En moyenne en France, une femme est tuée par son conjoint ou ex tous les trois jours, et ce malgré l'adoption régulière de mesures pour faire baisser les violences conjugales.
Samedi à Saint-Laurent-du-Maroni (Guyane), une femme a été retrouvée morte tout près de son domicile après avoir été frappée de plusieurs coups de couteau, a indiqué lundi à l'AFP le procureur de la République de Cayenne, Samuel Finielz.
"Les premiers éléments mis à jour par l'enquête établissent qu'elle a été tuée par son conjoint" à la suite d'une dispute, a-t-il ajouté.
L'homme s'est ensuite blessé en tentant de se suicider, et a été hospitalisé. Il sera placé en garde à vue dès que son état de santé le permettra, a ajouté M. Finielz. Une enquête pour homicide par conjoint a été ouverte.
Les meurtres de femmes par leurs conjoints ou ex, passés dans le langage courant sous le terme de "féminicides", sont le stade ultime des violences conjugales, dont sont chaque année victimes plus de 210.000 femmes majeures en France, selon les dernières données officielles.
Au cours des six derniers mois, l'AFP a mobilisé ses journalistes à travers la France pour étudier en détail auprès des autorités (police, gendarmerie, parquets…) les cas présumés, en s'appuyant sur le décompte du collectif "Féminicides par conjoint ou ex".
Le cas de Saint-Laurent-du-Maroni est le 122e confirmé dans ce cadre, mais ce chiffre pourrait être supérieur : une dizaine d'autres affaires sont encore trop récentes et/ou complexes pour être comptabilisées comme féminicides à ce stade de l'enquête, selon les autorités.
Loin du cliché
Dans la grande majorité des cas, la thèse du féminicide ne fait pas de doute pour les enquêteurs même si la présomption d'innocence continue de s'appliquer.
Selon les dizaines de témoins, autorités et médecins interrogés par l'AFP dans le cadre de cette enquête, les scénarios se répètent souvent, mettant en scène, dans tous les milieux sociaux et classes d'âges, des hommes impulsifs, dépressifs ou manipulateurs, des femmes violentées, sous emprise ou qui veulent rester avec leurs enfants, des seniors affaiblis... Loin du cliché de "crime passionnel" qui a longtemps prévalu à propos de ces meurtres en France.
La séparation reste le premier motif invoqué des meurtres (dans au moins 22,5% des cas), devant les disputes (17%), la jalousie (14%). Vient ensuite la maladie/vieillesse (11%), signe d'un phénomène qui touche également les seniors (les femmes âgées représentent près d'une victime sur cinq), selon le décompte de l'AFP.
Près des deux tiers sont commis par armes à feu (32%) ou armes blanches (32%), signe d'une volonté de blesser gravement sinon de tuer, loin devant les coups (15 %) et la strangulation (15%). Autre enseignement, le fort taux de suicide ou tentative de suicide des auteurs après le meurtre: plus de 40%.
Face à la persistance de ces violences, le gouvernement a annoncé fin novembre une série de mesures, après deux mois de consultations dans le cadre d'un "Grenelle des violences conjugales".
Parmi ces annonces, une meilleure prise en charge psychologique des agresseurs, l'introduction dans le code pénal du concept d'"emprise psychologique", un aménagement du secret médical pour permettre aux professionnels de santé de signaler plus facilement les "cas d'urgence absolue".
Plusieurs de ces mesures seront inscrites dans une proposition de loi que porteront deux députés LREM en janvier. Mi-octobre, les députés avaient adopté une proposition de loi pour mettre en place, début 2020, le bracelet antirapprochement, qui permet de maintenir à distance les conjoints violents.
Ces annonces ont été à la fois saluées et jugées insuffisantes par les associations de lutte contre les violences faites aux femmes, qui ont notamment déploré que ces "mesures fortes" ne soient soutenues par "aucun budget" supplémentaire et que certaines "existent déjà mais ne sont pas appliquées". Le gouvernement "passe à côté de l'urgence de la situation", a ainsi déploré l'association Osez le féminisme.
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