Le président de l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie), Mohamed Charfi, annoncera les résultats du premier tour vendredi à 11H00 (10H00 GMT), avant que les Algériens ne descendent dans les rues pour la 43e fois depuis le déclenchement du "Hirak" le 22 février.
Un éventuel second tour --scénario sans précédent en Algérie-- aura lieu entre le 31 décembre et le 9 janvier.
Le nom du vainqueur n'a aucune importance pour Saïd 32 ans, ingénieur venu de Bouira, à une centaine de km de route de la capitale. "J'ai manifesté hier à Alger et j'y ai passé la nuit pour remanifester aujourd'hui et dire qu'on ne reconnaît pas leur vote et leur président", explique-t-il à l'AFP sur un marché.
"On va manifester jusqu'à obtenir la démocratie", assure-t-il.
Jeudi, seuls 39,93% des inscrits ont voté au premier tour (41,41% sur le territoire national et 8,69% à l'étranger), a annoncé dans la nuit M. Charfi.
Ce taux est le plus faible de toutes les présidentielles pluralistes de l'histoire du pays. Il est inférieur de plus de dix points à celui du précédent scrutin --le plus faible jusqu'ici-- qui en 2014 avait vu la quatrième victoire de M. Bouteflika.
Aucune projection de résultat n'a été publiée. Mais le camp d'Abdelmadjid Tebboune, ancien bref Premier ministre de M. Bouteflika en 2017, a revendiqué jeudi soir la victoire dès le premier tour. "Selon les premiers éléments en notre possession (...) Abdelmadjid Tebboune a remporté la présidentielle", a déclaré à l'AFP Abdelatif Belkaim, directeur adjoint de la communication du candidat.
Ce dernier a affirmé que M. Tebboune avait recueilli 64% des voix, mais les autres candidats revendiquent un second tour, selon des médias.
"Fin du système"
Morne dans de nombreux bureaux de vote, la journée a été marquée à Alger par une imposante démonstration du "Hirak" qui a à nouveau bravé un important déploiement policier pour défiler en masse.
Une foule estimée à plusieurs dizaines de milliers de personnes est parvenue à envahir les rues du centre-ville, malgré les interventions systématiques et souvent brutales de la police à chaque tentative de rassemblement.
Ce puissant mouvement de contestation populaire et inédit du régime qui a contraint M. Bouteflika à la démission, rejetait catégoriquement la tenue de l'élection, perçue comme un moyen pour le pouvoir de se régénérer.
Les contestataires exigent la fin de ce "système" aux manettes depuis l'indépendance en 1962, et le départ de tous les anciens soutiens ou collaborateurs des 20 ans de présidence Bouteflika. Ce que sont les cinq candidats à la présidentielle (Abdelaziz Belaïd, Ali Benflis, Abdelkader Bengrina, Azzedine Mihoubi et Abdelmadjid Tebboune).
Après une première tentative d'élection avortée en juillet, le haut commandement de l'armée, pilier du régime, ouvertement aux commandes depuis la départ de M. Bouteflika, a tenu coûte que coûte à organiser ce scrutin pour sortir de la crise politico-institutionnelle, qui a aggravé la situation économique.
Visage de ce haut commandement, le général Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée, assurait depuis des semaines que la participation serait "massive".
"Makache l'vote" (pas de vote!), a scandé la foule qui s'est séparée en fin d'après-midi jeudi, avant que la police ne disperse à coups de matraque la centaine de protestataires restants, selon une journaliste de l'AFP.
- "Sursaut patriotique" -
Très affaibli physiquement, le président déchu, Abdelaziz Bouteflika, a voté par procuration via son frère Nacer, suscitant des commentaires ironiques ou irrités sur les réseaux sociaux.
Mercredi, des personnalités proches du "Hirak" avaient exhorté les contestataires à ne pas "répondre aux provocations" à "ne pas empêcher l'exercice par d'autres citoyens de leur droit à s'exprimer librement" --un mot d'ordre respecté à Alger.
Le vote s'est déroulé sans incident majeur à travers le pays sauf dans la région traditionnellement frondeuse et majoritairement berbèrophone de Kabylie, théâtre de sérieux troubles.
"Le nouveau président aura la lourde charge de veiller à la satisfaction des attentes des citoyens qui ont dicté, par un sursaut patriotique à la mesure des défis, la marche en avant", prévient vendredi le quotidien gouvernemental El Moudjahid, un des rares titres à paraître le vendredi, premier jour de weekend.
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