"Je vais devoir tirer 8 mois de plus"
Monique Betat, 58 ans, militante CFDT originaire des Landes, portant dans le cortège parisien une pancarte "T'es des sixties? Mauvaise surprise!":
"Je suis au régime de la MSA (Mutualité sociale agricole) car je travaille dans une entreprise agroalimentaire. Normalement je pouvais partir à 62 ans, mais là je vais devoir tirer 8 mois de plus! Vous allez me dire +8 mois, qu'est-ce que c'est dans une vie? Pas grand-chose+. Mais c'est complètement injuste, et je me bats aussi pour tous les camarades."
"On est tous perdants"
Emmanuel Dehu, 52 ans, infirmier à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris:
"Le gros problème (...) c'est la retraite à points, sachant qu'en étant infirmier on commence environ à 1.600 euros pour finir à 2.700. Ca risque de faire autour de 250-300 euros en moins par mois, en travaillant encore plus... Même si je suis né avant 1975, on est tous perdants. J'ai des enfants qui vont rentrer dans le monde du travail très tard, et dans une précarité qui dure assez longtemps."
"C'est le flou"
Guillaume, 31 ans, professeur d'anglais dans un lycée de Marseille, adhérent Unsa:
"Je n'ai pas l'habitude de manifester, c'est contre ma nature, mais quand un syndicat comme l'Unsa, réformiste, appelle à la grève je me dis que l'heure est grave.
Ils ne nous disent pas ce que cette réforme implique, c'est le flou (...). Le gouvernement nous dit qu'il veut envoyer un signal pour plus d'égalité mais c'est quoi un signal? On est dans la com' une fois de plus.
J'ai vécu dans un pays anglo-saxon où les conditions de travail sont moins bonnes, où la retraite est par capitalisation. Je ne défends pas ce modèle, mais là-bas les choses sont claires au moins.
Être transparent c'est dire +voilà notre réforme+, montrer, dire les points négatifs de ce changement sans essayer de cacher les choses."
"On va perdre de l'argent"
Bruno Fady, 59 ans, directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) à Avignon, drapeau CGT à la main dans la manifestation marseillaise:
"On nous dit que ce sera un système plus juste mais c'est faux. Augmentons les salaires des plus pauvres pour augmenter leurs futures retraites.
Les calculateurs de tous les syndicats disent la même chose: on va perdre de l'argent. Le futur système ne prend pas plus en compte les à-coups de carrière et les débuts de carrière avec des salaires très bas.
J'ai commencé à travailler à l'Inra à 32 ans, avant j'ai fait des petits boulots et dû passer ma thèse. J'ai calculé qu'aujourd'hui, je pourrais partir à 63-64 ans, avec la réforme ce serait 67 ans."
"Prendre en compte l'espérance de vie"
Nicolas Joseph, 38 ans, égoutier à Paris, élu CGT:
"Nous avons actuellement un régime qui nous donne une bonification de 10 ans. Et là, avec la réforme, on aura l'âge pivot avec une bonification de 2 ans seulement, donc (départ à) 62 ans!
Actuellement, on doit cotiser 32 ans au lieu de 42, donc par exemple quelqu'un qui rentre à 20 ans peut partir à 52 ans.
Mais ce qu'il faut prendre en compte - c'est un chiffre sérieux, qui vient d'une étude de mortalité et de morbidité de l'Inserm -, c'est que quelqu'un qui travaille dans les réseaux d'assainissement a 17 ans d'espérance de vie en moins que quelqu'un qui travaille dans un bureau, par exemple."
"On a des carrières très hachées"
Jean-Maximilien Sobocinski, comédien, adhérent CGT, manifestant à Lille:
"On est précarisés de plus en plus, la retraite pour les jeunes comédiens ça va être terrible parce qu'on a des professions, des carrières très, très hachées. Être danseur à 45 ans, être actrice à 50 ans c'est compliqué, elles ont des carrières très difficiles et au calcul de la retraite, ça va être terrible. Certaines comédiennes à la retraite touchent déjà seulement 500 ou 600 euros."
"Pouvoir dire à mes enfants que je me suis battu pour eux"
Laurent Stefanon, 49 ans, machiniste à la RATP:
"J'attends que le président prenne la parole pour dire +peuple français, je me suis trompé, j'ai fait une erreur, je retire cette réforme et on va désormais partager les richesses+. Mais j'ai peur que le gouvernement n'entende pas.
Je pense à ma mère, à mon grand-père qui se sont battus pour qu'on ait de bonnes conditions de travail. Je veux pouvoir dire à mes enfants que je me suis battu pour eux. Je fais la grève depuis le début et ça devient dur financièrement, mais je tiendrai."
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