Les syndicats opposés au futur "système universel" de retraites, censé remplacer les 42 régimes existants, vont-ils "rejouer 95" et ses trois semaines de grèves contre la réforme des régimes spéciaux?
Ceux des cheminots, qui appellent à un mouvement illimité, promettent dans tous les cas une démonstration de force, au moins pour la journée de jeudi, qui s'annonce éprouvante pour les usagers du rail, et probablement au-delà.
Au siège de la SNCF, on estime ainsi que le mouvement devrait durer jusqu'au 12 décembre, date à laquelle le Premier ministre Edouard Philippe pourrait préciser le projet attendu au Parlement début 2020.
D'après la compagnie ferroviaire nationale, 90% des TGV et 80% des TER seront annulés jeudi, quand la RATP annonce un trafic "extrêmement perturbé" avec 11 lignes de métro fermées, plus que lors de la précédente grève, qui avait quasiment paralysé la capitale le 13 septembre.
Dans le ciel, Air France a annulé 30% de ses vols domestiques, 15% des moyens-courrier, et EasyJet 233 vols intérieurs et moyen-courrier.
Côté service public, les profs ne seront pas en reste: le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, a beau assurer que leurs pensions de retraite "ne baisseront pas", le taux de grève s'élèvera à 55% dans les écoles (78% à Paris), et seules "30% des écoles pourront assurer" un service minimal d'accueil, a-t-il annoncé mercredi.
Le mécontentement s'exprimera aussi dans la rue, avec 245 rassemblements et manifestations déclarés dans toute la France, selon le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.
Anticipant la présence de "quelques centaines" de "black blocs" et de "gilets jaunes radicaux" dans le cortège parisien, "peut-être quelques milliers" dans tout le pays, le ministre a annoncé que "plusieurs milliers" de policiers et gendarmes seraient mobilisés.
A Paris, la préfecture de police a décidé de la fermeture de tous les commerces sur le parcours (gare de l'Est-Nation).
Attention "à respecter le droit de manifester", l'a mise en garde mercredi le chef de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, se déclarant "totalement hostile aux violences qui invisibilisent le mouvement social".
"Une place pour les discussions"
Peu habituées à battre le pavé, la CFE-CGC va manifester jeudi, la CFTC a laissé ses syndicats "libres" de rallier, des fédérations Unsa se rassembleront devant Bercy... Et la CFDT-Cheminots, à contre-courant de sa centrale, appelle à une grève illimitée.
Chez les organisations à l'origine de la grève interprofessionnelle (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, Fidl, MNL et Unl), on pense déjà à l'après : une intersyndicale est programmée vendredi pour envisager la suite. En l'absence notable de la CFDT, favorable à un système de retraites "universel", "plus lisible" et "plus juste", bien qu'opposée aux mesures d'allongement de la durée de travail envisagées par l'exécutif pour combler les déficits.
RATP, SNCF, Air France, EDF, poids lourds, avocats, enseignants, crèches... Le mouvement a pris de l'ampleur au fil des semaines, s'étendant aux "gilets jaunes", mais aussi au Parti socialiste, au PCF, à La France insoumise et au Rassemblement national.
Dans un contexte social déjà tendu, l'exécutif a enchaîné les réunions, dont un séminaire gouvernemental dimanche à Matignon.
Le haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye, qui consulte depuis deux ans patronat et syndicats, a accéléré le tempo pour finir les tours de table avant jeudi et soumettre ses propositions le 9 ou le 10 décembre.
La fermeté reste de mise, Emmnanuel Macron ayant prévenu qu'il ne "renoncerait pas" à sa promesse de campagne, quand Edouard Philippe se dit "plus déterminé que jamais".
Mais "il y a une place pour les discussions", a assuré la ministre des Transports Élisabeth Borne, alors qu'un report de l'application du nouveau système après 2025 est notamment sur la table.
Le Premier ministre "a dit qu'il était prêt à poser des durées de transition qui soient assez longues (...) sans aller jusqu'à la clause du grand-père qui consistait à faire porter la réforme simplement sur les nouveaux entrants", a rappelé le secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari.
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