes les solutions", avait jugé le président malien début janvier.
"Pau pour briser le pot-pourri des malentendus", a titré lundi le journal burkinabè, L'Observateur Paalga, appelant Paris et ses partenaires africains à dissiper "les incompréhensions qui pèsent sur leur alliance dans la lutte contre le terrorisme".
Outre son volet politique, le sommet de Pau vise aussi à revoir la stratégie militaire contre les jihadistes dans cette zone aussi vaste que l'Europe et appeler à une participation accrue des alliés internationaux, surtout européens.
Le sommet doit ainsi être suivi d'un dîner de travail auquel se joindront le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki, et le président du Conseil européen, Charles Michel.
Paris espère que le sommet de Pau convaincra des Européens réticents, favorables à la lutte contre les jihadistes dans la région mais inquiets de voir la France critiquée. La France est notamment en train de mettre sur pied une opération baptisée "Tacouba", réunissant des forces spéciales d'une dizaine de pays européens.
Ce renfort apparaît d'autant plus nécessaire que Washington vient d'annoncer son intention de réduire la présence militaire américaine en Afrique, un engagement jugé pourtant "crucial" par Paris. Les Américains fournissent "des capacités critiques de surveillance, de ravitaillement en vol (...) difficiles à retrouver chez d'autres partenaires", relevait la présidence française avant l'annonce de Washington.
Car le sang ne cesse de couler dans cette zone sahélienne semi-désertique, devenue depuis 2012 le terrain d'action de plusieurs groupes jihadistes, pour certains affiliés à Al-Qaïda ou à l'État islamique. Selon l'ONU, plus de 4.000 personnes ont été tuées dans des attaques terroristes en 2019 au Burkina Faso, au Mali et au Niger.
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