"Il faudra que chacun prenne ses responsabilités. Je ne crois pas que les Français accepteraient que certains puissent les priver de ce moment", déclare le chef du gouvernement dans un entretien au Parisien dimanche.
Vendredi soir, il avait convoqué en urgence une réunion à Matignon et demandé au patron de la SNCF Jean-Pierre Farandou de préparer un "plan de transport" précisant quels trains seraient maintenus. Ce dernier avait déjà appelé dans la journée les cheminots en grève illimitée depuis le 5 décembre à "faire une pause" pendant les fêtes.
Réponse cinglante de Laurent Brun, secrétaire général de la CGT-Cheminots (1e): "Si le gouvernement veut que le conflit cesse avant les fêtes, il a toute la semaine prochaine pour prendre la décision de bon sens qui s'impose: le retrait de la réforme par points".
La SNCF, par la voix de la responsable des TGV, a promis à ce stade qu'"au moins" la moitié des voyageurs pourront partir pour Noël. Ceux qui ont déjà réservé un billet pour les vacances de Noël, qui commencent vendredi, sauront mardi s'ils pourront partir.
"La situation peut s'arranger très rapidement. Mais pour que les trains roulent, il faut un message positif du gouvernement", a résumé samedi Roger Dillenseger (Unsa ferroviaire), critiquant au passage un exécutif qui "joue sur la corde sensible".
Trafic "très réduit"
Au delà de la question de Noël, le Premier ministre se montre dans son entretien au Parisien très sévère sur la grève démarrée il y a dix jours. "Certes, il y a eu des grèves très suivies, mais seulement dans quelques corps de la fonction publique", estime-t-il. Ajoutant: "je ne dirais donc pas que tout le pays est en grève. Ce n'est pas un blocage total".
Samedi, la situation était toujours critique dans les transports - un TGV sur quatre et trois TER sur dix en moyenne. Et le trafic restera très perturbé dimanche et lundi avec toujours un quart des TGV et un tiers des TER, ainsi que la quasi-totalité des lignes de métro fermées.
Lundi le trafic restera "très réduit" à la RATP.
En attendant, le gouvernement continue de tenter de remettre la CFDT dans le train des partisans de sa réforme des retraites, consistant à fondre les 42 régimes existant en un "système universel" par points.
Mais son négociateur en chef, Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire aux Retraites, a été fragilisé ces derniers jours dans l'opinion par les accusations de conflit d'intérêts avec le monde des assurances, un cumul de fonctions interdit par la Constitution, mais aussi la présidence d'un "Observatoire régional de la commande publique".
Sa "bonne foi est totale", a estimé samedi Édouard Philippe, mettant fin à l'incertitude qui planait sur une possible démission, évoquée par l'intéressé lui-même pour "préserver" sa réforme très décriée.
Chaud et froid
Reste à savoir si la patron de la CFDT Laurent Berger acceptera de reprendre les discussions proposées par le même Édouard Philippe pour "le plus tôt possible la semaine prochaine".
Jusqu'à présent, rien n'a filtré de sa décision, alors que le gouvernement joue le chaud et le froid sur la question cruciale: la décision d'ajouter au projet de loi un "âge d'équilibre" à 64 ans en dessous duquel on ne touchera pas sa retraite pleine, un allongement de la durée de cotisation présentée comme une garantie de l'équilibre financier du système.
L'âge "pivot" est "négociable", "notre porte est ouverte", a affirmé samedi la secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie, Agnès Pannier-Runacher. Quand le Premier ministre assure qu'il "ne veut pas obliger les gens à travailler plus longtemps, mais (...) les y inciter pour équilibrer le système", car "on vit plus longtemps, donc qu'on va travailler plus longtemps".
C'est une "ligne rouge" pour la CFDT qui, avec une intersyndicale réformiste (CFDT, CFTC, Unsa et les étudiants de la Fage) a appelé à manifester mardi, au côté de l'intersyndicale à l'origine de la grève (CGT, FO, Solidaires, FSU et quatre organisations de jeunesse) pour demander, eux, le retrait du projet.
Cheminots, étudiants, employés de la fonction publique, professions de santé, avocats, magistrats, enseignants sont attendus dans la rue.
Très mobilisés depuis le début du conflit, ces derniers ont obtenu vendredi du gouvernement la garantie de revalorisation des salaires, pour environ 10 milliards d'euros sur plusieurs années, à partir du 1er janvier 2021.
Samedi, quelques centaines de personnes ont manifesté à Lyon, Montceau-les-Mines, Strasbourg, Nantes, Orléans et Toulouse.
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