Ces sommets au format "Normandie", en référence à la région française où les dirigeants des quatre pays s'étaient retrouvés pour la première fois en 2014, ne s'étaient plus tenus depuis 2016.
Après trois ans de paralysie des négociations, Vladimir Poutine, vétéran de la scène internationale, y serrera pour la première fois la main de Volodymyr Zelensky, ancien comédien arrivé au pouvoir en mai, sous les dorures du palais de l'Elysée.
Sa poignée de main avec la chancelière sera aussi scrutée, en pleine crise diplomatique entre les deux pays. L'Allemagne a expulsé deux diplomates russes après l'assassinat d'un Géorgien au coeur de Berlin en août, commandité selon la justice allemande par une "entité étatique russe" ou la Tchétchénie.
La guerre entre Kiev et les séparatistes prorusses a fait plus de 13.000 morts dans le Donbass, bastion industriel de l'Est ukrainien, depuis 2014.
Les combats ont fortement baissé en intensité depuis les accords de Minsk en 2015. Mais 80.000 hommes continuent de se faire face de part et d'autre de la ligne de front qui s'étire sur 500 kilomètres. Et chaque mois, des morts sont à déplorer dans des accrochages ou sur des mines.
L'Occident et l'Ukraine accusent Moscou de financer et d'armer les rebelles, ce que la Russie nie, affirmant jouer un rôle politico-humanitaire pour protéger les populations locales russophones.
Test pour Macron
Si la paix n'est pas encore au rendez-vous, Emmanuel Macron et Angela Merkel, la seule à avoir participé à tous les sommets "Normandie" avec Vladimir Poutine, espèrent avancer dans cette direction avec des signaux concrets au sommet de Paris.
"Cette réunion doit nous donner des jalons pour poursuivre dans la mise en oeuvre de Minsk en recréant de la confiance entre les parties", explique-t-on à la présidence française.
"Pour cela, nous avons besoin de la consolidation du cessez-le-feu, du déminage le long de la ligne de contact, de définir de nouvelles zones de désengagement (des combattants, NDLR), de prévoir de nouveaux échanges de prisonniers", détaille-t-elle.
Pour Emmanuel Macron, dont l'appel au rapprochement de l'UE et de la Russie n'a pas toujours été bien perçu par ses homologues européens, ce sommet constituera aussi un test de la bonne volonté du président Poutine.
"Si le sommet devait échouer, ce serait un échec personnel pour M. Macron tant il a investi pour qu'il se tienne", considère Gerhard Mangott, professeur de relations internationales à l'université d'Innsbruck en Autriche.
Depuis le changement de président en Ukraine, une certaine détente se fait sentir. Un échange de 70 prisonniers, dont des figures très symboliques, a pu avoir lieu en septembre. Les troupes belligérantes ont reculé dans trois petits secteurs de la ligne de front. Et des navires de guerre ukrainiens saisis par la Russie ont été rendus.
Mais M. Zelensky, novice en politique, est aussi sous la pression de son opinion, qui redoute de le voir faire trop de concessions afin de tenir sa promesse de campagne de mettre fin à la guerre.
Pressions sur Zelensky ?
"Il ne s'agit pas de tordre le bras de l'un ou de l'autre", assure-t-on à l'Elysée. "La perspective est bien celle du rétablissement de la souveraineté ukrainienne pleine et entière" sur le Donbass, ajoute-t-on. L'annexion de la Crimée par la Russie n'est pas à l'ordre du jour car elle ne relève pas des accords de Minsk, observe-t-on au passage à Paris.
Le président ukrainien a pris les devants en posant plusieurs conditions à la tenue d'élections dans le Donbass, étape clé du processus de paix, autour de laquelle se cristallisent beaucoup d'inquiétudes.
Il réclame le démantèlement préalable de tous les groupes armés "illégaux" – comprendre les séparatistes prorusses et leurs parrains russes – et le retour de la frontière avec la Russie sous le contrôle de Kiev.
Or les accords de Minsk prévoient ce retour sous contrôle ukrainien de la frontière, par laquelle hommes et armes sont soupçonnés de passer, au lendemain seulement des élections.
"S'il faut renégocier sur ce point ou trouver une manière de satisfaire la demande du président Zelensky, nous serons prêts à en discuter", dit-on à l'Elysée.
Vladimir Poutine s'est montré plus circonspect sur ses intentions, se contentant de dépeindre son homologue ukrainien comme "sincère" et "sympathique".
Pour Gerhard Mangott, le président russe arrive en position de force à Paris. "En présentant son homologue comme +constructif+ et +honnête+, il met en fait la pression sur lui (..) et renvoie en quelque sorte la balle dans le camp de l'Ukraine", dit-il à l'AFP.
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