A la tête du beffroi de la capitale des Flandres depuis 18 ans, l'ancienne ministre de Lionel Jospin avait pourtant assuré après sa réélection en 2014 qu'il s'agissait de son dernier mandat. "Sauf circonstances exceptionnelles", avait-elle toutefois glissé.
"Entre les inégalités sociales qui ne se sont pas arrangées, les catastrophes naturelles, le climat international angoissant, on sent qu'on est dans une période où le pays est sous tension. Il faut tenir la barre. J'ai la conviction réelle que je peux proposer aux Lillois d'aller plus loin avec eux", met en avant Martine Aubry, 69 ans, dans La Voix du Nord pour justifier cet ultime combat politique.
Face au libéralisme "à tout crin", selon elle, du président Emmanuel Macron et à l'urgence environnementale dans une ville fortement touchée par la pollution, celle qui a porté l'emblématique loi sur les 35 heures entend axer sa campagne sur un programme "socialement juste" et "écologiquement fort".
"Ma conviction est qu'il n'y aura pas de transition pleine et entière sans justice sociale. Je serai garante de l'une et de l'autre", a précisé à l'AFP Martine Aubry, à une semaine d'un large mouvement social contre la réforme des retraites.
Si elle dit avoir "beaucoup mûri" sa décision de se représenter, sa candidature était un secret de Polichinelle. Dans les starting-blocks depuis des mois, la fille de Jacques Delors avait lancé dès 2018 son think-tank, "Lille 2030", avant de se doter d'un micro-parti, avec une association de financement "Lille avenir".
"Je pars pour un mandat complet" de six ans, assure-t-elle face aux interrogations sur un possible passage de relais en cours de route. "Si je me sentais pas en forme, si je ne me sentais pas enthousiaste, je n'irais pas".
"Ce qui ne m'empêche pas de préparer l'avenir", précise à l'AFP celle à qui l'on reproche souvent de ne pas avoir su préparer sa succession, souhaitant "transmettre" et "apprendre aussi de ceux qui incarneront à terme l'avenir de Lille".
"Animal politique"
"Elle ne manquera pas d'incarner le nouvel élan que les Lillois (...) attendent, a réagi l'ancien ministre socialiste Patrick Kanner, assurant qu'il "prendrait toute (sa) place aux côtés de Martine Aubry" lors de la campagne.
A l'inverse, Violette Spillebout, la candidate LREM à Lille et ancienne directrice de cabinet de Martine Aubry, a dit voir dans cette candidature "un choix par dépit et un constat d'échec flagrant". Dans un communiqué, Mme Spillebout évoque "l'échec de la parole politique" et des "convictions" de Martine Aubry, ancienne première secrétaire du PS "qui avait fait adopter la règle de non-cumul de plus de 3 mandats successifs", mais aussi "l'échec du rassemblement" et du "projet". "Lille mérite mieux que d'être la +ville anti-Président de la République+", fustige-t-elle.
Outre Mme Spillebout, Martine Aubry devra aussi surveiller, après le très bon score d'EELV à Lille aux européennes (21,7%, meilleur résultat jamais enregistré dans la ville), l'écologiste Stéphane Baly, qui siège dans la majorité municipale mais juge que Mme Aubry a "raté sa sortie".
Sont également en lice à Lille Julien Poix (LFI, qui compte deux députés lillois), l'ancien ministre Marc-Philippe Daubresse (LR), Eric Cattelin-Denu (RN) et le divers droite Thierry Pauchet, chef de file de l'opposition lilloise qui a refusé de céder la place à M. Daubresse.
"Aubry est un animal politique, elle a de la ressource. La favorite, c'est largement elle", pronostique un ténor régional.
L'intéressée balaie critiques et mises en garde sur un possible "combat de trop". "Ma passion est intacte et j'entends beaucoup de Lillois désireux de poursuivre l'aventure commune", assure-t-elle.
La bataille pour Lille est importante aussi pour un PS en déconfiture. Longtemps hégémonique dans le Nord, il a quasiment tout perdu en quatre ans: le département, la région, la métropole lilloise et ses députés... Le beffroi apparaît comme le dernier bastion régional à sauver.
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